Partager:
"Je n'ai pas manqué une édition depuis 1958", proclame fièrement Christian Monchâtre à quelques jours de l'édition du centenaire des 24 Heures du Mans. Ce passionné de 74 ans est intarissable sur la "magie" d'une course qui reste à ses yeux "surtout une grande fête".
Dans une chambre du pavillon familial, situé à un jet de boulon du circuit Bugatti au Mans, cet ancien cadre de Renault détaille quelques-unes de ses pépites de collectionneur: environ 250 modèles réduits de voitures ayant gagné ou participé à la course d'endurance. Et tous les billets d'entrée depuis sa première édition, rangés dans un classeur.
"J'avais 10 ans la première fois que mon père m'a emmené, en 1958", se souvient-il en montrant l'affiche officielle de cette année-là, encadrée et clouée au mur.
Soit 65 éditions à son actif. A une petite exception près: "En 2020 quand la course a eu lieu à huis clos pour cause de Covid. Mais j'étais sur ma terrasse, j'ai branché la télé, le vent soufflait dans le bon sens et j'entendais les voitures, c'est un peu comme si j'y étais!".
La mélodie envoûtante des moteurs, ingrédient central de cette passion qui ne l'a jamais quitté.
- Le miaulement d'un V12 -
Il n'oubliera jamais ce "départ type Le Mans", lorsque les coureurs traversaient la piste en courant avant de sauter dans leur bolide le samedi à 16h00 pile - une pratique remplacée depuis les années 70 par un départ lancé, moins dangereux.
"Une minute avant le départ, tout le monde retenait son souffle, on n'entendait plus un bruit. Dès le coup d'envoi, il y avait une immense clameur quand les pilotes s'élançaient, puis le bruit des moteurs".
En 1958, Ferrari remportait la course. Le constructeur restera invaincu de 1960 à 1965, série interrompue par Ford l'année suivante. "Je suis immédiatement tombé amoureux de Ferrari", dont il espère une victoire pour son grand retour cette année.
La naissance d'une passion pour Ferrari et plus généralement pour les 24 Heures du Mans, une course démesurée, "unique au monde".
Il y a les voitures, bien sûr, les rebondissements, les abandons, les grands duels qui ont forgé la légende de l'épreuve: Ferrari-Ford, Ferrari-Matra, Porsche-Matra...
Mais "24 heures, c'est long, il faut s'occuper". Pour ça, il y a les animations autour du circuit, la vie des stands, les manèges, les concerts, le fameux "Village". "Les 24 h, c'est une course mais c'est surtout une grande fête", selon lui.
- "Deuxième Noël" -
Une fête qui commence plusieurs jours avant la course, avec le pesage, le défilé des pilotes au centre du Mans, les essais.
Il y a aussi les moments "magiques", le lever du soleil sur le circuit le dimanche ou le "miaulement" de certains moteurs, comme autrefois le mythique V12 Matra dans la ligne droite des Hunaudières.
Aujourd'hui bénévole à l'Automobile Club de l'Ouest (ACO, organisateur des 24 Heures), Christian Monchâtre reconnaît que la course s'est "professionnalisée". Pour le meilleur -la sécurité, les avancées technologiques, la fiabilité des moteurs- mais parfois au détriment du spectacle.
Les mesures de sécurité ont sonné le glas du départ "à l'ancienne", des spectateurs qui pouvaient se masser juste derrière les barrières de sécurité, à quelques mètres des bolides lancés à plus de 300 km/h. "C'était de la folie pure, on allait où on voulait".
Sans surprise, Christian Monchâtre a transmis sa passion à ses deux enfants, Christel, 43 ans, et Cédric, 41 ans. Sans les forcer, en les emmenant avec lui au bord du circuit, comme son père, en leur expliquant les subtilités de la course. Il a laissé la magie opérer.
"Chaque année pendant un mois, on ne parle que de ça" lors des réunions de famille, témoigne sa fille. "C'est un moment de communion" qui rassemble proches et amis fidèles.
Un peu comme un "deuxième Noël", dit son père dans un grand sourire.