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L'ancien patron de Wirecard, Markus Braun, a nié lundi lors de son procès pénal toutes les accusations de fraude portées à son encontre dans le vaste scandale financier qui a mené la société allemande à la faillite.
"Je rejette toutes les accusations" contre moi, a déclaré Markus Braun au début d'une déposition fleuve démarrée peu de temps après 08H00 GMT et qui va se poursuivre dans l'après-midi devant un tribunal à Munich.
Vêtu d'un pull à col roulé sous un costume bleu sombre, comme à son habitude, l'homme au visage émacié est apparu déterminé, lâchant quelques sourires.
Assis, les mains jointes et le corps penché vers un micro de table, il retrace de manière chronologique sa version de l'histoire de la fintech déchue à partir de "souvenirs précis", parfois interrompu par des questions du juge.
L'homme de 53 ans, qui encourt de nombreuses années de prison, a affirmé d'emblée n'avoir eu "aucune connaissance de malversations" au sein de l'entreprise qu'il dirigeait depuis 2002.
Il a ressenti "un choc pour les actionnaires et surtout pour les salariés" lors de la publication le 18 juin 2020 d'un communiqué qui a révélé un gigantesque scandale.
Wirecard a coulé en Bourse en juin 2020, après que ses dirigeants ont avoué que 1,9 milliard d'euros d'actifs, supposés se trouver sur des comptes en Asie, soit un quart du bilan comptable, n'existaient pas en réalité.
Jusqu'alors, cette société offrant des services de paiements en ligne était l'une des stars du Dax, le principal indice de la Bourse allemande, où elle valait plus que Deutsche Bank.
Acteur central de la fraude présumée, l'Autrichien Jan Marsalek, ancien bras droit de M. Braun, chargé du développement des affaires en Asie, est en cavale depuis juin 2020.
- "Système de fraude organisée" -
M. Braun a passé de longues années d'une relation "très étroite" avec M. Marsalek, le jeune manager, autrichien comme lui. Son entrée dans l'entreprise constituait alors "une chance", selon le sentiment de M. Braun.
"Cela sonne étrange aujourd'hui mais il avait une énergie incroyable" pour soutenir la forte croissance de l'entreprise, a soutenu l'ex-patron.
Les choses se gâtent quand éclatent des soupçons de fraude sur des comptes avec des tiers en Asie entre 2016 et 2018, tel que détaillé courant 2019 dans le Financial Times.
M. Braun se souvient d'avoir voulu "mettre un couvercle sur le sujet" que les auditeurs légaux d'EY n'avaient pas mis en avant.
Une expertise indépendante sera confiée à KPMG, M. Braun se souvenant que M. Marsalek était au départ opposé à l'idée.
Le cabinet KPMG se dira au final incapable de valider certaines activités de paiement réalisées par des sociétés tierces au nom de Wirecard, provoquant l'éclatement du scandale.
L'ancien PDG de la fintech, incarcéré depuis juin 2020, renvoie les torts sur deux anciens compagnons de route : Stephan von Erffa, ancien chef comptable, qui se serait vu directeur financier mais "qui n'avait pas l'étoffe pour", selon M. Braun, et Oliver Bellenhaus, ancien directeur d'une filiale basée à Dubaï, également jugés à Munich.
M. Braun avait mis en place "un système de fraude organisée" et "toute l'affaire était une escroquerie dès le départ", a assuré lors d'une précédente audience M. Bellenhaus, l'un des principaux témoins de l'accusation.
Le tribunal a prévu en tout 100 jours d'audience jusqu'en 2024 pour tenter de faire la lumière sur ce scandale financier sans précédent en Allemagne, qui a éclaboussé le monde économique et politique.