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Après une absence inexpliquée d'un mois, le ministre chinois des Affaires étrangères, Qin Gang, a été relevé mardi de ses fonctions, une décision surprise pour laquelle les autorités n'ont donné aucune justification.
Il est remplacé à ce poste par son prédécesseur Wang Yi, qui est actuellement le véritable patron de la diplomatie chinoise, en tant que plus haut responsable des relations diplomatiques au sein du Parti communiste chinois (PCC).
Qin Gang, 57 ans et considéré comme un proche du président Xi Jinping, n'était à la tête du ministère des Affaires étrangères que depuis fin décembre.
Sa dernière apparition publique remonte au 25 juin, date à laquelle il s'était notamment entretenu à Pékin avec le vice-ministre russe des Affaires étrangères Andreï Roudenko, selon les comptes-rendus de son ministère.
Qin Gang a ainsi manqué plusieurs rendez-vous diplomatiques, dont une importante réunion de l'Association des Nations du Sud-Est asiatique (Asean) en Indonésie, début juillet.
Le ministère que dirigeait Qin Gang avait d'abord évoqué des "raisons de santé", avant de se murer dans un quasi-silence à son sujet.
Le pouvoir a néanmoins levé mardi certaines interrogations.
"Qin Gang est relevé de ses fonctions de ministre des Affaires étrangères", a sobrement rapporté Chine nouvelle. L'agence de presse officielle se borne à mentionner une décision du comité permanent de l'Assemblée nationale populaire qu'a ensuite entérinée Xi Jinping.
- Qin conserve de hautes fonctions -
Ce manque d'explications officielles est "de mauvais augure", juge Victor Shih, un expert de la politique chinoise à l'UC San Diego, qui ajoute que le choix de Wang Yi pour le remplacer est "extraordinaire dans la mesure où il existe de nombreux autres candidats viables".
Actuellement en Afrique du Sud pour participer à une réunion du groupe des Brics, M. Wang avait déjà occupé ces responsabilités ministérielles de 2013 à 2022.
Il remplissait par ailleurs déjà une partie des obligations de Qin Gang ces dernières semaines.
L'absence de M. Qin a généré de nombreuses rumeurs sur les réseaux sociaux, dont celle d'une liaison adultère avec une présentatrice d'une chaîne de télévision de Hong Kong, rencontrée lorsqu'il était ambassadeur aux Etats-Unis (2021-2022).
Les autorités avaient jusqu'à présent éludé les nombreuses questions sur le sort de Qin Gang.
Encore interrogée mardi après-midi pour savoir qui était le ministre chinois des Affaires étrangères, une porte-parole, Mao Ning, avait affirmé en conférence de presse avoir "déjà répondu" à cette question, sans toutefois prononcer un nom.
Certains analystes appellent toutefois à ne pas tirer de conclusions hâtives.
Qin Gang "conserve son poste plus élevé de conseiller d'Etat", souligne ainsi le politologue Neil Thomas, spécialiste de la Chine auprès du cercle de réflexion Asia Society. "Il n'est donc pas certain qu'il s'agisse d'une purge", écrit-il sur Twitter, rebaptisé "X".
- Un "arrangement provisoire" ? -
Le maintien du titre de conseiller d'Etat suggère qu'il ne "s'agit pas" d'une sanction mais d'un "problème de santé", subodore le chercheur Manoj Kewalramani, du cercle de réflexion Takshashila Institution, basé en Inde.
Cela aurait l'avantage d'épargner "l'image de Xi Jinping qui avait un peu forcé le protocole pour promouvoir Qin Gang", écrivait, avant l'annonce de mardi, l'analyste Bill Bishop dans sa lettre d'information spécialisée sur la Chine, Sinocism.
"La rapide ascension de Qin Gang a pu susciter un certain ressentiment chez d'autres hauts responsables du ministère chinois des Affaires étrangères", dit à l'AFP le juriste Moritz Rudolf, spécialiste de la Chine à la faculté de droit de Yale (Etats-Unis).
Le départ soudain du ministre des Affaires étrangères démontre que "le fonctionnement du PCC n'est peut-être pas aussi carré et stable qu'on pourrait le supposer", note-t-il.
L'absence de Qin Gang avait provoqué un certain vide au niveau diplomatique.
Une visite à Pékin du responsable de la politique étrangère de l'Union européenne, Josep Borrell, avait ainsi été subitement annulée courant juillet.
Et l'agence de presse Bloomberg a affirmé vendredi qu'une visite du ministre britannique des Affaires étrangères, James Cleverly, avait été reportée en raison de l'absence de Qin Gang.
En attendant, son "successeur" Wang Yi "est un vétéran de la diplomatie chinoise et tout le pays lui fait confiance", a tweeté Hu Xijin, un éminent commentateur du média d'Etat Global Times.
Cependant, pour l'analyste Neil Thomas, M. Wang ayant maintenant deux emplois, la situation actuelle "pourrait être un arrangement provisoire".
"Nous continuerons à dialoguer avec le ministre des Affaires étrangères Wang Yi et d'autres responsables chinois et nous continuerons de penser que le maintien des canaux de communication est extrêmement important", a quant à lui réagi le porte-parole adjoint du département d'Etat américain Vedant Patel dans un communiqué.