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Le virage rock de la chanteuse malienne Rokia Traoré

La rythmique balafon-calebasse-n'goni remplacée par une basse-batterie, des guitares électriques parfois psychédéliques: Rokia Traoré s'éloigne sur son nouveau disque et plus encore en concert de la tradition malienne pour épouser une pulsation rock et certains accents blues.

"Je suis définitivement moderne", a déclaré à l'AFP Rokia Traoré, qui, après un concert complet mardi à La Cigale va se lancer à l'assaut des festivals d'été: Le Cannet des Maures (5 juillet), Tarnos (19), Arles (22), Lyon (29), Perpignan (30), Namur (Belgique, 2 août), Budapest (14 août).

Puis elle sera de retour à Paris pour trois concerts à l'Alhambra les 14, 15 et 16 novembre.

Cinq ans après "Bowmboï", où le changement commençait déjà à se faire sentir par rapport à ses deux premiers disques où elle recomposait les musiques traditionnelles maliennes, son nouvel album "Tchamantché" ("La recherche de l'équilibre") constitue une évolution majeure.

"Le son, l'orchestration avec trois guitares électriques, une rythmique basse-batterie-n'goni, n'a rien à voir avec une orchestration balafon-calebasse-n'goni", explique la chanteuse de 34 ans. "En même temps, il fallait que ça reste moi, que je puisse assumer ce changement là", poursuit une musicienne qui ne s'"interdit pas l'évolution" et pour qui "faire des albums et évoluer artistiquement" est ce qui l'intéresse.

"Le travail sur cet album, le choix des musiciens, tout cela m'a pris beaucoup de temps", raconte Rokia Traoré, qui avoue être passée par des périodes de doutes.

"Seb (Sébastien Martel, le guitariste de M, ouvert sur divers univers musicaux) est venu. Ce que j'attendais de lui, c'était des tenus d'accords juste colorés par endroits", raconte-t-elle.

Les couleurs de la guitare de Sébastien Martel s'ajoutent à celles du percussionniste Steve Shehan, du Hadouk Trio ou du bassiste Christophe "Disco" Minck et son style funk-fusion.

"Personne n'est là par hasard", insiste Rokia Traoré, une femme émancipée qui vit la double culture au quotidien, entre Amiens et Bamako où elle possède une maison, avec des séjours parisiens.

Son pari, rester immédiatement identifiable et reconnaissable tout en changeant d'orientation, semble en tout cas réussi.

Si la pulsation du rock et le côté lancinant du blues sont prégnants, les mélodies se situent encore dans une certaine tradition malienne, avec la présence du n'goni, "le seul instrument local qui est resté", et le phrasé du chant en bamanan de Rokia. Le Mali ancestral réapparaît aussi le temps d'une longue mélopée évoquant l'ancien empire mandingue.

Fille de diplomate, Rokia Traoré a eu ce privilège de voyager et d'être très tôt en contact avec l'Occident. Ce vécu permet à cette artiste qui défend l'idée d'une société africaine plus décomplexée et allant de l'avant, de faire entendre sa différence.

"Ce n'est pas parce que je suis noire et femme que je devrais avoir des rêves moindres et une place moindre dans la société. Non !", affirme cette femme aux cheveux courts.

"Je déteste encore aujourd'hui le dimanche, qui était le jour où on me posait des tresses quand j'étais petite, et ça me faisait mal", se souvient-elle.

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