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Les présidents français Emmanuel Macron et brésilien Luiz Inacio Lula da Silva ont célébré mercredi le partenariat entre les deux pays en matière de sous-marins, mais leur proximité affichée connaît déjà une exception: le traité entre Union européenne et Mercosur, que Paris veut enterrer.
Au deuxième jour de sa visite d'Etat au Brésil, M. Macron a retrouvé Lula sur le chantier naval ultra-moderne d'Itaguai, près de Rio, pour la mise à l'eau du troisième d'une série de quatre sous-marins de conception française à propulsion conventionnelle.
Sous un ciel couvert, le submersible "Tonelero" a été baptisé par la Première dame brésilienne Rosangela da Silva, dite "Janja".
Les deux chefs d'Etat ont souligné le sens de ce partenariat stratégique dans un monde éprouvé par guerres et crises.
Cela "va permettre que deux pays importants, chacun dans un continent, se préparent pour que l'on puisse faire face à cette adversité, sans nous préoccuper d'un quelconque type de guerre, car nous sommes des défenseurs de la paix", a lancé Lula.
Evoquant - malgré les divergences, notamment sur l'Ukraine - "une même vision du monde", M. Macron a jugé qu'"il nous faut parfois savoir tenir le langage de la fermeté pour protéger la paix".
La cérémonie de mercredi renvoie à décembre 2008 et à la signature par le président français d'alors Nicolas Sarkozy et déjà Luiz Inacio Lula da Silva d'un vaste accord.
Outre la vente de 50 hélicoptères Caracal, il comprend un contrat de 6,7 milliards d'euros pour développer les capacités sous-marines du Brésil.
Pour ce programme baptisé Prosub, voué à la protection des 8.500 kilomètres de côtes du géant latino-américain, la Marine brésilienne a choisi de travailler avec l'industriel naval de défense français Naval Group.
- Propulsion nucléaire en débat -
En outre, l'accord doit permettre au Brésil de concevoir et construire son premier sous-marin nucléaire d'attaque, l'Alvaro Alberto. Mais le projet accumule les retards.
"Je souhaite que nous ouvrions le chapitre pour de nouveaux sous-marins, le quatrième, le cinquième", a déclaré M. Macron, rappelant toutefois qu'en matière de propulsion nucléaire il convient d'être "parfaitement respectueux de tous les engagements les plus rigoureux de non-prolifération".
"La France sera à vos côtés", a-t-il ajouté, en se gardant d'annoncer une aide à Brasilia pour développer la propulsion nucléaire.
Brasilia cherche à convaincre Paris d'accroître ses transferts de technologies pour l'aider notamment à intégrer le réacteur dans le sous-marin.
"Si le Brésil veut avoir accès aux connaissances de la technologie nucléaire, ce n'est pas pour faire la guerre" mais pour soutenir les pays "qui veulent la paix", a assuré Lula.
- "Très mauvais accord" -
Après la défense, l'économie. Quelques heures plus tard, sur l'avenir de l'accord commercial entre Union européenne et Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay, Bolivie), la dissonance a été beaucoup plus franche.
L'accord UE-Mercosur "tel qu'il est aujourd'hui négocié est un très mauvais accord, pour vous et pour nous", a affirmé M. Macron devant un parterre d'entrepreneurs brésiliens à Sao Paulo (sud-est), la capitale économique.
"Bâtissons un nouvel accord (...) qui soit responsable d'un point de vue de développement, de climat et de biodiversité", a-t-il défendu.
Le projet de traité, dont les discussions ont commencé en 1999, entend supprimer la majorité des droits de douane entre les deux zones en créant un espace de plus de 700 millions de consommateurs.
Après un accord politique en 2019, plusieurs pays dont la France ont bloqué son adoption, une opposition qui s'est renforcée avec la crise agricole qui sévit en Europe. D'autres pays européens comme l'Allemagne et l'Espagne plaident à l'inverse pour son entrée en vigueur.
Poids lourd du Mercosur, le Brésil, Lula en tête, défend sans relâche l'accord.
M. Macron a aussi vanté les opportunités d'affaires en France auprès des entreprises brésiliennes: "Nous vous aimons" et "nous avons besoin que vous nous aimiez encore davantage", a-t-il exhorté.
La France est le troisième investisseur au Brésil, avec plus de 40 milliards d'euros de stocks d'investissements directs. Mais les investissements brésiliens en France se montent à moins de deux milliards d'euros.
Pour le dernier jour de sa visite jeudi, le président français sera accueilli dans la capitale Brasilia par Lula pour des échanges dominés par les grands enjeux internationaux.