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La rédaction du JDD a reconduit vendredi sa grève contre l'arrivée à sa tête de Geoffroy Lejeune, ce qui devrait empêcher le prochain numéro d'être publié dimanche.
Plus d'une vingtaine de journalistes de l'hebdomadaire se sont réunis dans la matinée à proximité du ministère de la Culture, où une délégation a ensuite été reçue par le cabinet de Rima Abdul Malak.
Dans une déclaration lue publiquement, ils ont appelé la ministre à aller "au-delà des clivages partisans qui n'ont rien à voir avec la liberté de la presse".
Ils l'invitent ainsi à soutenir les récentes initiatives parlementaires visant à protéger l'indépendance des rédactions, pour qu'elles soient mises à l'ordre du jour "le plus vite possible" ou servent de "base de travail pour un projet de loi du gouvernement, voire un décret".
Les grévistes ont en outre appelé à ce que les Etats généraux de l'information annoncés pour septembre par l'Elysée "ne soient pas une coquille vide".
"On souhaite que notre combat ne soit pas vain", a résumé auprès de l'AFP la journaliste du JDD Emmanuelle Souffi.
La rédaction du Journal du dimanche --qui reste sur cinq week-ends d'affilée sans parution-- entame son 36e jour de grève, après avoir reconduit pour 24 heures son mouvement à une écrasante majorité (96% des votants).
De facto, la publication d'un numéro dimanche est "impossible", ont assuré à l'AFP plusieurs grévistes.
Ces derniers veulent que la direction renonce à l'arrivée le 1er août de Geoffroy Lejeune, venu du journal d'extrême droite Valeurs Actuelles, et réclament des garanties d'indépendance juridique et éditoriale.
Face à l'inflexibilité de la direction, des négociations ont eu lieu pour permettre aux journalistes qui le souhaitent de partir avec "les meilleures conditions possibles", jusqu'à leur "rupture unilatérale et assez brutale" par la direction, a rappelé à l'AFP Guillaume Caire, journaliste au JDD.
Selon lui, sur le volet social, on "était proches d'un accord mais il y avait encore un pas à faire (...) pour protéger les plus précaires" et les "plus âgés".
Autre ligne rouge, l'inscription, dans une charte de déontologie, de l'interdiction de "toute publication de propos racistes, sexistes et homophobes", une phrase "rayée à chaque fois par la direction".
La rédaction réclame cette inscription, alors que Valeurs Actuelles a été condamné, sous la direction de Geoffroy Lejeune, à une amende de 1.000 euros avec sursis pour injure publique à caractère raciste envers la députée LFI Danièle Obono.
Beaucoup d'observateurs voient dans la nomination de Geoffroy Lejeune la main du milliardaire Vincent Bolloré, dont le groupe Vivendi doit avaler Lagardère, propriétaire du JDD, de Paris Match et d'Europe 1, après une offre publique d'achat réussie.
Les grèves précédentes menées contre ses ingérences supposées à I-Télé (devenue CNews, propriété de Vivendi) en 2016 et Europe 1 en 2021 se sont soldées par des départs massifs.
Pour le sénateur PS David Assouline, présent au rassemblement, le simple fait d'imposer un directeur unanimement rejeté "prouve que, derrière, il y a un projet idéologique et politique", en l'occurrence celui "de Bolloré", qu'il qualifie "d'extrême droite".
"Ce fantasme de l'extrême droite est infondé et méprisant", avait estimé lundi dans un communiqué Arnaud Lagardère, PDG du groupe éponyme.