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"J'ai coupé mes cheveux, enlevé mes bagues": la communauté LGBTQIA+ cherche des solutions face aux violences, mais sont-elles en hausse?

Les droits de la communauté LGBTQIA+ ont connu des avancées législatives ces dernières années en Belgique, mais les violences, les insultes et les agressions existent toujours. Sont-elles en hausse ? Et comment l'expliquer ?

"Deux énergumènes se sont levés, se donnant l'autorisation de nous casser la gueule", "il m'a dit : 'Je suis Jésus' et là, il me gifle dans le visage", "et les coups ont fusé et les insultes homophobes ont continué", "on a reçu des coups, personnellement, j'ai reçu une cigarette électronique sur le visage". "Il voulait vraiment me casser la gueule, il voulait me défigurer parce que j'étais gay quoi".

Tous ces témoignages sont récents. Cinq personnes, toutes agressées en raison de leur orientation sexuelle. Au début de l'année, Sacha a été interpellé en rue par un homme. "Il a dit : 'Ah, mais vous avez entendu, c'est un sale pédé, il faut qu'on l'attrape". L'homme l'a frappé au visage et l'a ensuite poursuivi. Sacha a réussi à s'enfuir, il a ensuite porté plainte.

"De la violence physique, c'était la première fois, mais bien sûr de se faire insulter dans la rue, de se faire cracher dessus, oui ça arrive souvent ça. Je n'irais pas seul dans certains quartiers, bien sûr, et si j'y vais, je sais que je vais faire attention à comment je m'habille, pour ne pas avoir l'attention sur moi".

Humiliés

Notre enquête démontre que non, il n'est pas possible de vivre librement sa sexualité en Belgique en 2025. En février dernier, Lucas se trouvait dans un bus avec une amie. Il a été agressé par deux hommes. "On a ressenti le rejet, le dégoût qu'ils avaient contre nous, et ils étaient agressifs. On a été humiliés", raconte-t-il.

L'an dernier, UNIA a ouvert 136 dossiers en lien avec l'orientation sexuelle, dont 11 devant les tribunaux, un record.

Guet-apens homophobe

Entrer dans un palais de justice, c'est une première pour Vincent. Il a été victime d'un guet-apens homophobe via une application de rencontre. "On m'a frappé, on m'a insulté, on m'a humilié, on m'a giflé. On m'a traité de pédophile avec une mise en joue au couteau pendant une heure et demie", témoigne-t-il. Les auteurs ont été retrouvés et le procès a débuté.

Après l'agression, Vincent a pris des mesures. Il se cache : "J'ai enlevé toutes mes bagues. Je trouve que c'est un signe extérieur d'homosexualité, peut-être. Je cherche à me masculiniser. J'ai coupé mes cheveux très courts. J'essaie d'être le plus neutre possible. Je me sens plus mis à l'écart, ostracisé, moins libre de ma façon de m'habiller qu'il y a 10 ans".

"Comment ça se fait qu'aujourd'hui, les droits internationaux régressent et on voit en Belgique une augmentation des discours de haine, des violences verbales ou physiques envers les personnes LGBTQIA+", se demande Xavier Wyns, coordinateur de la Rainbow House Bruxelles

Discours politiques

À l'étranger, des leaders politiques ont eu des discours à l'encontre de la communauté. "Nous allons arrêter la folie des transgenres", disait Donald Trump. "Nous ne laisserons pas les activistes LGBT côtoyer nos petits dans les écoles", prévenait de son côté Viktor Orban. Ces prises de parole ont un écho dans la population : "C'est des montées extrêmes. Quand on voit les discours de haine sur les réseaux sociaux, c'est aussi de se dire que ce sont des fibres sur lesquelles on peut vraiment s'attaquer ou taper dessus ouvertement. C'est ça qu'on doit vraiment faire attention", indique Xavier Wyns.

Spit It Out, un sex-shop dans le centre de Bruxelles est une cible régulière. Il attire le regard, mais aussi les moqueries, voire les actes de vandalisme : "J'ai eu droit à des crachats sur la vitrine, j'ai eu droit à de l'urine sur la vitrine pendant plusieurs jours d'affilée. On a eu quelqu'un qui faisait des excréments directement sur la vitrine, coulant sur la vitrine jusque sur le rebord", raconte Kriss Stephany, le gérant, qui a aussi été agressé dans un train en début d'année."Je fais encore quelques cauchemars de temps en temps. On n'est pas allé porter plainte parce qu'on s'est dit à quoi bon. Tout ce qu'on a acquis, on peut le perdre comme ça en un claquement de doigts."

Peu de plaintes

Selon une étude européenne, seulement 14% des victimes portent réellement plainte. Romain, lui, n'a pas hésité. Il a reçu des coups après un geste de tendresse envers son compagnon. Les auteurs ont été jugés, mais cette violence l'a marqué : "Ça casse un peu l'utopie dans laquelle je vivais. Je me suis toujours dit que je pense être privilégié, que j'ai de la chance de vivre dans une ville où c'est possible. Et finalement, pas tellement que ça. C'est plutôt une désillusion".

Romain vit effectivement dans un pays "privilégié". La Belgique se positionne deuxième d'un classement européen des droits LGBT. Mais ces droits sont constamment remis en question. "L'instrumentalisation des droits LGBT est quelque chose qui malheureusement a fonctionné en Pologne, en Hongrie, en Italie, aux États-Unis. Et donc, ça pourrait donner des idées malheureusement à d'autres populistes qui pourraient se dire que cette histoire fonctionne. Mais jusqu'à présent, la Belgique est relativement épargnée au niveau politique. Mais nous ne sommes pas une île", prévient Oliviero Aselio, directeur communication pour Unia.

Des menaces, des regards pesants, et une violence qui obligent toute une communauté à rester en vigilance permanente.

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