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Médine provoque une querelle chez les Verts, Tondelier sous pression

Accusé d'avoir publié un "tweet antisémite", le rappeur Médine divise les écologistes, dont plusieurs figures regrettent son invitation aux journées d'été d'EELV et jugent ses premières excuses insuffisantes, obligeant leur numéro un Marine Tondelier à hausser le ton vis-à-vis de l'artiste.

"Fallait pas l'inviter": l'eurodéputée Karima Delli a mis les pieds dans le plat vendredi matin. En tant qu'"écologiste et femme de gauche, viscéralement attachée au respect des gens, à la liberté, l'égalité, la solidarité et la laïcité (...) je ne peux soutenir et encore moins cautionner l'invitation de Médine", a écrit l'eurodéputée sur X (ex-Twitter).

Programmé jeudi prochain en fin de journée pour un débat au Havre, sa ville natale, avec la secrétaire nationale des Verts, le rappeur a ravivé les accusations récurrentes d'antisémitisme à son encontre, en qualifiant l'essayiste Rachel Khan - juive et petite-fille de déporté - de "resKHANpée".

Ses excuses pour cette "formule pas adaptée, qui a certainement dû heurter des personnes", avaient dans un premier temps convenu à Mme Tondelier, satisfaite de cette "réponse sans ambiguïté".

Mais d'autres écologistes ne l'entendent pas ainsi. "Quand on écrit des textes on mesure le poids et la portée des mots", a réagi la députée des Hauts-de-Seine Francesca Pasquini, jugeant qu'"il n'y a pas d'excuses possibles".

A tout le moins, "ce n'est pas suffisant", a estimé jeudi sur LCI l'ancien patron du parti Julien Bayou, que les "relents antisémites immondes" du tweet initial de Médine ont mis "très mal à l'aise".

Le député de Paris a toutefois dit faire "confiance à Marine Tondelier pour poser le cadre" et "interrompre le débat si la clarification n'est pas faite".

- "Occasion ratée" -

"Il y a quand même une condition pour qu'il s'exprime", a déclaré vendredi à l'AFP sa collègue Sandrine Rousseau, souhaitant que le rappeur "reconnaisse le caractère antisémite" de son tweet.

Un acte de contrition pour crever l'abcès, ce qui "permettrait de retomber sur un débat un peu plus sain", a-t-elle ajouté, tout en redoutant que "les journées d'été soient réduites à ça".

Crainte partagée par l'ancien candidat à l'élection présidentielle Noël Mamère, qui a déploré sur France Inter "une occasion ratée" pour son ancien parti, "en train de prêter le flanc à tous ceux qui nous haïssent (et) nous traitent d'islamo-gauchistes".

Déjà, la polémique a conduit le ministre de l'Industrie, Roland Lescure, à annuler sa venue au Havre, considérant que "ne pas y aller s'imposait" car Médine "joue avec l'ambiguïté". Celui des Transports, Clément Beaune, a enfoncé le clou en prenant le parti de Karima Delli, dont le "message courageux (l')honore et reflète (ses) engagements constants".

Tandis que les désaccords s'accumulent, Mme Tondelier a adopté un ton plus ferme envers son invité, promettant vendredi sur France Inter d'être "extrêmement attentive à ce que Médine dira" jeudi prochain et "les jours qui suivront".

Selon elle, l'artiste a exprimé un "antisémitisme insidieux", comme d'autres personnes "qui ne prennent pas conscience de la portée de leurs propos", que ce soit "par maladresse" ou "mimétisme", "bêtise" ou "ignorance".

Comme beaucoup de rappeurs, Médine est un habitué des provocations, dans les paroles de ses chansons comme dans certaines déclarations. Egalement accusé d'homophobie et de communautarisme, il avait revendiqué en mai dernier "le droit à l'erreur" et à la "contradiction", et reconnaissait des "errances".

La cheffe de file des écolos a espéré que leur débat "serve au moins à faire en sorte de faire reculer l'antisémitisme" en France.

Rare soutien dans les rangs, le député du Val-d'Oise Aurélien Taché "ne doute pas que (cet) échange (...) sera passionnant", regrettant au passage "les débats mortifères sur la soi-disant +gauche républicaine+".

Après les Verts, Médine est également attendu samedi à l'université d'été de la France insoumise, dans une atmosphère nettement plus consensuelle.

"Médine n'est pas raciste. Pourquoi vouloir lui faire avouer des positions qui ne sont pas les siennes après l’avoir invité ?", a lancé vendredi le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon.

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