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En Arabie saoudite, des discussions "pas faciles" sur l'Ukraine

L'Arabie saoudite, en quête d'influence mondiale, a accueilli samedi une réunion sur l'Ukraine qui avait prédit des discussions "pas faciles", selon un représentant de Kiev, alors que Ryad fait la part belle aux puissances émergentes proches de Moscou.

La réunion qui a démarré dans l'après-midi à Jeddah, au bord de la mer Rouge, s'est achevée samedi soir après plusieurs heures de discours des délégations présentes et une longue discussion à huis clos, ont indiqué des participants.

Comme prévu, aucune déclaration finale ne sera publiée, mais une source européenne a fait état d'un terrain d'entente sur des points clés, en particulier sur le respect de "l'intégrité territoriale et de la souveraineté" de l'Ukraine qui doit être "au cœur de tout accord de paix".

Selon des diplomates, la réunion devait réunir près d'une quarantaine de pays, à l'exclusion de la Russie, Kiev étant à l'origine de ces discussions qui se sont tenues à Jeddah, au bord de la mer Rouge.

A la fois proche de Moscou et de Washington, Ryad a particulièrement tenu à recevoir le Brésil, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud, puissances émergentes membres des Brics (avec la Russie) qui, contrairement aux Occidentaux, n'ont pas pris partie pour l'Ukraine sans toutefois soutenir l'invasion russe lancée en février 2022, selon les mêmes sources.

"La Chine a participé activement et s'est montrée positive à l'idée d'une nouvelle rencontre", a indiqué la source européenne après la réunion.

"Les efforts convergent pour créer les conditions d’une négociation valable (...) Est-ce que la réunion d’aujourd’hui créent ces conditions? Clairement non. C’est un effort de long terme", a déclaré de son côté une source diplomatique française.

- "Impliquer Moscou" -

Mais le Brésil a estimé samedi que "toute véritable négociation doit inclure toutes les parties", y compris la Russie, selon Celso Amorim, un conseiller du président brésilien Lula da Silva, qui participait à la réunion.

"Bien que l'Ukraine soit la plus grande victime, si nous voulons vraiment la paix, nous devons impliquer Moscou dans ce processus sous une forme ou une autre", a-t-il encore dit, selon le texte de sa déclaration, transmis à l'AFP.

Dans un discours samedi, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a indiqué de son côté que la délégation ukrainienne a mis en avant son plan de paix de dix points, prévoyant notamment le retrait total des troupes russes du territoire ukrainien.

"Les discussions ne seront pas faciles, mais la vérité est de notre côté", avait reconnu de son côté Andriy Yermak, chef de l'administration présidentielle ukrainienne qui représente le pays à Jeddah.

"Nous avons de nombreux désaccords et nous avons entendu de nombreux points de vue", avait-t-il ajouté vendredi dans une interview télévisée.

Critiquée par les Occidentaux pour son refus de condamner la Russie, la Chine a envoyé à Jeddah son émissaire pour l'Ukraine, Li Hui, et s'est dite déterminée à contribuer à "un règlement politique de la crise ukrainienne".

Côté occidental, Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale du président Joe Biden, a mené la délégation américaine à Jeddah, selon la Maison Blanche.

Paris a été représenté par Emmanuel Bonne, le conseiller diplomatique du président Emmanuel Macron, selon l'ambassade de France à Ryad.

Selon le programme vu par l'AFP, la réunion devait comporter trois heures de discours des participants et deux heures de discussions à huit clos avant un diner officiel.

- "Faire oublier les échecs" -

L'Ukraine, avec les Etats-Unis, a reproché à Ryad de faire le jeu de la Russie, sous le coup de sanctions occidentales, en menant conjointement avec elle une politique pétrolière visant à doper les prix sur les marchés mondiaux.

Egalement à l’œuvre dans les pourparlers sur le Soudan, théâtre d'un conflit depuis la mi-avril, l'Arabie saoudite, après plusieurs années de politiques erratiques, se voit aujourd'hui en faiseur de paix.

Le royaume a assaini ses relations avec ses propres rivaux, à commencer par le Qatar, la Turquie et même, cette année encore, l'Iran et la Syrie.

Mais si elle cherche à s'imposer en "puissance moyenne mondiale", l'Arabie saoudite espère aussi "faire oublier certains de ses échecs passés, comme son intervention au Yémen ou l'assassinat (en 2018) de Jamal Khashoggi", journaliste critique saoudien, souligne à l'AFP Joost Hiltermann, responsable du Moyen-Orient à l'ONG spécialisée International Crisis Group.

La volatilité des marchés de l'énergie liée à la guerre en Ukraine a toutefois donné l'occasion à l'Arabie saoudite de se remettre en selle diplomatique.

A l'ONU, l'Arabie saoudite a soutenu les résolutions dénonçant l'invasion russe ainsi que l'annexion proclamée de territoires dans l'est de l'Ukraine.

En mai, le royaume avait aussi convié à un sommet de la Ligue arabe Volodymyr Zelensky qui en avait profité pour accuser certains dirigeants de la région de fermer les yeux sur l'invasion russe.

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