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Trois signes qu'un proche souffre peut-être de dépression: "Ça doit être un motif d'inquiétude et de mise au point"

Un proche semble changé, triste, fatigué ? Il pourrait souffrir de dépression. La psychiatre Caroline Depuydt décrypte les trois symptômes clés : aboulie, apragmatisme et anhédonie. Comment les reconnaître et, surtout, comment réagir pour l’aider ?

Un proche semble avoir changé depuis un certain temps ? Se montre-t-il triste et fatigué? Peut-être souffre-t-il d'une dépression. Pour en avoir le cœur net, certains signes sont clairs. Caroline Depuydt, invitée dans le RTL info 13h, parle de la maladie "des trois A" : "aboulie, apragmatisme et anhédonie". Qu'est-ce que ces mots signifient?

Aboulie

Ce mot signifie la perte de la volonté. "Quand on se met en route le matin, on a besoin d'une petite dose de volonté pour s'habiller, sortir de chez soi, aller faire ses courses. Quelqu'un qui est déprimé, il a perdu cette capacité de ressentir cette volonté et c'est ce qu'on appelle 'l'aboulie'", explique-t-elle.

Apragmatisme

La personne n'est pas capable de se mettre en route. "On a décidé qu'on devait aller faire ses courses et on n'arrive pas à sortir de son lit ou à sortir de chez soi", décrit la psychiatre.

Anhédonie

Il s'agit de la perte de capacité à ressentir du plaisir. "Quand on fait des activités, généralement, ça nous plaît et on peut même anticiper ça en disant 'je vais faire ça parce que ça va me plaire'. Et bien quand on est anhédonique, on n'a plus cette capacité à ressentir le plaisir des choses".

On ne comprend pas toujours bien ce que vit quelqu'un qui est déprimé

Ces symptômes permettent de comprendre si un proche est touché par la dépression. "Je trouve que c'est assez important parce qu'on ne comprend pas toujours bien, en fait, ce que vit quelqu'un qui est déprimé parce que c'est très difficile à comprendre, à partager", fait remarquer Caroline Depuydt.

"Au fond, quand on part de ces trois symptômes, on peut comprendre que quelqu'un qui a une dépression, ce n'est pas une question de manque de volonté, de paresse, de fatigue. Et donc il ne suffit pas de lui dire t'as qu'à aller dehors ou t'as qu'à faire telles activités où ça va passer parce que ces symptômes, c'est un peu comme la fièvre. Quand on est grippé, vous ne pouvez pas la contrôler. Vous avez 40 de fièvre, vous devez attendre que ça passe ou prendre des médicaments. Et bien ces symptômes, aboulie, apragmatisme et anhédonie, font réellement partie du syndrome dépressif."

On peut parler de l'intensité des symptômes et de leur durée dans le temps

Mais comment faire la différence entre une grosse fatigue ou un petit coup de mou, une baisse de moral ? "Ce n'est pas toujours évident", admet la psychiatre. "Je dirais qu'on peut parler de l'intensité des symptômes et de leur durée dans le temps", répond-elle. "En général, nous, en tant que psychiatre, on estime qu'on peut avoir un épisode dépressif si les symptômes durent tous les jours et pendant plus de deux semaines. Et puis, il y a leur intensité. Avoir un coup de mou, ça nous arrive à tous et il faut pouvoir se le permettre. Il y a des moments où on n'est pas en forme, il y a des moments où on n'a pas envie de sortir de chez soi. Mais s'il y a des répercussions dans la vie quotidienne, que c'est tellement fort qu'on n'arrive plus à aller travailler ou qu'on se sent irritable, ou qu'on ne sort plus de son lit et que l'entourage nous le fait remarquer, à ce moment-là, ça doit être un motif d'inquiétude et de mise au point".

Comment réagir?

Alors, que faire lorsqu'un proche semble touché par une dépression ? Les gestes et conseils maladroits sont courants : "Genre, mais allez, vas-y, va dehors, va faire une balade, va faire du sport, va voir des gens. C'est un peu comme si vous disiez à quelqu'un qui a la jambe dans le plâtre, vas-y, va faire un 100 mètres. Ça ne marche pas, ce n'est pas compatible. Même si sortir et aller voir des gens, c'est hyper bon et c'est effectivement antidépresseur".

La psychiatre conseille donc de "faire partager à l'autre qu'on comprend l'intensité de sa souffrance". Caroline Depuydt illustre: "Je me rends compte que ça doit être hyper difficile pour toi et que tu es dans une situation compliquée. Dire, je suis là avec toi, je reste là, je vais t'accompagner, qu'est-ce que je peux faire pour t'aider ?".

Montrer qu'on l'aide, qu'on l'accompagne, qu'il n'est pas tout seul et qu'on le comprend

La personne déprimée risque d'avoir du mal à répondre à la question, alors les propositions proactives sont souvent les bienvenues : "Viens, on va aller ensemble faire une balade. Viens, on va faire des courses ensemble. Comme ça, vous permettez en même temps de l'accompagner à quelque chose qui est utile". Ce genre de petites propositions de la vie quotidienne permet de lui montrer "qu'on l'aide, qu'on l'accompagne, qu'il n'est pas tout seul et qu'on le comprend".

Faut-il lui conseiller d'aller discuter avec un médecin ou un psychologue ? Pourquoi pas, mais sans tomber dans l'injonction. "C'est de pouvoir dire, je m'inquiète pour toi, en fait, je me fais vraiment du souci pour toi parce que j'ai l'impression que tu es dans une détresse importante. Est-ce que tu n'irais pas consulter pour faire une mise au point ? Il y a peut-être des gens qui peuvent t'aider. Est-ce que tu veux que je t'accompagne au premier rendez-vous ? Est-ce que tu veux qu'on téléphone ensemble pour prendre un rendez-vous ?". Pour la psychiatre, il est important de déculpabiliser l'autre. "C'est normal, ça arrive. Il y a quand même beaucoup de dépressions, c'est en augmentation", rappelle-t-elle.

"Nous, les médecins, les psychiatres, les psychologues, on est là pour accueillir ça sans jugement et pour pouvoir justement savoir ce qui est le mieux dans l'accompagnement, une psychothérapie, un traitement éventuellement. Et donc c'est important d'aller faire ce pas et d'aller faire cette mise au point", conclut Caroline Depuydt.

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