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Le PDG de la compagnie pétrolière nationale des Emirats arabes unis a été désigné jeudi président de la conférence de l'ONU sur le climat prévue cette année dans le riche pays du Golfe, suscitant de vives critiques parmi les militants de l'environnement.
Le ministre émirati de l'Industrie, patron du géant pétrolier ADNOC (Abu Dhabi National Oil Company) et envoyé spécial pour le changement climatique, Sultan Ahmed al-Jaber, sera le premier PDG à présider une COP, selon un communiqué publié par l'agence de presse officielle WAM.
"Nous apporterons une approche pragmatique, réaliste et axée sur les solutions", a promis Sultan Ahmed al-Jaber, cité dans le communiqué.
"L'action climatique est une immense opportunité économique d'investissement dans la croissance durable. Le financement est la clé", a-t-il ajouté.
Le ministre émirati dirige la compagnie pétrolière nationale depuis 2016 mais aussi Masdar, l'entreprise émiratie d'énergies renouvelables.
John Kerry, l'envoyé spécial des Etats-Unis sur le changement climatique, a félicité M. Jaber, qualifiant les Emirats de "partenaire crucial pour faire avancer" les efforts conjoints pour lutter contre la crise climatique.
M. Jaber "est un diplomate et un homme d'affaires expérimenté (...) et cette combinaison unique aidera à réunir toutes les parties prenantes nécessaires pour avancer plus rapidement et à grande échelle", a-t-il déclaré dans un tweet.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a de son côté réaffirmé qu'"il n'y a aucun moyen d'éviter une catastrophe climatique sans mettre fin" à la dépendance aux combustibles fossiles, selon son porte-parole Stéphane Dujarric qui commentait la nomination de M. Jaber.
La double casquette du ministre émirati lui vaut de nombreuses critiques de la part des militants de l'environnement.
- "Conflit d'intérêts" -
"La nomination de Sultan Ahmed al-Jaber à la présidence de la COP28, alors qu'il occupe le poste de PDG de la compagnie pétrolière nationale d'Abu Dhabi constitue un conflit d'intérêts scandaleux", a réagi Harjeet Singh, de l'organisation Climate Action Network International, en dénonçant l'influence des lobbyistes des combustibles fossiles.
Pour Teresa Anderson, d'ActionAid, "cela va plus loin que de confier au renard la charge du poulailler".
La doyenne de la Fletcher School de l'université de Tufts aux Etats-Unis, Rachel Kyte, a souligné le "dilemme" auquel fera face le nouveau président de la COP.
"Les Emirats arabes unis cherchent à être la source d'énergies fossiles la plus économique et la plus efficace, alors que la production mondiale doit baisser (...) Il ne peut plus y avoir de développement des énergies fossiles", a-t-elle affirmé.
Le pays du Golfe, qui figure parmi les principaux exportateurs de pétrole au monde, plaide pour une sortie progressive des hydrocarbures. Il estime toutefois à plus de 600 milliards de dollars par an les investissements nécessaires dans l'industrie pétrolière et gazière d'ici 2030, pour répondre à la demande.
Les Emirats ont envoyé le plus grand contingent de lobbyistes de l'industrie à la COP27 organisée en novembre en Egypte.
Cette édition a permis l'adoption d'une résolution sur l'indemnisation des pays les plus pauvres pour les dégâts causés par le changement climatique.
Mais elle n'a pas réussi à faire progresser la réduction des émissions de gaz à effet de serre, pour maintenir l'objectif de limiter le réchauffement de la planète. Et la question d'une moindre utilisation des énergies fossiles a été à peine mentionnée dans les textes.
- Réchauffement climatique -
Les Emirats ont connu, grâce au pétrole, une croissance fulgurante depuis les années 1970, mais ils cherchent à diversifier leur économie.
Le pays - classé quatrième plus grand pollueur au monde par habitant en 2019 par la Banque mondiale - s'est engagé à atteindre la neutralité carbone en 2050, en misant sur les technologies de capture de carbone et les énergies vertes.
Les Emirats sont "un investisseur majeur dans les énergies renouvelables chez eux et à l'étranger", a souligné l'ancien responsable du climat à l'ONU, Yvo de Boer, en apportant son soutien à Sultan Ahmed al-Jaber.
Le réchauffement climatique est un sujet particulièrement important pour le pays désertique de 10 millions d'habitants, dont 90% d'expatriés.
Selon une étude publiée en 2021, certaines régions du Golfe, où les températures frôlent parfois les 50 degrés en été, pourraient devenir invivables d'ici la fin du siècle.
"Limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius nécessitera des réductions significatives des émissions (...) et une aide accrue aux économies émergentes", affirme le communiqué publié jeudi, en référence à l'objectif fixé lors des précédents sommets de la COP.
La COP28 se tiendra à Dubaï en novembre et décembre.