Partager:
La BBC a défendu mardi ses actions après les accusations à caractère sexuel visant un de ses présentateurs vedette dont le nom n'a pas été dévoilé, et qui ont plongé le groupe audiovisuel public dans la tourmente.
L'affaire fait la Une des journaux britanniques depuis que le tabloïd le Sun a écrit qu'un présentateur star aurait payé une personne mineure en échange de photos "sordides".
"C'est clairement une situation complexe et difficile et nous devons gérer un certain nombre de facteurs: répondre correctement à de graves allégations (...) respecter la vie privée des individus et l'intérêt public légitime", a déclaré mardi le directeur général du géant de l'audiovisuel public Tim Davie lors d'une conférence de presse.
Quelques heures plus tard, la BBC a rapporté qu'une autre personne, âgée d'une vingtaine d'années, avait reçu des "messages menaçants" du présentateur au coeur de l'affaire, après avoir fait sa connaissance sur une application de rencontre.
Alors que la rumeur enfle sur l'identité du présentateur, le groupe audiovisuel a détaillé dans un communiqué le calendrier des actions menées depuis qu'elle avait été saisie le 19 mai par la famille de la première victime supposée.
Il a aussi annoncé avoir arrêté ses investigations à la demande de la police, qui n'a pas ouvert d'enquête formelle à ce stade.
Le groupe a expliqué avoir commencé à enquêter dès le 19 mai, même si à ce stade la plainte de la famille "ne contenait pas d'allégations délictueuses". La BBC indique avoir tenté à l'époque de contacter à deux reprises la famille, sans succès.
La gestion de cette affaire par la BBC est jugée sévèrement dans les médias et par des responsables politiques depuis les révélations du Sun vendredi dernier, désormais contestées par la victime présumée elle-même.
L'article publié dans le tabloïd "contenait de nouvelles accusations, qui étaient différentes" des précédentes, a fait valoir la BBC.
- Cible récurrente -
Le journal citait vendredi une femme accusant le présentateur de la BBC d'avoir versé sur trois ans plus de 35.000 livres sterling (40.000 euros) à son enfant, mineur au début des faits, en échange de "photos sordides". On ne sait pas s'il s'agit d'un garçon ou d'une fille.
Si la loi britannique fixe la majorité sexuelle à 16 ans, la possession ou diffusion d'images indécentes d'une personne de moins de 18 ans est considérée comme une infraction pénale.
La mère non identifiée s'indignait que le présentateur soit resté plusieurs semaines à l'antenne après qu'elle eût signalé ses agissements à la BBC le 19 mai.
Il a finalement été suspendu dimanche.
Cette affaire intervient alors que la BBC est la cible récurrente d'attaques de la part des conservateurs au pouvoir et de certains médias et tabloïds, pour la plupart aussi conservateurs, qui l'accusent par exemple de partialité sur le traitement du référendum sur le Brexit en 2016, ou encore de défendre des vues jugées trop "woke" (désignant un militantisme radical sur les questions liées notamment au racisme et à l'identité de genre).
The Sun, tabloïd à succès qui appartient au groupe du milliardaire Rupert Murdoch, est l'un de ses critiques les plus virulents.
Dans son éditorial mardi, le journal accuse la BBC d'avoir comme "historique honteux d'ignorer les plaintes concernant ses +talents+".
- "Foutaises" -
Le géant audiovisuel a déjà été frappé par de graves scandales à caractère sexuel, dont l'affaire Jimmy Savile, qui a éclaté en 2012 un an après la mort de cet animateur star, auteur de viols et d'agressions sexuelles sur des mineurs pendant des décennies.
Lundi, dans une lettre envoyée à BBC News, l'avocat de la première victime présumée, aujourd'hui âgée de 20 ans, a qualifié de "foutaises" les accusations dans le Sun et assuré que rien d'"inapproprié ou illégal" n'avait eu lieu.
En réponse, The Sun a assuré mardi avoir vu des virements bancaires et des captures d'écrans des contacts entre la jeune personne et le présentateur.
L'affaire a aussi pris une tournure politique. En route pour le sommet de l'Otan en Lituanie, le Premier ministre Rishi Sunak a dû assurer qu'il ne connaissait pas le nom du présentateur.
Aucun média n'a jusqu'ici publié son nom, par craintes de sanctions. Dans deux affaires précédentes, la BBC et Bloomberg avaient été condamnés pour avoir divulgué l'identité de personnes accusées dans un cas d'agression sexuelle et dans l'autre de fraude.