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Tour de France: dans un paysage urbain encombré, les sprints de tous les dangers

La première occasion offerte aux sprinteurs dans le Tour de France lundi à Bayonne sonne aussi l'heure de tous les dangers avec ces arrivées à toute blinde dans un paysage urbain de plus en plus encombré, dont un nouvel obstacle surprenant: les pistes cyclables.

"Ça devient de plus en plus difficile d'organiser des arrivées en centre-ville", constate Thierry Gouvenou, responsable du parcours de la Grande Boucle qui est, tous les ans, devant "un casse-tête" pour dessiner les fins d'étape.

Les dénouements au cœur des villes et villages font partie de l'ADN des courses cyclistes. Mais à terme, on va finir par tracer la ligne d'arrivée sur "des parkings de supermarché", s'inquiète Stephen Delcourt, manager de l'équipe féminine FDJ-Suez et président de l'UNIO qui œuvre pour la sécurité dans le cyclisme féminin.

En cause: les ronds-points, terre-plein centraux, chicanes, ralentisseurs ou autres îlots directionnels qui poussent comme des champignons pour limiter voire dissuader la circulation automobile.

"Dans des pays comme la France, la route n'est pas faite pour aller vite, mais pour ralentir", résume l'ancien champion du monde belge Philippe Gilbert.

"Au quotidien c'est très bien mais ça ne correspond pas aux courses cyclistes", embraye Christian Prudhomme. Selon le patron de la Grande Boucle, "les aménagements routiers doublent tous les six ou sept ans sur la route du Tour."

- "Pot de fleur" -

"Nos élus ont besoin de marquer leur territoire et de montrer qu'ils font des choses. Après chaque élection, il y a un nouveau pot de fleur sur la route", grince Philippe Mauduit, directeur sportif de l'équipe Groupama-FDJ.

Et pour boucher un peu plus l'horizon, un obstacle assez cocasse s'invite de plus en plus dans le tableau: les pistes cyclables qui, en coupant la route en deux, font le bonheur des +vélo-taffeurs+ mais deviennent parfois le pire ennemi des cyclistes professionnels.

"Elles se sont beaucoup développées depuis le Covid et c'est tant mieux. Mais pour nous, c'est une contrainte supplémentaire", souligne Thierry Gouvenou.

A Paris, où le Tour de France se termine traditionnellement par un sprint de prestige sur les Champs-Elysées, la rue de Rivoli donne ainsi des sueurs froides aux organisateurs.

Cette omniprésence du mobilier urbain augmente mécaniquement le risque de chutes. Surtout en cas d'une arrivée au sprint où les coureurs déboulent à 70 voire 80 km/h.

C'est encore plus vrai dans le Tour de France, la course la plus importante de l'année, où une victoire d'étape permet à elle seule parfois de sauver la saison d'un coureur et de son équipe, une perspective qui rend nerveux tout le peloton.

Le comportement des coureurs est aussi pointé du doigt, ainsi que le matériel devenu plus performant, dans un sport considéré comme de plus en plus dangereux, comme l'a montré récemment la mort tragique de Gino Mäder dans une descente de col du Tour de Suisse.

- "Débrancher le cerveau" -

"Dans un sprint massif, même si ça peut avoir des conséquences dramatiques, il faut débrancher le cerveau et à être prêt à prendre des risques. Sinon tu n'existes pas", rapporte le coureur de la Cofidis, Axel Zingle.

Pour limiter l'impact des aménagements urbains, les organisateurs du Tour travaillent avec les collectivités locales pour en enlever au maximum, le temps du passage de la course, voire d'engager des travaux parfois lourds.

Le final de l'étape de lundi dans Bayonne a ainsi encore été modifié "suite à la construction de nouveaux aménagements urbains (ronds-points, ilots, ralentisseurs)" à partir du km 162,4, ont annoncé samedi soir les organisateurs.

"Mais on ne peut pas tout raser non plus", note-t-on chez ASO.

Tracer la ligne en rase campagne ou dans une zone industrielle ne fait rêver personne. Et les arrivées comme celle de mardi sur le circuit automobile de Nogaro, dans le Gers, ne sont pas dupliquables à l'infini.

Adam Hansen, le président du syndicat de coureurs CPA, a proposé de geler les temps à 5 km de l'arrivée au lieu de 3 actuellement sur les étapes de plaine, ce qui permettrait aux leaders et leurs équipiers de se relever plus tôt, limitant ainsi le nombre de coureurs se disputant la victoire finale. "Ça peut être une solution", estime Philippe Mauduit.

En attendant, le peloton continue à serrer les fesses.

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