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L'artiste français Hervé Di Rosa, récemment élu à l'Académie des Beaux-Arts, est un plasticien de 63 ans qui a parcouru le monde pour se consacrer aux "arts modestes", avant de poser ses pinceaux à Lisbonne il y a une dizaine d'années.
L'exposition intitulée "Archipel", qui s'est ouverte fin mars au Musée d'Art, Architecture et Technologie (MAAT), présente son univers artistique pour la première fois au Portugal.
"J'ai toujours besoin de revenir ici !", témoigne l'artiste devant ses toiles peuplées de personnages au visage rond avec un seul grand œil et de grosses lèvres rouges.
"Aujourd'hui, il faudrait que je parte ailleurs ...", confie-t-il avec un large sourire au milieu des pinceaux et des pots de peinture qui jonchent son atelier lisboète, d'où l'on aperçoit entre les toits les eaux bleu foncé de l'estuaire du Tage.
Comme à chaque étape du périple artistique qui l'a conduit aux quatre coins du monde, du Ghana au Vietnam, en passant par le Mexique et les Etats-Unis, il s'est rapproché des artisans locaux pour réaliser ses œuvres, qui vont de la peinture à la sculpture en passant par la bande dessinée.
Au Portugal, il a découvert la technique des "azulejos", emblématiques carreaux de faïence que l'on trouve sur de nombreuses façades.
- Objets hétéroclites -
"Au départ, je pensais juste faire quelques panneaux... mais j'ai du mal à m'en détacher aujourd'hui", lâche l'artiste-peintre à l'accent méridional.
Il dispose même d'un petit atelier au sein de la manufacture "Viuva Lamego", près de Sintra, dans la banlieue de Lisbonne, où sont conçus, peints et cuits ces carreaux de céramique.
Avec ce savoir-faire traditionnel, "tu ferais presque n'importe quoi, le résultat serait très beau !", s’enthousiasme Hervé Di Rosa en faisant glisser son pinceau sur une céramique pour donner vie à l'un de ses personnages exubérants.
Une partie de ce travail est actuellement présenté jusqu'en septembre prochain au MAAT, édifice à l'allure futuriste bâti sur la rive du Tage, dans le quartier de Belém.
"J'avais très envie de faire voir mon travail" au Portugal, lance dans un débit rapide ce grand collectionneur en déambulant au milieu des vitrines dressées dans une grande salle ovale du musée lisboète.
Enseignes publicitaires, figurines en plastique, gadgets en forme de poissons, sculptures en papier mâché, bibelots décoratifs ou encore des affiches de cinéma ghanéennes... le visiteur découvre des objets très hétéroclites.
"C’est une exposition qui s’adresse à un très large public", tient à rappeler Joao Pinharanda, directeur du MAAT, lors du vernissage de cette exposition.
- Un regard différent -
Ces objets sont, pour la plupart, issus des collections du Musée international des arts modestes (MIAM), que l'artiste a fondé dans sa ville natale de Sète (sud-est de la France) il y a 23 ans.
"L'art modeste, ce n'est pas un mouvement artistique... c'est une manière de regarder les choses différemment", explique Hervé Di Rosa, qui a également cofondé le mouvement de la figuration libre au début des années 1980.
Ses productions artistiques, qui ont donné lieu à des dizaines d'expositions depuis une quarantaine d'années et sont présentes dans d'importantes collections publiques et privées à travers le monde, interrogent sur les frontières de l'art contemporain.
Le parcours artistique de cette figure internationale de l'art a obtenu la reconnaissance de ses pairs, qui l'ont élu le 23 novembre dernier à l'Académie française des Beaux-Arts, section peinture, pour succéder au peintre Jean Cortot décédé en 2018.
"J'ai pris ça un peu à la légère, je dois reconnaître, au début", raconte l'homme issu d'un milieu modeste. Son père était cheminot et sa mère faisait des ménages.
"Face à des structures aussi fortes que le marché de l'art, (...) on s'aperçoit qu'on a encore plus besoin d'une force différente" comme celle de l'Académie, poursuit l'artiste, sans cacher la fierté de son nouveau statut.