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A Lourdes, les évêques s'attellent à la prévention des violences sexuelles, sujet "prioritaire"

Rapport Sauvé, la suite: les évêques ont ouvert leur assemblée plénière mardi à Lourdes, leur objectif étant de prendre de nouvelles mesures sur le "fonctionnement de l'Eglise" afin de prévenir les violences sexuelles, sujet "prioritaire".

Les 120 membres de la Conférence des évêques de France (CEF) sont dans la cité mariale pour quatre jours, avec environ 75 laïcs - dont des victimes - qui ont remis à l'épiscopat mi-mars un rapport préparatoire de 270 pages contenant plusieurs propositions de réformes, fruit de 18 mois de travail.

"Nous avons là un trésor à assimiler dans les mois et les années qui viennent", a déclaré Eric de Moulins-Beaufort, président de la CEF, dans son discours d'ouverture, transmis à la presse.

Ces propositions portent sur la formation des séminaristes, "l'accompagnement des évêques ou des prêtres" dans leurs fonctions, l'accompagnement des "mis en cause" dans les agressions sexuelles, le "partage de bonnes pratiques devant des cas signalés", ou encore le cadre de la confession.

"Beaucoup d'entre elles mettent en forme et structurent des processus déjà engagés et donnent plus d'ampleur à des décisions prises. D'autres nous font des suggestions neuves, qui appelleront sans doute un travail dans nos diocèses", a poursuivi l'archevêque de Reims.

"Nous travaillerons ce (mardi) après-midi et demain (mercredi) pour aboutir à des propositions susceptibles d'être adoptées" en fin de session, a-t-il ajouté. L'épiscopat devra en effet se prononcer, par vote, jeudi et vendredi.

"La lutte contre les abus est un sujet prioritaire (...). Il ne souffre pas qu'on le reporte à plus tard. Il y a une dimension d'urgence et de nécessité de prendre des décisions qui aillent dans le bon sens", a estimé lors d'un point presse Alexandre Joly, évêque de Troyes.

Dans le rapport préparatoire, plusieurs recommandations visent à "renforcer" la place des laïcs et notamment celle des femmes au sein des instances de l'Eglise, afin, notamment, de limiter l'entre-soi, facteur de risque de dérives.

D'autres préconisent d'évaluer et accompagner régulièrement l'exercice de la mission des prêtres et des évêques" et de lutter contre leur "solitude" dans la gestion des affaires et la prise de décision.

Le rapport recommande aussi une vigilance forte (contrôle du fondateur, du projet, de la gouvernance) sur les communautés de fidèles, lieux d'abus spirituels et d'agressions sexuelles.

- "urgence et nécessité" -

Deux recommandations sont novatrices: l'une suggère de "solliciter le Saint-Siège" sur la possibilité d'autoriser une femme à devenir diacre (qui assiste le prêtre lors de célébrations) et l'autre d'expérimenter l'ordination, comme prêtres, d'hommes mariés.

Ces deux mesures nécessitent toutefois l'accord du Vatican. Sans y faire clairement référence, Mgr Joly, évêque de Troyes a souligné "un principe de réalisme important": "nous pouvons faire avancer ce qui est en notre pouvoir et non pas ce qui ne dépend pas de nous".

Le travail demandé vise à la rénovation de "certains de nos fonctionnements" et "non la transformation de l'Église, qui relèverait d'autres processus", a aussi prévenu Eric de Moulins-Beaufort.

"Nous attendons des arbitrages qui ne soient pas une suite d'éléments de langage", a déclaré à l'AFP Paule Zellitch, présidente de la Conférence catholique des baptisés francophone (CCBF, qui représente un réseau d'associations de catholiques réformateurs). Elle a adressé à l'épiscopat ses propres propositions pour une gouvernance de l'Eglise davantage partagée avec les laïcs.

Il s'agit d'une deuxième étape, après la publication du rapport choc de la Commission Sauvé sur l'ampleur de la pédocriminalité dans l'Eglise catholique depuis 70 ans.

Lors d'une première étape, en novembre 2021, la CEF avait reconnu la responsabilité de l'institution et le caractère "systémique" des actes pédocriminels. Et voté le lancement d'une instance de réparation pour les victimes.

La session d'automne 2022 de la CEF s'était apparentée à un grand déballage: la conduite "répréhensible" de l'ancien archevêque de Bordeaux, le cardinal Jean-Pierre Ricard, avec une adolescente, avait été révélée.

Mardi, les évêques ont par ailleurs publié une déclaration solennelle sur la fin de vie, dans laquelle ils ont réitéré leur opposition à une éventuelle modification législative vers une "légitimation de l'euthanasie ou du suicide assisté", prônant une meilleure "prise en charge de la dépendance due au grand âge".

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