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En Wallonie, 15% de la population endosse le rôle d'aidant-proche, venant quotidiennement en aide à un proche en déficit d'autonomie. Pourtant, ce rôle, souvent accompli par amour ou par devoir, demeure invisible, sans reconnaissance officielle, ni ressources suffisantes.
Thierry, ancien avocat, raconte comment sa vie a brusquement changé après un AVC, suivi de la maladie d'Alzheimer. "Heureusement, ma tendre épouse est là tous les jours pour moi", confie-t-il. Pour sa femme Marie-Noël, la vie s’apparente désormais à "une survie dans l’ombre". Elle continue: "Je ne peux pas tout gérer. J'ai 64 ans, je suis moi-même malade. Je dois me reposer mais je ne peux pas."
Les aidants-proches, au nombre de 700.000 en Wallonie et environ 200.000 à Bruxelles, trouvent rarement du réconfort. Beaucoup se sentent isolés face aux défis quotidiens qu’ils rencontrent : épuisement physique et mental, stress et parfois dépression. Un tiers de ces aidants souffrirait de burn-out, mettant en lumière l’urgence de reconnaître et de soutenir ces personnes.
Des réunions entre aidants-proches révèlent l'ampleur du phénomène et la solidarité qui peut en émerger. "Je me suis senti complètement seul, soutenu par la famille, mais à la maison, je suis avec moi-même", confie un participant. Ce genre d’espaces d’échanges devient un facteur d’espoir et d’entraide pour certains, malgré l’adversité commune.
Une économie de plus de 10 millards d'euros pour la Belgique
Actuellement, les chiffres montrent que 64% des aidants proches sont des femmes âgées de 50 à 70 ans. En moyenne, elles consacrent plus de 4 heures par jour à leur proche, un temps souvent non rémunéré. Une aide qui génère une économie estimée à 12,5 milliards d’euros pour la Belgique, soit 2,5% de son PIB.
Mais au-delà de l'âge mûr, les jeunes sont aussi touchés par cette responsabilité. Près d’un sur cinq au niveau secondaire participe activement au soutien d’un parent ou membre de famille dépendant. Une charge qui peut les marginaliser à l’école mais surtout peser sur leur insouciance: "C’est compliqué pour eux de pouvoir jouer le rôle d’étudiant et en même temps le rôle de jeune aidant-proche", explique Maxime Delaite de l'ASBL aidants-proches.
Véronique, autre visage de cette réalité, raconte avoir arrêté de travailler pour veiller sur son mari gravement malade, un choix remettant en question ses priorités de vie. "Des petites choses qui avaient de l'importance avant n'en ont plus du tout", partage-t-elle. Ces paroles témoignent des bouleversements profonds que peut provoquer la condition d'aidant.
En dépit de leur influence immense sur la société, les aidants proches restent peu soutenus. Faute de statut officiel, la reconnaissance, qu’elle soit symbolique ou matérielle, se fait attendre. Beaucoup sont contraints de jongler entre leur rôle d’aidant et une activité professionnelle pour subvenir à leurs besoins, souvent au détriment de leur santé.
Pour pallier ce manque de soutien, plusieurs associations et organisations plaident pour une reconnaissance légale de ce statut essentiel. Ces revendications visent à offrir aux aidants proches des droits, ainsi qu'un accès à des aides financières ou des réformes pour alléger leur quotidien. Un changement qui bénéficierait à tout le tissu social, tout en soulageant la détresse invisible de ces héros du quotidien.


















