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Prendre un raccourci, emprunter un vélo, voire recruter une doublure: les fraudes au marathon deviennent si fréquentes en Chine que les autorités s'inquiètent désormais des conséquences sur l'image du pays à l'étranger.
La course à pied a gagné en popularité ces dernières années auprès des Chinois. Beaucoup n'hésitent plus à investir dans de belles tenues ou s'enorgueillissent de leurs performances sur les réseaux sociaux ou sur leur CV, dans l'espoir d'impressionner les recruteurs.
Mais les organisateurs doivent lutter contre le nombre croissant de tentatives, parfois audacieuses, de contourner les règles.
Et les autorités commencent à réagir: la fédération nationale d'athlétisme (CAA) a interdit à vie de toute course dans le pays trois Chinois qui avaient triché mi-avril lors du marathon de Boston.
Deux d'entre eux avaient fourni des faux certificats assurant qu'ils avaient déjà réalisé lors de courses précédentes des temps suffisamment bons pour être sélectionnés. Un autre s'était tout bonnement fait remplacer par un coureur plus performant...
Leurs comportements "ont eu un impact négatif sur l'image de la Chine", avait indiqué la CAA pour justifier la sanction.
Une agence de voyage chinoise spécialisée dans les événements sportifs proposait d'ailleurs pour 50.000 yuans (6.600 euros) d'inscrire ses clients au marathon de Boston, faux certificats inclus, a rapporté la radio nationale.
D'autres fraudes sont moins subtiles. En mars, une concurrente avait emprunté un vélo lors du marathon international de Xuzhou (est de la Chine). Et au semi-marathon de Shenzhen (sud), couru en novembre, plus de 250 participants ont triché, notamment en empruntant des raccourcis.
- Dossard contrefait -
Le gouvernement encourage très fortement la pratique sportive depuis les Jeux olympiques de Pékin 2008. Résultat: En 2011, seuls 22 marathons, semi-marathons ou courses sur route avaient été organisés en Chine, le chiffre a grimpé à environ 1.500 l'an passé, selon la Fédération.
La presse chinoise évoque une "fièvre du marathon", notamment parmi la classe moyenne, entraînant l'organisation parfois précipitée de certaines courses.
La CAA a publié en décembre de nouvelles réglementations destinées à éradiquer la triche. Mais elle n'a pas souhaité révéler à l'AFP combien de coureurs s'étaient rendus coupables de fraude.
"L'essor du marathon en Chine rencontre de nombreuses difficultés. La première étant l'absence d'une culture du marathon et d'une sensibilisation aux règles", a indiqué au quotidien officiel China Daily le vice-président de la fédération, Yu Hongchen.
La Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) a décerné en janvier le "Label d'or" au marathon de Xiamen, en faisant ainsi l'une des compétitions mondiales de premier plan.
Mais cela n'a pas empêché au moins cinq personnes de tricher -- dont une avait fabriqué un faux dossard.
Sollicitée par l'AFP, l'IAAF s'est refusée à tout commentaire.
- 'Sport national' -
Paco Borao, président de l'Association internationale des marathons et courses sur route (AIMS), souligne cependant que les fraudeurs sont loin d'être tous Chinois.
"Dans certaines zones -- les pays de la région méditerranéenne, d'Afrique, d'Amérique du Sud, la Chine --, la triche semble être un sport national et les gens prennent plaisir à mettre à l'épreuve les organisateurs", déclare-t-il.
"La Chine fait partie de ce groupe mais n'est pas une source d'inquiétude particulière."
Certaines courses organisées dans le pays asiatique ont déjà recours à la reconnaissance faciale afin de repérer les éventuels fraudeurs.
Les responsables du marathon de la Grande muraille, qui aura lieu le 18 mai sur le plus célèbre des monuments chinois, assurent qu'ils se passeront de la technologie. Mais restent sur leurs gardes.
"La fraude n'est pas un gros problème pour nous jusqu'à présent", explique le directeur de la course, Lars Fyhr. Il estime à "une poignée" le nombre de tricheurs avérés dans le passé.
Des points de passage obligés sont installés le long du parcours afin de s'assurer que les coureurs respectent bien le trajet imposé.
"Nous plaçons également des caméras à ces endroits. En cas de litige, nous visionnons les vidéos pour vérifier si quelqu'un est vraiment passé ou pas."