Partager:
La fête avait été annoncée depuis plusieurs semaines et les autorités policières étaient sur le qui-vive. Malgré le fait qu'il s'agissait d'un canular (un festival avec des DJ renommés), des milliers de jeunes se sont rassemblés au Bois de La Cambre à Bruxelles ce jeudi, attirés aussi par le beau temps (dernier jour d'ailleurs avant une chute des températures dans les prochains jours). Les forces de police sont intervenues à cheval et avec des canons à eau pour disperser la foule.
26 policiers, sept chevaux de la police et huit manifestants ont été blessés jeudi lors de l'évacuation du bois, selon le dernier bilan de la soirée donné par la porte-parole de la police de Bruxelles-Ixelles Ilse Van de Keere. D'après elle, six des huit participants blessés ont reçu des soins sur place et deux ont été emmenés à l'hôpital. Il n'y a pas de signalement pour des blessés graves jusqu'à maintenant.
Toujours selon la police, six véhicules de police ont par ailleurs été endommagés. Cinq voitures ont eu les vitres brisées et les pneus crevés, et le pare-brise d'un camion de la cavalerie policière a été cassé.
22 arrestations
Il y a eu en outre 22 arrestations, dont 18 administratives et quatre judiciaires. Ces quatre personnes ont été arrêtées judiciairement pour des faits de rébellion, coups et blessures envers policiers et non-respect des mesures Covid. Une personne a été mise à disposition du parquet de Bruxelles. Elle devra comparaitre le 22 avril prochain devant le Tribunal correctionnel pour des faits de coups et blessures envers policiers ayant entrainé une incapacité de travail, annonce le parquet dans un communiqué ce matin. Il s’agit d’un bilan provisoire et susceptible d’évoluer, l'analyse des images étant encore en cours, précise la substitute du Procureur du Roi, Sarah Durant.
Rappel des faits
La police locale estime qu'il y avait entre 1.500 et 2.000 personnes rassemblées au Bois de la Cambre dans l'après-midi, ce qui contrevenait aux mesures sanitaires. En début de soirée, notre équipe de reporters sur place constatait que les autopompes étaient toujours en action et qu'il ne restait plus que quelques centaines de personnes alors qu'elles avaient été plusieurs milliers en milieu d'après-midi. Régulièrement depuis 16h30, la police a répondu aux personnes dans le parc par des gaz lacrymogènes.
Des policiers, des autopompes et des chevaux de la police ont été pris à partie par plusieurs jeunes sur place durant l'après-midi. Un hélicoptère et des drones de la police ont survolé la zone durant de longues heures.
> Rassemblement de milliers de jeunes au Bois de la Cambre: le bourgmestre de la Ville réagit
Tout d'un coup on a vu les policiers à cheval qui chargeaient sur des jeunes qui n'avaient rien fait
Romain, 20 ans, était présent depuis près de deux heures dans la foule lorsque l’ordre d’évacuation a été donné. Jusque là, tout allait bien: "Tout était pacifique, les distances n’étaient pas respectées, les mesures n’étaient pas respectées, mais c’était le but. Je ne comprends pas pourquoi ils sont intervenus, parce qu’ils n’ont rien fait pendant trois heures. Ils ont laissé tout faire, ils laissaient les jeunes arriver pendant trois heures, donc les contaminations étaient déjà effectuées. Ca ne servait plus à rien d’intervenir, et en intervenant, ils ont rassemblé encore plus de jeunes, et ils ont engendré le chaos qu’il y a eu", estime-t-il.
Le jeune homme n’en veut pas particulièrement à la police. Il en veut surtout au gouvernement et à ses mesures : "Il faut aussi prendre conscience que le peuple a un pouvoir. Moi, personnellement, j’aimerais que ça reste pacifique, parce que les policiers n’y peuvent rien. Les seuls coupables, ce sont ceux qui sont dans leur bureau en costard et qui viennent faire une conférence de presse tous les deux mois".
Une jeune femme de 25 ans que nous avons interrogée explique qu’elle s’est retrouvée jeudi au Bois de la Cambre pour souffler et ne plus rester enfermée. "Quand X personnes décident de réaliser un acte anodin, comme ici se rendre dans un parc avec un ami et juste chiller, cet acte, à la base, qui est plutôt personnel et anodin se transforme en une action collective, qui se remarque et qui dérange. Evidemment, on ne cautionne pas les actes de violence qu'ont pu avoir certaines personnes envers les forces de l'ordre. Parce que je suppose que pour eux non plus ce n'était pas une partie de plaisir d'être là hier soir", déclare-t-elle.
Catherine, elle, vit près du Bois de la Cambre. Sa promenade s'est transformée en cauchemar ce jeudi. "Nous on se dit qu'on va un peu se promener, etc. On commence à descendre le chemin pour arriver le long du lac. Et là tout d'un coup on a vu les policiers à cheval qui chargeaient sur des jeunes qui n'avaient rien fait, qui n'avaient même pas crier, qui n'avaient rien fait. Ils leur chargeaient dessus. J'étais tellement choquée que j'ai crié. Alors je me disais que ce n'était pas possible, je me disais que ça, ce n'est pas en train d'arriver dans notre pays. On n'est pas en Belgique", confie Catherine.
Une fête sous surveillance
Le parquet de Bruxelles avait annoncé mercredi avoir ouvert une enquête pour identifier les organisateurs de "La Boum", cette fausse fête (devenue vraie ce jeudi) prévue le 1er avril au Bois de la Cambre à Ixelles. Il s'agissait à la base, comme les organisateurs l'ont mentionné sur le réseau social Facebook, d'un canular dont le but était de tourner en dérision certaines mesures édictées dans le cadre de la pandémie de coronavirus, notamment l'interdiction de se rassembler. Pour le parquet, ces annonces de faux événements risquaient d'engendrer de réels rassemblements de nombreuses personnes. Ces prédictions se sont donc avérées vraies.