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Ayman al-Joueidi tente de se débarrasser des trombes d'eau sous lesquelles ploie la bâche qui sert d'abri à sa famille. Au passage, ce Palestinien de Gaza avale quelques lampées et tente de s'asperger car il dit ne pas s'être douché depuis plusieurs jours.
Les centaines de milliers de familles déplacées vers le sud du petit territoire palestinien devaient déjà survivre aux bombes, avec peu d'eau, de minuscules rations de nourriture et entassés sous des tentes ou dans des camps de fortune improvisés dans des écoles.
Aujourd'hui, un nouveau fléau les guette: la pluie, ses flaques stagnantes et les possibles maladies qu'elle pourrait apporter avec elle.
"On est complètement trempés, tous nos vêtements sont trempés, nos matelas, nos couvertures aussi, même un chien ne supporterait pas cette vie", lance M. Joueidi, installé dans la cour d'une école de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) à Rafah, la grande ville du sud de la bande de Gaza frontalière de l'Egypte.
Partout autour, des hommes s'activent.
Ceux qui sont parvenus à mettre la main sur des bâches plastifiées s'appliquent à recouvrir les tentes de tissu. D'autres installent des sacs plastiques pour tenter d'imperméabiliser ce qui pourrait devenir un abri pour longtemps, près de la moitié des maisons de la bande de Gaza ayant été endommagées ou détruites.
- "Enfants trempés, jamais rassasiés" -
"Les habits de mes enfants sont trempés et je n'ai rien pour les changer, ils vont tomber malade", dit à l'AFP Ayman al-Joueidi, vêtu d'une simple chemise à manches courtes pour affronter l'automne qui se fait de plus en plus froid et désormais humide.
"Où va-t-on dormir? On n'a rien mangé depuis trois jours, l'Unrwa nous donne des boîtes de conserve et des biscuits mais nos enfants ne sont jamais rassasiés, il nous faut du pain", s'emporte-t-il.
Souha Hassan, elle, est sous une tente depuis le premier jour de la guerre, le 7 octobre, quand le Hamas, au pouvoir à Gaza, a lancé une attaque d'une ampleur inédite en Israël, tuant 1.200 personnes, en majorité des civils, selon les autorités israéliennes.
Depuis lors, l'armée israélienne bombarde jour et nuit le territoire palestinien assiégé. Plus de 11.200 personnes y ont été tuées, aux deux tiers des femmes et des enfants, et 29.000 ont été blessées.
Plus de 1,5 des 2,4 millions de Gazaouis sont désormais déplacés et l'ensemble de la population souffre de la faim, selon l'ONU.
L'Unrwa a déjà ouvert 154 abris pour les accueillir, mais tous sont en surcapacité. Ils sont des centaines à se partager un cabinet de toilette et une douche, ne cesse de s'alarmer l'agence onusienne dans ces rapports quotidiens.
- "Que le début" -
Surtout, prévient-elle, "la surpopulation favorise les épidémies, notamment les infections respiratoires sévères et les diarrhées". Des responsables onusiens commencent déjà à évoquer le choléra.
Le patron de l'Unrwa à Gaza, Thomas White, a prévenu lundi que les camions de son organisation ne pourraient pas recevoir les chargements d'aide au terminal de Rafah mardi, faute de carburant.
Les "opérations humanitaires cesseront sous 48 heures, aucun carburant n'étant autorisé à entrer à Gaza", avait-il ajouté.
"On n'avait pas d'eau et là, d'un coup, on est noyés", se lamente Mme Hassan. "On n'a pas de vêtements d'hiver parce qu'on est partis de chez nous sans rien et maintenant tous nos habits sont trempés", poursuit cette mère de famille.
"Et ce n'est que le début, que se passera-t-il en hiver, quand la pluie sera plus forte encore? Nos enfants sont affaiblis parce qu'ils ne mangent pas assez, ce sera terrible", imagine-t-elle déjà.
Autour d'elle, certains tentent malgré tout de recycler l'eau de pluie.
Ici, bidons de plastique et bouteilles en main, des hommes récupèrent les trombes qui sortent des gouttières. Là, un autre tente de bloquer un trou dans une bâche au-dessus de la tête d'une femme qui fait cuire du pain sur un petit feu de bois.
Il ne faudrait pas que la pluie éteigne le feu. Ou pire, qu'elle dissolve les maigres galettes de pain préparées à prix d'or.
Dans le sud de la bande de Gaza complètement assiégée par l'armée israélienne, les rares sacs de farine coûtent désormais 200 dollars.