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Sur son avant-bras droit est dessiné un sablier. Le gardien français Jérémy Vachoux, nouvelle recrue du club vénézuélien Carabobo FC, se l'est fait tatouer pour se rappeler qu'il faut "profiter au maximum de chaque moment".
Sans club dans l'Hexagone, il a fait le grand bond pour devenir le premier Français à signer -pour deux ans- au Venezuela, pays à la mauvaise réputation en raison de la forte criminalité et au football méconnu: il est le seul pays sud-américain à n'avoir jamais participé au Mondial et ses clubs n'ont jamais gagné la Copa Libertabores.
"Je ne suis pas quelqu'un qui a peur du nouveau, c'est une bonne chose de découvrir de nouvelles cultures, plutôt que de rester enfermer dans notre petit cocon", dit-il à l'AFP, en sueur après une de ses premières séances d'entraînement au niveau de l'équateur. Pour échapper à la chaleur, elles commencent à 07H30 pour s'interrompre trois heures plus tard.
Formé à Saint-Étienne, passé par Lens et Orléans, Vachoux,85 matches de L2 au compteur, ne jouait plus depuis la résiliation de son contrat à Dunkerque, relégué en National à la fin de la saison dernière.
- Libertadores contre Hulk -
Comment un gardien de 28 ans, rompu aux joutes de Ligue 2, se retrouve-t-il dans un club vénézuélien ? Les aléas de la mondialisation du football : "un agent allemand (...) était en contact avec le directeur sportif du club (de Carabobo) qui cherchait un gardien" après le départ du portier panaméen Orlando Mosquera, explique-t-il.
L'entraîneur Juan Domingo Tolisano, champion du Venezuela 2021 avec le Deportivo Tachira (sud-ouest), a ensuite regardé les vidéos et donné son feu vert.
Jérémy Vachoux, qui se maintenait en forme à Lens, a aussi pu discuter avec le gardien international vénézuélien du club nordiste Wuilker Farinez, qui a fait le chemin inverse.
"Quand on regarde sur internet ce qui se passe au Venezuela, ça fait peur. Avec ma famille, on a beaucoup parlé, on a beaucoup réfléchi", explique-t-il. Sa femme et son fils de cinq mois devraient le rejoindre dans les prochaines semaines.
"Il ne faut pas se cacher. C'est très différent de la France ou de l'Europe. C'est beaucoup plus pauvre, il y a beaucoup d'inégalités. Mais, Valencia (une des villes les plus riches du pays, située au centre-Nord), c'est très joli, il y a de beaux quartiers. Je me sens bien. Pour l'instant, tout va bien. Le club fait en sorte que je me sente le mieux possible", dit-il, assumant le "risque" de disparaître des radars des recruteurs.
"C'est un risque. Mais je vais aussi jouer la Copa Libertadores. C'est une visibilité et ça peut ouvrir d'autres portes. Là, on va jouer au Brésil contre une grosse équipe" au stade du Mineirao (60.000 places) contre l'Atletico Mineiro de Hulk, vainqueur de la Libertadores en 2013 avec Ronaldinho.
Les chances de passer ce tour préliminaire face à l'ogre brésilien sont faibles mais Vachoux rappelle qu'au Mondial au Qatar l'Arabie Saoudite a battu l'Argentine, future championne du monde.
Jérémy Vachoux arrive dans un club sans palmarès mais avec des ambitions et des moyens économiques à la hausse. Les dirigeants veulent jouer les premier rôles au Venezuela, avec un nouvel entraîneur et une équipe renforcée par un international vénézuélien et des recrues étrangères (Argentine, Colombie) comme Vachoux.
- "Football langage universel" -
"Pour nous c'est important d'avoir un joueur confirmé en Europe dans le football sud-américain. On voulait un gardien avec du tempérament et du leadership", explique l'entraîneur Tolisano, qui aime sa "rapidité" et sa "vision du jeu".
Pour Carabobo, le choix de Vachoux "qui vient pour être le numéro 1", est aussi un risque: "Évidemment on aurait aimé avoir un gardien en activité (dans un club) mais on comprend aussi que si c'était le cas, il ne serait pas venu au Venezuela", convient Tolisano.
"Mon principal souci comme entraîneur c'est son adaptation. Venir d'Europe en l'Amérique du sud, ce n'est pas habituel... mais je suis rassuré. Son langage corporel nous indique qu'il est content d'être là".
Pour le moment, un traducteur accompagne Vachoux pour qu'il comprenne les consignes de l'entraîneur et les indications de ses coéquipiers.
Mais, Tolisano n'est pas inquiet: "Le langage du football est universel (...) de toute façon, à la vitesse où il apprend dans quinze jours il parle espagnol!"
"Je suis heureux d’être au Venezuela et au Carabobo FC. J’ai hâte de jouer", dit Vachoux en montrant d'autres tatouages: "un lion" et une "boussole" dont l'aiguille indique non pas le nord mais le "succès". Pour lui, le chemin qui y mène par passe par le sud.