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"Il y a une forte baisse des inscriptions en soins infirmiers": Sabine et Corine, deux enseignantes, s'inquiètent pour l'avenir de leur profession

Sabine et Corine sont inquiètes pour leur profession. Infirmières de formation, elles enseignent leur métier depuis de nombreuses années en province de Hainaut. Selon elles, les inscriptions ont "fortement" diminué dans plusieurs établissements scolaires. Cette situation s'aggraverait chaque année. Peut-on dès lors parler d'une "pénurie" depuis cette rentrée scolaire? Nous avons interrogé les autorités pour faire le point sur la situation.

Sabine est infirmière depuis 30 ans. Elle enseigne son métier depuis 5 ans à travers le brevet d’infirmier.ère hospitalier.ère (au niveau secondaire). Pour elle, dans son école en province de Hainaut, il existe une "pénurie au niveau du nombre d’inscrits". "Depuis que je suis dans cet établissement, on voit une très forte diminution au niveau des inscriptions. Cette année ne fait que suivre les années précédentes. Nous sommes plusieurs professeurs à voir notre contrat ne pas être renouvelé à cause de ce nombre d’élèves. Je parle en connaissance de cause pour mon école, mais c’est le cas dans d’autres écoles", assure-t-elle.

Du boulot j'en retrouverai, ça n'est pas le problème

"Le but de ma démarche est de dire que je vais perdre mon job par manque d'élèves, mais certainement pas de m’apitoyer sur mon sort. A la base, je suis infirmière et du boulot, j’en retrouverai. Ce n’est pas là le problème. La direction fait de son mieux pour pouvoir garder les professeurs. C’est plutôt un appel à l’aide pour dire "Attention, les hôpitaux se vident de personnel compétent", et personne n’est là pour assurer cette relève."  

Les craintes de l'enseignante se basent également sur ses observations en milieu hospitalier. "Je vais aussi dans les hôpitaux pour suivre les élèves en stage, et force est de constater que les établissements se vident de personnel soignant compétent. Le personnel déserte ces centres médicaux (hôpitaux) et de moins en moins de jeunes s’inscrivent dans nos formations. Depuis un bon moment, je me dis que je dois faire quelque chose. Et peut-être que ce grain de sable que je jette va provoquer quelque chose. Je l’espère. C’est une réelle catastrophe."

"On en parle depuis quelques années"

Corine, une habitante de Dour, enseigne cette profession depuis 18 ans en province de Hainaut, et elle dresse un constat similaire.  

"On a beaucoup moins d’inscriptions dans les écoles. Cela devient dramatique. J’enseigne dans une école qui forme des infirmières brevetées. Cette formation va être supprimée l’année prochaine dans l'établissement où je travaille. Durant le Covid, tous les soignants étaient applaudis. On allait revaloriser le métier du soignant, mais ça n’a pas du tout été fait. Rien ne bouge. La profession est en crise. On enseigne depuis des années, c’est devenu notre passion. Et pour beaucoup, nous n’avons pas forcément envie de retourner travailler dans les hôpitaux. On en parle depuis quelques années, mais là, c’est chaud bouillant."  

Selon elle, le métier ne serait plus suffisamment attrayant à différents niveaux.  

"Les jeunes s’intéressent plus au bien-être. Ils demandent ce que sont les métiers, les horaires, les salaires… Quand on voit le salaire d’une infirmière et ce qu’elle doit faire à côté… L’investissement… Les jeunes baissent les bras. Il n’y a pas que dans mon école qu’on observe ce phénomène de la diminution des inscriptions. C’est la première année où il y a une telle inquiétude. L’année dernière, on en parlait déjà. Ce n’était pas bien défini. Mais on sent qu’on va vers la fin de cette formation-là." 

Du côté de la fédération nationale des infirmiers de Belgique, Alda Dalla Valle, la vice-présidente, indique avoir observé une baisse des inscriptions "de plus de 20 à 30% selon les Régions et les formations", au début du mois de septembre.

Une pénurie dans plusieurs écoles?

La "pénurie" annoncée par Sabine et Corine concerne-t-elle de nombreux établissements wallons et bruxellois? Nous avons posé la question aux autorités. 

Pour devenir infirmier(ère), il existe deux types d’études: le brevet d’infirmier(ère) hospitalier(ère) (formation de niveau secondaire) et le bachelier d’infirmier(ère) responsable en soins généraux (formation de niveau supérieur).

Au niveau des écoles secondaires (qui délivrent donc des brevets pour être infirmier.ère hospitalier.ère), "il n'y a pas eu de retour en ce sens (pas de pénurie à signaler). Mais cela dépend également d’une école à l’autre. La problématique se pose donc peut-être plus au niveau des Hautes Ecoles", a répondu Jean-François Mahieu, le porte-parole de Caroline Désir, la ministre de l’Enseignement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Concernant les inscriptions dans l'enseignement supérieur, Johanne Moyart, la porte-parole de Françoise Bertieaux, la ministre de l’Enseignement supérieur, a livré les chiffres datant du 1er octobre 2023 (encore provisoires). Des données issues directement des Hautes Ecoles et qui permettent de comparer les deux dernières rentrées scolaires (voir tableau ci-dessous).

Voici la liste des 11 établissements interrogés sur le nombre d'inscrits pour l'année 2023-2024: Haute Ecole Libre Mosane (Helmo), 
Haute École de la Province de Liège (HEPL), Haute école libre de Bruxelles Ilya Prigogine (HELB), Haute Ecole Vinci, Haute École Francisco Ferrer (HEFF), Haute Ecole Provinciale de Hainaut (HEPH),  Haute École EPHEC, Haute École Robert Schuman (HERS), Haute École de Namur-Liège-Luxembourg (HENALLUX), Haute Ecole Louvain en Hainaut (HELHa), Haute Ecole de la Province de Namur (HEPN).

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Sur base des premiers chiffres disponibles, on peut constater une légère diminution du nombre d'inscriptions dans certaines Hautes Ecoles. Les autorités ne parlent donc pas de pénurie en Wallonie et à Bruxelles. 

A noter que, dans cet article, les chiffres de la promotion sociale, qui organise également une formation de bachelier en soins infirmiers, n'ont pas été évoqués.

 

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Commentaires

1 commentaire

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  • Pas étonnant, vu la façon qu'elles étaient traitées, lors de l'épidémie de Covid... Soit elles se faisaient vacciner, soit elles perdaient leurs boulots, et cela sans laisser le choix à la personne!!!

    Eddy PONDANT
     Répondre