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Retraites: Borne temporise sur les 65 ans sans convaincre les syndicats

Elisabeth Borne a temporisé à nouveau mardi sur le report de l'âge de départ à la retraite à 65 ans, dont elle ne veut pas faire "un totem", sans convaincre les syndicats, y compris la réformiste CFDT, toujours déterminés à se mobiliser après leurs derniers entretiens à Matignon.

A une semaine de la présentation du projet de réforme, mardi prochain lors d'une conférence de presse, la Première ministre a joué la carte de l'ouverture.

"On a porté les 65 ans" mais "ce n'est pas un totem", a-t-elle déclaré sur franceinfo, ajoutant étudier "d'autres solutions qui permettent d'atteindre (...) l'équilibre du système de retraite à l'horizon 2030".

En tout cas, "la CFDT se mobilisera" en cas de relèvement à 64 ou 65 ans de l'âge légal de départ, a prévenu le secrétaire général du premier syndicat français, Laurent Berger, à sa sortie de Matignon.

"S'il y a recul de l'âge de départ, il y a mobilisation" et elle sera "importante", a renchéri le patron de FO Frédéric Souillot, déterminé à "faire reculer le gouvernement". François Hommeril, président de la CFE-CGC, s'est également dit prêt à contrer "une mesure extrêmement injuste (...) de décalage" de l'âge de départ.

En plein milieu de ces concertations, la cheffe du gouvernement s'est rendue à l'Elysée pour probablement faire un point sur le sujet avec Emmanuel Macron, d'après son agenda publié par Matignon.

Le report de la présentation du texte du 15 décembre au 10 janvier a permis à Elisabeth Borne d'entendre à nouveau, avant Noël, les groupes politiques puis, cette semaine, les partenaires sociaux, avant le passage en Conseil des ministres le 23 janvier.

L'ensemble des syndicats et l'essentiel des oppositions contestent le projet de l'exécutif de reporter progressivement l'âge de départ de 62 à 65 ans, ou à 64 ans avec un allongement de la durée de cotisation.

- Réforme "injuste" -

Cette réforme ne rendra pas "le système plus juste" mais "plus injuste", dénonce Laurent Berger, qui plaide pour un relèvement de dix points du taux d'emploi des seniors pour combler le déficit. Pour lui, "ce gouvernement s'apprête à prendre les mesures les plus dures de ces trente dernières années dans une réforme des retraites".

Une majorité de Français s'oppose aussi à ce projet, dans le contexte inflammable d'un pouvoir d'achat rogné par l'inflation.

Mais Emmanuel Macron reste déterminé: la réforme sera appliquée "dès la fin de l'été", a-t-il martelé samedi lors de ses vœux aux Français.

Le texte, qui concernera les Français nés à partir du second semestre 1961, tiendra compte "des carrières longues, des carrières hachées, de la difficulté de certaines tâches", il permettra "d'équilibrer le financement" du système et "d'améliorer la retraite minimale", a-t-il fait valoir.

L'exécutif espère, grâce aux mesures sur la pénibilité ou les seniors, une "absence d'opposition frontale" de la CFDT, souligne un conseiller.

Une réforme impossible? "Les Anglais ont l'Irlande, les Américains les armes. Nous, on a les retraites", glissait récemment à l'AFP, fataliste, Edouard Philippe. L'ancien Premier ministre a lui-même essuyé des manifestations contre son projet à points, finalement abandonné pour cause de Covid.

- Rallier LR -

A défaut de convaincre la CFDT, Elisabeth Borne espère rallier Les Républicains, favorables à un report de l'âge. Elle doit à cet effet échanger par téléphone avec leur président Eric Ciotti, ainsi qu'avec les chefs de groupes à l'Assemblée Olivier Marleix et au Sénat Bruno Retailleau.

Sans LR, le gouvernement, qui ne dispose que d'une majorité relative, serait obligé d'utiliser l'article 49.3 de la Constitution, qui permet l'adoption d'un texte sans vote.

Pour la première fois depuis 12 ans et la réforme Woerth (qui avait relevé l'âge légal de 60 à 62 ans) tous les syndicats sont prêts à se mobiliser.

Désireuse de les amadouer, Mme Borne a annoncé le retrait d'une partie controversée du décret sur l'assurance chômage, annoncée le 23 décembre et qui avait provoqué leur colère. Ce recul "est l'illustration que c'était du bricolage", a jugé Laurent Berger.

"Enfumage", "mascarade", la gauche a vivement réagi aux propos de la Première ministre.

"65 ou 64 ans: décaler l'âge de départ à la retraite, c'est non. Ce n'est pas une question de +totem+, c'est une question de justice sociale", a tweeté le chef des députés PS Boris Vallaud.

Elle "croit tellement au travail parlementaire qu’elle a déjà dix 49.3 à son actif. Quelle mascarade !", a ironisé Manuel Bompard, coordinateur de LFI, qui prévoit déjà de manifester le 21 janvier.

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