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Le gouvernement a assuré dimanche qu'il ne voulait pas utiliser l'article 49.3 de la Constitution, c'est-à-dire une adoption sans vote, pour faire approuver par l'Assemblée nationale sa réforme très contestée des retraites, et se trouve engagé dans une chasse aux voix des députés qui devraient se prononcer jeudi.
"Nous ne voulons pas du 49.3. Nous voulons transformer notre majorité relative en une majorité absolue", a affirmé dimanche le porte-parole du gouvernement Olivier Véran, à l'issue d'une réunion à Matignon avec la cheffe du gouvernement Elisabeth Borne et plusieurs ministres, dont Bruno Le Maire (Economie), Olivier Dussopt (Travail) et Gabriel Attal (Comptes publics).
"Nous souhaitons qu'il puisse y avoir un vote positif pour ce texte", a-t-il ajouté.
Mais "nous ne renoncerons pas à notre réforme", a-t-il précisé, laissant entendre que l'usage du 49.3 n'était pas totalement exclu.
Ce "n’est pas notre piste aujourd’hui" même si cet article figure "par définition dans la Constitution", a affirmé sur France 2 Gabriel Attal.
Même s'il n'utilise pas cet outil constitutionnel, le gouvernement pourrait par précaution, dans un Conseil des ministres ordinaire ou extraordinaire, prendre cette semaine les dispositions légales permettant d'y avoir éventuellement recours, selon une source gouvernementale.
- "Député par député" -
La Première ministre est montée en première ligne dès que le vote du Sénat, dominé par la droite, a été acquis, tard samedi soir, par 195 voix contre 112. Elle a promis de mettre désormais toute son "énergie" pour "que ce texte soit voté".
Le président Emmanuel Macron, pour qui cette réforme repoussant l'âge de départ en retraite à 64 ans est politiquement capitale, est en revanche resté dimanche sur sa réserve et n'a pas commenté l'adoption du texte au Sénat.
"Il existe une majorité au Parlement" pour voter la réforme, veut croire Elisabeth Borne, à l'orée d'un scrutin autrement plus serré qui s'annonce à l'Assemblée.
Le gouvernement a sorti sa calculette et espère obtenir suffisamment de voix du parti Les Républicains, pourtant divisé, afin d'éviter l'utilisation d'un outil perçu comme autoritaire.
Olivier Dussopt et Gabriel Attal se sont dits, de concert dimanche soir, "convaincus d'avoir une majorité".
"Nous construisons cette majorité, député par député", a ajouté M. Dussopt sur BFMTV, tandis que Gabriel Attal faisait valoir que "chaque voix en moins pour la réforme" serait "une voix pour plus d'impôts".
- "Vice démocratique" -
Après trois jours de répit, les débats parlementaires reprendront mercredi, avec la convocation d'une commission mixte paritaire (CMP) en parallèle d'une huitième journée de manifestations contre la réforme.
Dans cette réunion, sept députés et sept sénateurs chercheront à s'accorder sur un texte de compromis. Le gouvernement n'y est pas présent, mais il peut tirer les ficelles.
Si un accord est trouvé, le texte ira jeudi de nouveau au Sénat pour une dernière validation puis, vraisemblablement dans un immense suspense, à l'Assemblée nationale.
Selon une source au sein de l'exécutif, Matignon devrait réunir lundi les parlementaires de la majorité concernés pour préparer le conclave, où les macronistes et la droite sont majoritaires.
Dire qu'il existe une majorité au Parlement, c'est "la méthode Coué", a estimé le chef de file des sénateurs socialistes Patrick Kanner sur RMC.
Il a souligné que 50 voix avaient manqué à la droite et au groupe centriste au Sénat pour voter la réforme, "une alerte non négligeable", selon lui.
Compte tenu du niveau "inédit" des manifestations contre la réforme, utiliser le 49.3 "serait une forme de vice démocratique", a prévenu le patron de la CFDT Laurent Berger.
Le leader syndical met surtout en garde contre le "ressentiment très profond" que l'adoption de la réforme pourrait susciter dans le monde du travail, jugeant que le refus par Emmanuel Macron de recevoir l'intersyndicale ressemble à un "incroyable bras d'honneur à la démocratie sociale".
- "Peu de marges" -
La mise au point dimanche du gouvernement fait aussi écho aux prises de position de plusieurs leaders de la majorité.
Les arguments contre sont "très forts", a jugé au Grand Jury RTL/Le Figaro/LCI le patron du MoDem François Bayrou, même s'"il y a peu de marges" pour réunir une majorité de députés.
Le patron du parti présidentiel Renaissance, Stéphane Séjourné, n'est pas non plus favorable au 49.3 et a estimé dans le JDD que la réforme "peut et doit avoir une majorité", appelant "en responsabilité" les Républicains à la voter.
Mais "si, au bout du compte, il y a un souci" le gouvernement "devra l'utiliser", a conseillé le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau au Grand rendez-vous Europe 1/Les Echos/CNews.
L'exécutif met tous ses espoirs dans Les Républicains, pourtant particulièrement divisés à l'Assemblée, où les frondeurs, parmi lesquels le député Aurélien Pradié, jouent les trouble-fête.
Maintenant "il faut que les LR du Sénat se mettent d’accord avec les LR de l’Assemblée", résume une source gouvernementale.