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Sean Baker remporte la Palme d'or à Cannes 2024 pour "Anora", un thriller acclamé pour son humanité et son audace narrative.
Le cinéaste Sean Baker, âgé de 53 ans, a remporté la Palme d'or au Festival de Cannes 2024 pour son film "Anora". Ce thriller new-yorkais, qui explore les contrastes entre les bas-fonds de la ville et les villas luxueuses des oligarques russes, marque un tournant prometteur pour le cinéma indépendant américain.
La présidente du jury, Greta Gerwig, réalisatrice du film "Barbie", a déclaré en remettant le prix : "Ce film est magnifique, empli d'humanité (...) Il nous a brisé le cœur".
Une consécration tant attendue
Pour Sean Baker, qui avait toujours rêvé de Cannes, cette consécration est particulièrement émouvante. "Toute ma vie, mon but a été d'aller à Cannes", a-t-il confié. Son film, "Anora", suit l'histoire d'une travailleuse du sexe, un thème récurrent dans son œuvre. Ce n'est pas la première fois que Baker est sélectionné à Cannes, mais cette fois-ci, son thriller a capté l'attention du Festival.
"Anora" est porté par l'actrice Mikey Madison, qui joue le rôle principal avec brio. Ce film, qui mêle une narration à la "Cendrillon" avec une tension moderne, a été salué pour sa vitalité et sa profondeur. Sean Baker, connu pour ses castings hors des circuits traditionnels, a souvent découvert ses acteurs sur des plateformes comme Instagram ou même dans des supermarchés.
Quand vous regardez mes homologues, ils ont dix ans de moins que moi
Sean Baker a eu une carrière marquée par des débuts difficiles. Initié au cinéma par sa mère, il a été captivé par le film "Frankenstein" avec Boris Karloff dès l'âge de six ans. "À partir de ce moment, c'était le cliché total: films en super 8, en caméscope, ciné-club au lycée, torturer ma soeur pour la faire jouer dans mes films", a-t-il raconté au Guardian en 2017.
Après avoir étudié le cinéma à l'Université de New York, il a réalisé son premier film, "Four Letter Words", avant de sombrer dans des excès qui ont ralenti sa carrière.
"J'ai perdu beaucoup de temps. C'est pourquoi quand vous regardez mes homologues, ils ont dix ans de moins que moi. Je suis passé par de sales moments", a-t-il confié.
Une fascination pour le thème du travail du sexe
Sorti de ses difficultés, Baker s'est accroché à sa passion pour le cinéma, travaillant même à la marge de l'industrie en montant des vidéos de mariage ou en dupliquant des cassettes vidéo et DVD.
Il a attiré l'attention internationale avec "Tangerine" (2015), un film tourné entièrement à l'aide d'iPhone, et "The Florida Project" (2017), qui raconte l'histoire d'une fillette vivant près de Disney World.
"Anora" explore une fois de plus le monde des travailleurs du sexe, un sujet que Baker trouve inépuisable. "Nous sommes tous fascinés par le travail du sexe, car ça se passe juste sous notre nez, que nous le remarquions ou pas", a-t-il expliqué.
Le film suit Ani, une strip-teaseuse new-yorkaise, et le jeune fils d'un oligarque russe qui se marient sur un coup de tête à Las Vegas, déclenchant une série d'événements dramatiques et comiques.
Je ne peux pas me contenter de faire une histoire de prostituée au grand coeur
Sean Baker craignait d'ailleurs que son film suscite la controverse, mais l'accueil enthousiaste à Cannes lui confirme que le "plus vieux métier du monde" ne cesse de fasciner.
"C'est agréable et un peu surprenant, parce qu'il semble que jusqu'à présent le film n'ait pas été aussi clivant que je le pensais", a déclaré Sean Baker à l'AFP. Et pourtant, "nous traitons de thèmes extrêmement conflictuels en ce moment".
"On peut l'explorer à l'infini", a déclaré le réalisateur, friand de personnages imparfaits, confrontés aux mêmes problèmes que tout le monde. "Je ne peux pas me contenter de faire une histoire de prostituée au grand coeur", dit-il encore