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A 69 ans, blessée, Nicole ne parvient pas à résilier son abonnement à la salle de sport: "Je ne sais pas comment je vais faire face"

Nicole se sent lésée : elle souhaite résilier son abonnement à sa salle de sport pour raisons médicales, mais le centre de fitness lui réclame de lourds frais. Elle se demande si c'est légal puisqu'elle a été déclarée inapte à la pratique de sports. Pour Test Achats, il s'agit d'une pratique abusive. Explications. 

Nicole nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour dénoncer une pratique qu’elle juge abusive. Le 1er février dernier, elle s’affilie à la salle de sport Stadium à Schaerbeek via un abonnement annuel. Le 9 mai, elle apprend que sa prothèse au genou s’est décelée et qu’il va falloir la remplacer. "Elle sera plus contraignante, je ne pourrai plus pratiquer de sport", écrit-elle. 

Preuves à l’appui, Nicole se rend à la salle de sport. Elle dépose un certificat médical fait par son chirurgien, et un peu plus tard, un deuxième certificat, attestant qu’elle ne pourra plus pratiquer de sport à vie, fait par son médecin traitant. Documents que nous avons pu consulter. 

Problème : malgré les certificats médicaux, le Stadium lui réclame des frais afin de pouvoir résilier son abonnement. "Ils me réclament 186€ ! J’ai une petite pension, et de lourds frais médicaux non remboursés. Ce n’est pas dans mon budget, je ne sais pas comment je vais faire face", s’inquiète Nicole. 

Une pratique "injuste"

Nicole souffre d’arthrose. Dès l’âge de 56 ans, un chirurgien lui pose une prothèse au genou droit. Vient ensuite le gauche. Aujourd’hui, Nicole a 69 ans. "Et je suis handicapée comme si j’en avais 80", déplore-t-elle. 

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À cause d’un problème osseux, voire infectieux, elle a déjà dû changer de prothèse 2 fois: "Elles sont scellées avec du ciment sauf que moi ça ne tient pas, et on ne sait pas pourquoi", explique-t-elle. Début mai, son chirurgien lui apprend que l’une de ses prothèses s’est de nouveau décelée, et qu’elle devra se faire réopérer pour la 3e fois. "Elle sera beaucoup plus contraignante pour moi, et le médecin m’a dit que si elle retombait, je ne pourrai plus en remettre car il n’y a plus d’os, donc on devra me couper la jambe jusqu’au genou…"

Je n'ai jamais demandé à être déclarée inapte physiquement à la pratique de sports 

Raison pour laquelle Nicole souhaite, logiquement, résilier son abonnement à la salle de sport Stadium. "Je trouve ça injuste parce que moi j’aimais aller au sport. J’ai pas demandé à être réopérée. C’est la double peine, j’aimerais qu’ils fassent un geste et prennent en compte mon cas personnel, ils pourraient faire preuve d’un peu de compassion", estime-t-elle. 

Aujourd’hui Nicole se sent lésée. Et surtout, elle se demande si cette pratique est légale: "Sont-ils en droit de réclamer cette somme alors que je n'ai jamais demandé à être déclarée inapte physiquement à la pratique de sports ?". 

Pour tenter de répondre à cette question, nous avons rencontré Etienne Mignolet, porte-parole du SPF Economie, qui rappelle les règles de base en termes de résiliation de contrat avec une salle de sport pour des raisons médicales. Et Julie Frère de Test Achats, qui estime que la clause est clairement abusive. 

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Rappel des règles en termes de résiliation de contrat avec une salle de sport pour des raisons médicales

Etienne Mignolet du SPF Economie rappelle qu’il y a deux possibilités en termes de résiliation de contrat pour les centres de fitness :

  • Premier cas de figure : la salle est signataire du code de conduite du secteur du fitness"Dans ce code il est indiqué qu’un consommateur doit pouvoir résilier un contrat à durée déterminée ou indéterminée, sans frais, sans délai, pour des raisons médicales et sur base d’un certificat médical", précise-t-il ;
  • Second cas de figure : la salle n’est pas signataire de ce code de conduite. "Il faut alors se référer aux conditions générales du contrat de la salle de sport en question et voir ce qu’elles stipulent". 

Dans le cas de Nicole, Stadium n’a pas signé le code de conduite du secteur. Il faut donc se référer à leur contrat de vente.

La réponse de Stadium 

Essayons donc de comprendre sur quoi se base Stadium pour réclamer 186€ de frais de résiliation à Nicole. D’après leurs explications, il faut se référer au point 4a du contrat de vente souscrit par Nicole, qui dit que "en cas de rupture d’un contrat à durée déterminée pour cause de maladie, les frais de rupture seront calculés en fonction du bénéfice financier perçu en comparaison avec un contrat à durée indéterminée majorés de frais administratifs".  

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Autrement dit, Nicole avait souscrit à un abonnement annuel (et donc à durée déterminée), qui lui revenait à 65€ par mois. Afin de pouvoir résilier son abonnement, Stadium doit le convertir en abonnement mensuel (et donc à durée indéterminée), qui coûte 99€ par mois. Nicole doit donc régler la différence afin de pouvoir résilier son abonnement. 

Les frais que doit payer Nicole sont calculés à partir du jour de son inscription, à savoir le 1er février 2023. Elle a donc déjà réglé 310€ à la salle de sport pour la période du 1er février au 31 mai, soit 65€ par mois. Or, vu que l’abonnement de Nicole doit être converti en abonnement mensuel pour pouvoir le résilier, elle aurait dû payer 596€ pour la même période. 

Stadium a donc déduit les 310€ payés des 596€ qu’elle aurait dû payer après conversion de son abonnement. Il reste donc un solde 186€ à régler afin de clôturer son contrat. 

Pour Test Achats, il s’agit clairement d’une clause abusive 

Julie Frère, porte-parole de Test Achats met en garde: "On est clairement dans un cas de clause abusive". Dans le droit économique, une clause abusive est définie comme tel: "Toute clause ou toute condition dans un contrat entre une entreprise et un consommateur qui crée un déséquilibre manifeste entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur constitue une clause abusive".

Elle est dans l’incapacité de remplir ses obligations contractuelles et ça ne relève pas de sa volonté

Julie Frère précise: "Ici, on est dans ce cas de figure : Nicole n’est plus en mesure de pouvoir aller à la salle de sport, certificat médical à l’appui. Exiger qu’elle paye dans ces circonstances, c’est abusif. Nous estimons que cette clause doit être considérée comme nulle et non-avenue".

D’après Test Achats, Nicole pourrait obtenir gain de cause en justice. D’autant que le cas de force majeure peut lui aussi être invoqué: "Elle est dans l’incapacité de remplir ses obligations contractuelles et ça ne relève pas de sa volonté. Dans ce cas de figure, on doit estimer qu’elle est libérée de son obligation le temps de son incapacité", détaille Julie Frère. 

Autrement dit, puisque Nicole doit résilier son abonnement pour raisons médicales, et donc indépendamment de sa volonté, son obligation de paiement devrait être levée. 

Que faire en cas de litige?

En cas de litige, il est possible de faire appel au Service de Médiation pour le Consommateur, précise le SPF Economie. Le consommateur qui s’estime victime d’une pratique abusive peut également le signaler auprès du point de contact de l’Inspection économique via leur site.

Nicole pourrait avoir recours à ces deux outils. Mais en dernier ressort, seul un juge pourra trancher, rappelle le SPF Economie. 

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