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Le Sénégal a rendu lundi un dernier hommage, plein d'émotion, au cinéaste Ousmane Sembène, pionnier du cinéma africain et co-fondateur du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), décédé samedi à l'âge de 84 ans.
La levée du corps de celui qui se surnommait avec humour "l'aîné des anciens" du cinéma africain a eu lieu à Dakar en présence des plus hautes autorités de l'Etat.
La quasi-totalité du gouvernement sénégalais était présent lors de cette courte cérémonie présidée par le Premier ministre Macky Sall qui représentait le président Abdoulaye Wade en visite en France.
M. Sall a souhaité rendre "l'hommage de la Nation à cet Africain, ce combattant de la liberté et de la dignité de l'Homme noir" qui a "laissé un héritage exceptionnel".
Depuis Paris, M. Wade a déploré "une grande perte pour le Sénégal et l'Afrique".
" Nous avons décidé de lui consacrer une cérémonie à laquelle nous inviterons les hommes de culture de la diaspora, de l'Europe et des Etats-Unis pour réaliser une manifestation à la hauteur de ce grand homme qui a marqué son temps dans l'art cinématographique", a souligné le chef d'Etat.
Le cinéaste a ensuite été inhumé au cimetière de Yoff au nord de Dakar, près de l'océan Atlantique, en présence de plusieurs personnalités des arts et de la Culture, dont le cinéaste Cheikh Ngaido Ba, le sculpteur Ousmane Sow et le chanteur Ismaël Lo.
Une centaine de personnes, très émues, ont assisté à l'inhumation au cours de laquelle des versets du Coran ont été récités.
Depuis l'annonce dimanche de sa mort, les hommages ont afflué. L'ancien président sénégalais Abdou Diouf, secrétaire général de la Francophonie, a estimé que l'Afrique perdait "un de ses plus grands cinéastes" et un "fervent défenseur de la liberté et de la justice sociale".
La ministre française de la Culture Christine Albanel a salué lundi la mémoire de "l'un des regards les plus perçants sur le présent et le passé de l'Afrique".
Le ministre français de l'Immigration, Brice Hortefeux, a fait part de son "émotion", estimant que "la francophonie (perdait) un artiste talentueux, qui portait sur le monde un regard chaleureux", a-t-il regretté.
Le ministre de la Culture malien, Cheick Oumar Sissoko, également cinéaste et proche d'Ousmane Sembène, a salué "la référence" du cinéma africain. "L'Afrique du cinéma a perdu un de ses phares", a-t-il souligné.
Le délégué général du Fespaco, Baba Hama, a, de son côté, déploré "une grande perte pour le cinéma africain".
Ousmane Sembène a réalisé une dizaine de films.
De "Borom sarret" (1963), racontant une journée dans la vie d'un pauvre transporteur, à "Mooladé", plaidoyer contre l'excision et hommage aux femmes, en passant par "La Noire de..." (1966), "Le Mandat" (1968), "Ceddo" (1976), sa filmographie montre un "cinéma progressiste profondément populaire".
Il a été récompensé à deux reprises au festival de Venise, pour "Le mandat" en 1968, et en 1988 pour "Le camp de Thiaroye", un film retraçant la violente répression en 1944 de tirailleurs sénégalais réclamant leur solde par l'armée française.
Il a également reçu le prix "Un certain regard" lors du festival de Cannes en 2004 pour son film "Moolaadé", plaidoyer contre l'excision.
