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Choisie ou subie, la sobriété énergétique s'est imposée cet hiver dans le quotidien de tous les Européens. En France, l'effort pour réduire la consommation de gaz et d'électricité s'est situé dans la moyenne, mais le plus dur reste à faire.
Gaz, fioul domestique, électricité: toutes les consommations ont baissé en France. La météo, anormalement douce, a bien sûr aidé, permettant notamment d'allumer les chauffages plus tard que d'habitude dans l'année, au lieu de fin octobre-début novembre, mais ça n'explique pas tout.
L'envolée des prix, le plan sobriété du gouvernement et l'appel de l'Union européenne à réduire la consommation de gaz de 15%, tout a concouru aux économies d'énergie, au prix parfois de la fermeture de certains équipements publics comme des piscines municipales ou bâtiments universitaires, etc.
"La baisse a été inédite et réelle, et dans tous les secteurs", observe Samuel Martin, expert de négaWatt, une association qui milite pour les économies d'énergie et qui avait publié un scénario de sobriété en 50 mesures dès septembre 2022.
"Mais on aurait pu faire plus, on est assis sur une montagne de gaspillage énergétique", dit-il.
- Multiples économies potentielles -
A Vannes, Marie Lécuyer, directrice de quatre Ehpad, est perplexe. Elle a déjà baissé le chauffage d'un degré pour ses 320 résidents. Moyenne d'âge: 88 ans. Personne ne s'est plaint, précise-t-elle à l'AFP mais "tout ce qui pouvait être fait sans engager de gros travaux, l'a été!".
Il a ainsi été demandé au personnel d'éteindre systématiquement les lumières. Fini aussi les téléviseurs tournant en boucle! Et de petits travaux électriques ont été réalisés, comme pour équiper de programmateurs des appareils que personne ne pensait à éteindre, ou poser des interrupteurs avec détecteurs de présence dans des pièces ou des couloirs avec peu de passage.
"Aujourd'hui, on peut difficilement aller plus loin. Le coût des travaux a explosé, nos finances se dégradent. On est en difficulté de trésorerie et pour le chauffage, on se refuse à aller en dessous de 20 degrés", dit-elle.
Volontariste, Samuel Martin de négaWatt estime, lui, qu'on "peut faire beaucoup plus, dès maintenant". Il estime le potentiel d'économies cumulées de gaz et d'électricité à environ 30% à l'horizon 2 ans et appelle à ne pas se focaliser uniquement sur le chauffage.
Il cite d'autres possibilités d'économie: la ventilation des bureaux qui devient "inutile" quand un immeuble est vide, l'eau chaude dont le débit peut être réduit au robinet avec "le même confort", ou, la température des ballons et les pompes des chaudières collectives qui peut être réglée.
- Gaz: la France seulement 14e -
"Pour aller plus loin, ce ne sont pas de nouvelles mesures qu'il faut annoncer mais travailler sur l’orchestration et les conditions de mise en œuvre", insiste Samuel Martin, alors que le ministère de la Transition énergétique multiplie ces jours-ci les réunions, secteur par secteur.
Chez RTE, l'entreprise gestionnaire du réseau d'électricité haute tension, on désigne aussi les bureaux, commerces et autres bâtiments tertiaires comme un gros poste de consommation électrique où l'on pourrait aisément économiser.
Seuls 6% des bâtiments tertiaires (bureaux ou commerces) de plus de 1.000 m2 en France sont dotés d'outils de pilotage fonctionnels et récents pour la ventilation, le chauffage ou l'éclairage. Du côté des logements privés, 12% utilisaient des solutions de pilotage ou de programmation en 2018.
Un jour d'hiver, ces bâtiments représentent pourtant "plus de 70%" de la consommation électrique française, selon RTE.
Au total, la France a terminé l'hiver sur une baisse de consommation d'électricité de 9% entre octobre et février, selon des données RTE corrigées des effets de la météo. "Ca se stabilise" et cela a permis en partie de passer l'hiver sans coupure de courant, a précisé RTE.
Le secteur pétrolier enregistre quant à lui depuis octobre le cinquième mois consécutif de "forte chute des livraisons brutes mensuelle" de fioul domestique.
Pour le gaz, la consommation dans l'Union européenne a diminué de 19,3% entre août et janvier, par rapport à la consommation moyenne de la période 2017-2022, selon Eurostat. La France s'est placée seulement en 14e position de cet effort. Les Finlandais et les pays baltes ont fait beaucoup mieux.