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Les hommes ont un rôle majeur à jouer dans la promotion des femmes en diplomatie pour faire progresser la défense des droits des femmes partout dans le monde, estime Guila Clara Kessous, artiste de l'Unesco pour la paix qui incarne "l'entreprenariat diplomatique".
Pour l'heure, les femmes sont sous-représentées en diplomatie, en particulier dans les pays d'Afrique, souligne, dans un entretien avec l'AFP, la disciple du Prix Nobel de la paix Elie Wiesel et élève du célèbre professeur en négociation de l'Université de Harvard William Ury.
Il faut convaincre les hommes d'inclure davantage les femmes en diplomatie "en leur donnant la fierté de défendre un combat qui les concerne" aussi, dit-elle. Car la problématique des droits des femmes n'est pas seulement une affaire de femmes, c'est "une question d'humains", souligne Clara Guila Kessous, également Ambassadrice pour la paix du cercle universel des Ambassadeurs de la paix de Genève.
Le travail est pour l'heure laborieux, reconnaît-elle. Elle se montre aussi sceptique sur le choix de l'expression "diplomatie féministe".
Celle-ci recouvre la politique étrangère d'une douzaine de pays, dont l'Allemagne, le Canada, la France, le Mexique ou la Norvège, qui ciblent l'égalité entre hommes et femmes dans tous les domaines dont l'éducation, la santé et l'économie, ainsi que le combat contre les violations des droits des femmes.
Mais cette expression "pose problème", observe Clara Guila Kessous. "Féministe est un peu trop revendicateur": cela "fait penser au Mee Too" et peut laisser croire que l'on va s'opposer aux hommes, voire vouloir les évincer en diplomatie. L'adjectif "féminine" ne conviendrait pas davantage, note-t-elle, en raison de sa connotation "maternante".
Clara Guila Kessous, qui dispense par ailleurs un cours sur "Théâtre et Droits Humains" à Harvard, veut pourtant croire que les hommes finiront par ressentir de la fierté à "être aux côtés des femmes pour les aider à tout simplement réintégrer un certain statut d'égalité".
C'est la fameuse "masculinité positive", dit-elle, reprenant "la très belle expression" du docteur Denis Mukwege, prix Nobel de la paix aux côtés duquel elle apporte son aide aux femmes victimes de syndrome post-traumatique, à la suite d'un viol.
- Accords d'Abraham, version femmes -
Sur le plan diplomatique, Clara Guila Kessous est à l'origine d'une initiative originale: les "Accords de Sarah et Hajar", le pendant féminin des Accords d'Abraham qui avaient été signés en 2020.
Trois pays arabes --Emirats arabes unis, Bahreïn et Maroc -- avaient alors accepté de normaliser leurs relations diplomatiques avec Israël avant d'être rejoints en 2021 par le Soudan.
Frappée par l'absence de femmes lors de la signature de ces traités, l'artiste de l'Unesco a décidé d'aller aux devants des gouvernements du Maroc, du Barhein, des Emirats Arabes Unis et d'Israël pour leur demander de proposer une femme politique pour signer "les Accords de Sarah et Hajar", référence aux deux femmes d'Abraham.
"J'ai eu la chance d'avoir quatre femmes remarquables" qui y ont apposé leur signature le 27 avril, se félicite-t-elle.
Il s'agit de Nancy Khedoury, vice-présidente de la Commission des affaires étrangères, de la défense et de la sécurité nationale et de la Commission des droits de l'homme de Barheïn; Maria Belafia, présidente de la Commission économique de la région de Rabat au Maroc, Ruth Wasserman Lande, ancienne membre de la Knesset (Parlement) en Israël, ainsi que Afra Mahest Al Hameli, directrice du Département des communications stratégiques au ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale des Emirats Arabes Unis.
"Nous sommes en train de travailler à un plan d'actions" avec l'objectif de renforcer l'autonomie des femmes dans la diplomatie et d'aborder les questions relatives aux droits des femmes au Moyen-Orient.
Elle ne compte pas s'arrêter là puisqu'elle a entrepris une démarche similaire avec les pays d'Afrique.