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Le candidat du parti au pouvoir pour l'élection présidentielle au Nigeria, Bola Tinubu, se rapprochait de la victoire mardi soir, selon des résultats partiels contestés par ses deux principaux adversaires, qui dénoncent des fraudes "massives" et réclament l'annulation du scrutin.
Plus de 87 millions d'électeurs ont voté samedi pour choisir, parmi 18 candidats, qui aura la lourde tâche de redresser le pays le plus peuplé d'Afrique, plombé par une économie en berne, un fort appauvrissement de la population et les violences récurrentes de groupes armés et de bandits.
Cette présidentielle est l'une des plus serrées qu'ait connues le Nigeria. Pour être élu dès le premier tour, le vainqueur doit obtenir non seulement la majorité des suffrages exprimés, mais aussi au moins 25% des voix dans les deux tiers des 36 Etats de la fédération, plus le territoire de la capitale, Abuja.
Le vote s'est globalement déroulé dans le calme, malgré quelques incidents sécuritaires et des couacs logistiques.
Mais à la suite de retards dans le décompte, et d'importantes défaillances dans le transfert électronique des résultats, l'opposition a accusé de fraude le Congrès des progressistes (APC, au pouvoir).
Avant la reprise du décompte mardi, le Parti démocratique du Peuple (PDP) et le Parti travailliste (LP) ont dénoncé "un simulacre" d'élection.
"Nous avons totalement perdu confiance dans l'ensemble du processus", ont-ils déclaré lors d'une conférence de presse conjointe, exigeant son "annulation immédiate" et la tenue d'un "nouveau scrutin".
- Décompte retardé -
Selon les résultats officiels annoncés par la Commission électorale (Inec) pour 31 des 36 États et le territoire de la capitale fédérale, M. Tinubu a remporté 8,1 millions de voix.
Il devance Atiku Abubakar, le candidat du PDP, le principal parti d'opposition, qui totalise jusque-là 6,4 millions de voix.
L'outsider Peter Obi, dont la popularité dans la jeunesse, qui le juge intègre et compétent, a créé la sensation, a obtenu 4,8 millions de voix.
De son côté, l'Inec a fustigé des accusations "infondées et irresponsables" de l'opposition. "Lorsqu'ils ne sont pas satisfaits du résultat d'une élection", les candidats "sont libres de s'adresser aux tribunaux", mais ils ne peuvent demander son annulation avant son terme, a ajouté la commission dans un communiqué.
Les Nigérians attendent avec anxiété la publication des résultats dans le reste du pays, notamment dans les grands Etats comme Rivers (sud-est), Kano et Kaduna (nord).
La grogne montait dans certaines régions comme Rivers, bastion traditionnel de l'opposition, où le décompte a été suspendu en raison de "menaces de mort" sur le responsable local de l'Inec après l'annonce de scores importants pour l'APC.
"Que Tinubu gagne même à Rivers, c'est impossible!", s'énerve un électeur de 25 ans, Osaki Briggs, exprimant des craintes partagées par beaucoup de ses compatriotes. "Pour qui l'Inec prend-elle les Nigérians ?".
Devancé au niveau national, M. Obi a toutefois remporté de justesse l'Etat stratégique de Lagos, la capitale économique, pourtant fief de Bola Tinubu.
Le "parrain de Lagos", comme est surnommé ce dernier du fait de son immense influence politique dans la mégalopole qu'il gouverna de 1999 à 2007, n'a pas encore commenté les résultats nationaux partiels. Mais il surpris en reconnaissant sa défaite à Lagos.
- Dynamiques régionales -
De nombreux observateurs étrangers ont aussi sévèrement critiqué le manque de transparence et des défaillances opérationnelles. "La confiance dans l'Inec a encore diminué" à cause des retards dans la publication des résultats sur son site, a notamment souligné la délégation de l'Union européenne.
Depuis le retour de la démocratie en 1999, le Nigeria a organisé sept élections nationales, pour la plupart entachées de plaintes pour fraude, de problèmes logistiques, de violences et de contestations judiciaires.
Bola Tinubu, 70 ans, et Atiku Abubakar, 76 ans, tous deux musulmans, bénéficient d'une vaste assise dans le nord. Peter Obi, un chrétien de 61 ans, pourrait lui compter sur les votes du sud-est, sa région natale.
Avec ses 216 millions d'habitants, le Nigeria devrait devenir en 2050 le troisième pays le plus peuplé au monde, dans une Afrique de l'Ouest menacée par un recul démocratique et la propagation de violences jihadistes.
La première économie du continent est devenue une puissance culturelle mondiale, grâce notamment à l'Afrobeats, genre musical qui enflamme la planète avec des stars comme Burna Boy.
Mais face aux immenses difficultés du quotidien, aggravées par de récentes pénuries, de nombreux Nigérians appellent au changement, écœurés par des décennies de mauvaise gouvernance et une élite vieillissante et réputée corrompue.