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"Il y a davantage d'ouverture d'esprit autour de cette culture": actif depuis 20 ans, Fifou, photographe-star du rap en France avec près de 1.000 pochettes de disques, voit le regard changer sur le hip-hop.
Le quadragénaire joue son propre rôle dans la série à succès "Validé", sur le rap.
Dans la saison 2, il suggère à une jeune rappeuse de poser avec des loups. Rien d'une composition: il a fait poser PLK avec un ours, a photographié un tigre pour Lacrim et Niska a eu droit à un aigle royal, épisode "le plus flippant" quand l'AFP sonde Fifou sur ces shootings particuliers.
"On a une image figée en tête au départ, mais l'aigle royal fait 1,50 m de haut, s'est approché de nous en déployant ses ailes, haletant et bavant comme un chien", déroule-t-il.
Au delà de l'anecdote, cette mise en scène est révélatrice de la nature de son travail. Le costume de directeur artistique n'est pas loin. Il définit en amont avec les artistes et leurs équipes une charte visuelle. Qui peut être ensuite déclinée sur deux ans d'exploitation, entre album, tournée, réédition et bannières pour les plateformes musicales. Comme il peut le faire, par exemple, pour Aya Nakamura.
Dans le grand public, ceux qui ont suivi jeudi la cérémonie des Flammes, dédiées au rap et ses courants, l'ont sans doute découvert. Fifou est venu remettre un prix, avec son éternel chapeau à la Gene Hackman dans le film "French Connection".
- "Viens tout seul" -
Ce nouveau rendez-vous, soutenu par Spotify, première plateforme musicale dans le monde, au cœur de Paris dans le prestigieux Théâtre du Châtelet, est un premier pas important pour décoller la mauvaise réputation qui colle encore trop souvent aux artistes rap/r'n'b'/nouvelle pop.
Quand il a commencé à photographier rappeurs et rappeuses, c'était pire. "On me disait, +si tu viens à notre soirée, viens tout seul+, sous-entendu sans mes amis rappeurs", se souvient-il. "Ou encore, +ah, donc si on t'avait connu à l'école, tu nous aurais racketté+".
Il a parfois vu défiler devant son objectif "des personnes, comment dire, avec une grosse personnalité" (rires), mais lui n'a rien d'un bad boy.
Fabrice Fournier, pour l'état civil, a grandi dans un coin sans histoire de Chelles, en région parisienne, entre une mère secrétaire et un père instituteur/directeur d'école primaire, chanteur lyrique à ses heures.
Fifou est même passé par le conservatoire avant d'opter pour le graphisme, travaillant d'abord comme maquettiste ou illustrateur pour des magazines spécialisés dans le rap. On lui demande aussi de prendre des photos de presse ou d'en retoucher d'autres.
La première commande de pochette arrive au milieu des années 2000. Pour un single de Kool Shen, moitié de NTM. Fifou raconte que le seul cliché qui n'était "pas flou" a donné le résultat final, "assez classique". L'artiste, assis, fait un doigt d'honneur à l'objectif.
- "Assez dingue" -
"C'était assez dingue, c'était la première fois pour moi avec des assistants sur un plateau, dans un studio photo renommé, avec un gros staff et une star qui voient débarquer un petit mec de 20 ans". "Je leur ai dit tout de suite, +les gars, je n'y connais rien à la photo+. Si ça se passe aujourd'hui, je saute".
C'est sa validation. "+T'as fait Kool Shen ?+ Tout le monde m'a appelé, alors que j'étais le vilain petit canard qui venait du graphisme".
Aujourd'hui, il a son studio photo avec assistants et régisseur. Les disques d'or et de platine tapissent les murs de son bureau.
Récemment, Prince Waly lui a confié la pochette de "Moussa". On y voit un crash de voiture avec air-bag déclenché, métaphore de l'accident de la vie que raconte en chanson l'artiste, qui a été soigné une tumeur.
Fifou, lui, réfléchit aux coups de volant qu'il pourrait donner à l'avenir, entre activité actuelle, photo d'art ou documentaire.