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Premier objectif atteint pour la France: avec 100.000 bornes de recharge électrique installées sur son territoire, elle commence à rattraper son retard par rapport à ses voisins européens, mais se pose désormais la question de l'entretien d'un tel réseau et du déploiement des charges rapides, encore largement minoritaires.
Un temps envisagé pour fin 2021, puis fin 2022, le cap aura finalement été franchi avec quelques mois de retard début mai 2023. "C'est un vrai accomplissement", a salué le directeur général de l'Avere qui rassemble tous les industriels du secteur en France, Clément Molizon.
"Il est temps d'avoir un message positif et de rassurer sur l'état des déploiement", a-t-il souligné, alors que l'échec à atteindre cet objectif dans les délais impartis avait été largement commenté.
La France, plus grand pays de l'Union européenne et dont le nombre de bornes par 100 km était jusqu'à récemment dans le bas du tableau des pays, devient le deuxième pays le mieux doté en nombre absolu de bornes, derrière les Pays-Bas, a indiqué l'Avere.
Pour continuer à combler le retard et répondre à la croissance continue de la mobilité électrique, Emmanuel Macron a fixé l'objectif de 400.000 bornes d'ici à 2030. L'Avere le fixe elle "entre 330.000 et 480.000" d'ici à la fin de la décennie, selon Clément Molizon.
L'obligation de vendre des véhicules zéro émission (essentiellement électriques) en Europe à partir de 2035 pousse les industriels à insister sur le déploiement des bornes.
- Qualité vs quantité -
Mais la multiplication des points de charge ne suffit pas, préviennent certains acteurs. "Ce qui compte c'est aussi la qualité de la recharge", insiste Matthieu Dischamps, directeur général France de Powerdot, un des principaux opérateurs de borne de recharge rapide dans l'Hexagone.
Actuellement, la France compte environ 10% de point de charge rapide -- au-delà de 50 kW de puissance. Ces installations permettent de recharger son véhicule en 20 à 30 minutes pour la somme de 30 euros environ, en fonction de la taille de la batterie.
"En Allemagne, on est plutôt à 18%" de points de charge rapide, souligne M. Dischamps pour qui la France devrait viser les 20% pour être en accord avec la demande.
"Il y a 1,3 million de véhicules électriques en France actuellement, et la projection c'est qu'on sera à 13 millions en 2030", prévient-il.
Il cite en exemple les supermarchés: "Quand on fait ses courses, on doit pouvoir se recharger en 30-40 minutes".
Actuellement, ce sont surtout les autoroutes qui bénéficient de ces installations. Comme les réseaux autoroutiers APRR et Area, dont 100% des aires de repos sont désormais équipées, "soit une station de recharge tous les 30 km", selon ces sociétés.
- Investissements lourds -
Les investissements pour ce type d'installation sont lourds. Sur les autoroutes, les stations doivent être surdimensionnées afin d'absorber les flux lors des grands week-ends de chassé-croisé et éviter la saturation.
"Pour la rentabilité, sur l'autoroute, on n'est pas très loin des 15 ans", avance Pierre-Emmanuel Bredin qui s'occupe des 3.400 stations-service de TotalEnergies en France. Ces dernières sont en phase de transformation pour accueillir des bornes de recharge en plus des traditionnelles pompes à essence.
TotalEnergies exploite 750 bornes de charge rapide, et espère en détenir près de 4.000 d'ici 2025.
Pour l'instant, même lors des longs week-ends de mai, peu de bornes sont occupées dans les stations, dit observer Pierre-Emmanuel Bredin, "mais la montée en puissance va se faire", assure-t-il.
Autre défi, garantir la viabilité du réseau alors que de nombreux points de charge publics ne fonctionnent pas ou mal et que les automobilistes disent régulièrement rencontrer des difficultés pour recharger leur véhicule.
Mais pour assurer un déploiement efficace de points de charge rapide, la France peut compter sur Enedis, "le gestionnaire de réseau de distribution le plus rapide en Europe", selon M. Dischamps, dont la société est implantée dans cinq pays sur le continent.
La rapidité de raccordement des stations au réseau "va conditionner le déploiement" des infrastructures, assure M. Dischamps.