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Fin de vie: Macron veut un projet de loi pour "un modèle français"

Emmanuel Macron a annoncé lundi qu'il attendait du gouvernement un projet de loi sur la fin de vie "d'ici la fin de l'été", en recevant les conclusions de la Convention citoyenne qui s'est prononcée pour une "aide active à mourir" mais sous conditions.

Souhaitant mettre en place un "modèle français de la fin de vie", il a renvoyé au gouvernement et aux parlementaires la tâche d'en définir le contenu, mais en posant des limites.

Parmi elles, la nécessité de "garantir l'expression de la volonté libre et éclairée", de la "réitération du choix", "l'incurabilité de souffrances réfractaires, psychiques et physiques, voire l'engagement du pronostic vital".

"Vous insistez à raison pour que jamais une aide active à mourir ne devrait être réalisée pour un motif social, pour répondre à l'isolement qui parfois peut culpabiliser un malade qui se sait condamné à terme", a ajouté M. Macron, qui a également fermé la porte à toute aide à mourir pour les mineurs.

"Ces quelques lignes rouges me paraissent utilement encadrer l'hypothèse d'un modèle français de la fin de vie et constituent notre point de départ", a-t-il tranché.

Charge désormais au gouvernement, députés et sénateurs, de mener de manière "transpartisane" une "oeuvre de co-construction, sur la base de cette référence solide qui est celle de la Convention citoyenne et en lien avec toutes les parties prenantes".

- "Volonté d'apaisement" -

Plus concret, il a annoncé les "investissements qui s'imposent" pour nourrir un "plan décennal" sur les soins palliatifs, dénoncés comme insuffisants par la Convention. M. Macron a estimé que l'État avait "une obligation de résultat" pour assurer "un accès effectif aux soins d'accompagnement à la fin de vie".

C'était "une priorité absolue", se réjouit auprès de l'AFP Claire Fourcade, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs.

D'autres "restent sur leur faim", à l'instar de Jean-Luc Romero, président d'honneur de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité. "Il n'y a aucune mesure concrète. C'est le flou une fois de plus", a-t-il regretté.

La perspective du projet de loi inquiète à l'inverse Ludovine de la Rochère, présidente du syndicat de la famille (ex Manif pour tous): "le suicide est toujours une tragédie, quelles qu'en soient les modalités, très lourde à porter pour les familles".

M. Macron a rappelé avoir lui-même "une opinion personnelle qui peut évoluer", mais aussi en tant que chef de l'État "une responsabilité de concorde et une volonté d'apaisement".

Le chef de l'État avait reçu dans la matinée les 184 membres de la Convention, des citoyens tirés au sort qui ont participé pendant trois mois à d'intenses débats sur le sujet.

Il leur a rendu un hommage appuyé et a annoncé d'autres Conventions citoyennes à venir.

Dans un rapport validé dimanche, la Convention sur la fin de vie a répondu "oui" aux trois quarts à une aide "active à mourir", concrètement le suicide assisté ou l'euthanasie, en assortissant toutefois ses positions d'importantes restrictions.

La législation actuelle, fixée par la loi Claeys-Leonetti de 2016, permet aux soignants de mettre sous sédation irréversible des patients proches de la mort, dont les souffrances sont intolérables.

Mais elle ne va pas jusqu'à autoriser une assistance au suicide (le patient s'administre lui-même le produit létal) ou l'euthanasie (un soignant l'injecte).

- Discernement -

L'exécutif, qui s'était vu reprocher d'avoir largement négligé les conclusions d'une précédente Convention sur le climat, avait déjà prévenu qu'il ne reprendrait pas telles quelles celles sur la fin de vie.

Un organisme consultatif, le Comité d'éthique (CCNE), a déjà ouvert la voie en septembre à une évolution en jugeant possible - sous de nombreuses conditions - de légaliser cette aide active à mourir.

Selon la Convention, un tel acte nécessite que le patient ait auparavant bénéficié d'un accompagnement approfondi et qu'il ait pu à tout moment exprimer sa volonté.

Si la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté met d’accord la gauche et une partie du centre, elle suscite de vives réticences à droite.

Le risque est aussi de réactiver une source de tensions dans la société, déjà ébranlée par la crise des retraites.

Dans un sondage publié dimanche par le JDD, une majorité de Français (70%) se dit en faveur d'une aide active à mourir. Mais seuls 36% envisagent de recourir à l’euthanasie s’ils étaient atteints d’une maladie douloureuse et incurable.

Pour nourrir sa réflexion, la France regarde aussi la situation de pays d'Europe, où la législation autorise l'euthanasie et/ou le suicide assisté. La Belgique est, avec les Pays-Bas, l'un des deux premiers pays européens à avoir autorisé, il y a 20 ans, l'euthanasie.

En Espagne, une loi légalisant l'aide à la fin de vie, entrée en vigueur en juin 2021, permet l'euthanasie et le suicide médicalement assisté, alors qu'en Suisse il existe différentes formes d'assistance au décès.

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