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Porche de l'hôtel de ville de Bordeaux incendié, canon à eau et centre-ville noyé sous la lacrymogène à Rennes, dégradations et affrontements dans les rues de Paris: les manifestations contre la réforme des retraites ont connu un regain de tensions dans plusieurs villes.
Sporadiques depuis le début de la mobilisation syndicale le 19 janvier, les violences ont ressurgi parfois spectaculairement jeudi au fil de plusieurs cortèges, monopolisant à nouveau l'antenne des chaînes d'information continue et rappelant les souvenirs des "gilets jaunes" en 2018-2019 ou de la loi Travail en 2016.
Paris, où la préfecture de police a dénombré en début d'après-midi "environ un millier" d'éléments radicaux, Rennes, Nantes, Lorient ou encore Toulouse... Cette 9e journée de mobilisation intersyndicale a dessiné une carte de France des tensions où ne figure pas le pourtour méditerranéen et notamment Marseille.
A Montpellier aussi, le cortège s'est déroulé "globalement bien", a assuré le préfet de l'Hérault, Hugues Moutouh.
Plus au nord et à l'ouest, ce fut beaucoup moins vrai. Le porche de l'hôtel de ville de Bordeaux, où doit être reçu le roi Charles III mardi, a été brièvement incendié dans la soirée.
A Paris, des violences ont éclaté en tête de la manifestation avec son lot de vitrines brisées et de mobilier urbain détruit, et des incidents se sont poursuivis en soirée dans le sillage de cortèges dits "sauvages". A rebours d'un défilé où la grande majorité des manifestants a marché pacifiquement.
Peu avant 22h00, le ministre de l'Intérieur a fait état de 172 interpellations en France, et de 149 blessés dans les rangs des forces de l'ordre.
Gérald Darmanin, qui s'exprimait depuis la préfecture de police de Paris, a dénoncé la violence de "casseurs souvent venus de l'extrême gauche". La Première ministre Elisabeth Borne a jugé dans un tweet "inacceptables" les "violences et dégradations" de la journée.
Dans la capitale, où la préfecture de police a fait état de 103 interpellations à 22h15, au moins un manifestant blessé a été pris en charge par les pompiers, a constaté une journaliste de l'AFP.
- "Scènes de chaos" à Rennes -
Dans l'ouest de la France, les violences et affrontements entre forces de l'ordre et manifestants sont manifestement montés en gamme par rapport aux précédentes mobilisations.
A Rouen, une manifestante d’une trentaine d’années, qui travaille avec des enfants handicapés, a eu un pouce arraché, selon la députée LFI Alma Dufour.
A Nantes, des manifestants se sont introduits dans le tribunal administratif, saccageant l'accueil et brisant vitres et portes. Plusieurs commerces ont été dégradés.
A Lorient (Morbihan), le commissariat de la ville et les forces de l'ordre a été pris pour cibles par des manifestants, en grande partie des jeunes au visage dissimulé. Des vitres du bâtiment, voisin de la sous-préfecture, ont été cassées par des jets de projectiles et des feux allumés contre le portail.
A Rennes, au lendemain d'une journée de heurts entre marins-pêcheurs et forces de l'ordre, des tirs de grenades lacrymogènes ont répondu aux jets de projectiles et feux de poubelles, plongeant le cortège de l'intersyndicale, pris en étau, dans un épais nuage de fumée âcre. La maire Nathalie Appéré s'est émue de "scènes de chaos".
Les forces de l'ordre ont fait usage du canon à eau à Toulouse et Lille, où le chef de la sécurité publique du Nord a été touché par un pavé à la tête.
"C'est plus tendu depuis les manifestations sauvages, depuis vendredi. Avant ça va, le cortège passait, c'était calme. Mais là depuis quelques jours, il y a des poubelles qui brûlent, des gaz lacrymogène, c'est plus tendu oui. Là les manifestants sont sur les dents, les policiers aussi, et ils sont plus nombreux aussi", témoigne un commerçant à Strasbourg qui a préféré garder l'anonymat.
Des villes moyennes ont également connu des tensions entre forces de l'ordre et manifestants, comme à Bayonne. A Tulle, la police a dispersé des manifestants, dont des lycéens, en utilisant des gaz lacrymogènes.