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La suppression de toute forme de publicité après 20h sur France Télévisions "n'est pas une bonne solution", a réagi le groupe public mercredi auprès de l'AFP, après la publication d'un rapport parlementaire qui fait cette proposition.
Selon France Télévisions, cette mesure ne profiterait pas aux chaînes privées, qui la réclament, mais plutôt "aux plateformes américaines" comme Netflix ou YouTube.
Depuis 2009, la publicité est interdite sur France Télévisions entre 20 heures et 6 heures. Mais les annonceurs peuvent toujours parrainer des émissions: c'est cette possibilité que le rapport des députés Jean-Jacques Gaultier (LR) et Quentin Bataillon (Renaissance) propose de supprimer, de même que la pub sur la plateforme numérique de France Télévisions.
Selon les députés, le parrainage et la publicité numérique de 20 heures à 6 heures représentent "près d'un tiers" des recettes publicitaires de France Télévisions (392,8 millions d'euros au total).
Leur suppression devrait selon eux être compensée par l'Etat, via une part de la taxe sur les services numériques qui frappe les géants du streaming.
Les sommes visées correspondent à "0,8% du marché publicitaire total" français, soit "une goutte d'eau", a déclaré la direction de France Télévisions à l'AFP, en assurant qu'une suppression aurait un impact "quasi nul" sur les recettes des chaînes privées.
Le report se ferait au bénéfice "des plateformes américaines et des réseaux sociaux chinois" comme TikTok, a fait valoir la direction du groupe public.
Pour les auteurs du rapport, cette mesure serait un gage de "différenciation" entre chaînes publiques et privées, a argumenté M. Gaultier lors de la conférence de presse de présentation du texte.
"L'esprit de la loi de 2009 a été contourné" par les parrainages, a-t-il estimé. "Les Français ont été un peu trompés", a renchéri M. Bataillon.
"Mais il ne doit pas y avoir suppression s'il n'y a pas compensation", a insisté M. Gaultier.
Pourquoi ne pas pousser la logique et supprimer entièrement la pub sur le service public, à toute heure ? En termes budgétaires, "la marche est un peu haute", a concédé M. Gaultier.
Le sujet est sensible pour France Télévisions, récemment accusé de concurrence déloyale par l'Association des chaînes privées (ACP), qui réunit TF1, M6, Canal+ et Altice (BFM, RMC).
Au-delà de la question de la publicité, la direction de France Télévisions voit "beaucoup d'éléments positifs dans ce rapport".
Elle juge crucial que le texte préconise de lever les contraintes budgétaires qui pèsent sur l'audiovisuel public depuis 2018.
Autre point positif selon France Télévisions: le souhait du rapport de pérenniser le mécanisme actuel de financement du service public, via une fraction de la TVA.
Ce mécanisme transitoire est en place depuis la suppression de la redevance l'an passé mais doit prendre fin début 2025. L'ensemble de l'audiovisuel public le juge préférable à un financement directement via le budget de l'Etat, pour éviter les baisses de dotation intempestives et les critiques sur le manque d'indépendance.
Cela nécessite toutefois de modifier la loi organique relative aux lois de finances (Lolf, la "constitution financière" de la France), a souligné Jean-Jacques Gaultier, en précisant avoir déposé mercredi une proposition de loi organique en ce sens.
Enfin, France Télévisions a réaffirmé son scepticisme envers la création d'une holding qui chapeauterait tout l'audiovisuel public, hypothèse avancée par le rapport.