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L’année dernière, des producteurs de chicons nous exprimaient leur inquiétude suite à l’implémentation de nouvelles réglementations européennes. Depuis janvier 2025, ils doivent composer avec l’interdiction de certains herbicides et insecticides. Comment leur situation a-t-elle évolué depuis ces nouvelles mesures ? C’est notre séquence "Droit de Suite".
Il y a un an, Kevin Crombez, producteur de chicons, exprimait déjà ses inquiétudes face aux nouvelles réglementations européennes. Selon lui, l’interdiction de plusieurs produits phytosanitaires essentiels pour protéger ses cultures allait considérablement alourdir sa charge de travail.
"La seule alternative qu'on a, c'est désherber à la main. Et payer de la main-d'œuvre en plus à des prix pareils, c'est impossible", déplorait-il.
Aujourd’hui, ses chicons poussent toujours bien, mais un risque demeure. À la prochaine récolte, il redoute de découvrir ses racines infestées par des larves. "Tant que le chicon ne pousse pas et qu'on ne le cueille pas, on ne voit pas si la larve a fait des galeries ou pas", explique-t-il.
Et le problème ne s’arrête pas là... Alors que l'homme estime son coût de production à 1,50 euro le kilo, les grossistes ne lui en offrent que 38 centimes. Une situation intenable, qui l’oblige à se tourner vers la vente directe.
Si je n'avais que la vente en gros, je ne serais pas là
Via son magasin à la ferme, il peut vendre ses chicons à 2 euros le kilo. Une stratégie de survie qui est, selon lui, indispensable. "Si je n'avais que la vente en gros, je ne serais pas là à parler de chicons", confie-t-il.
Baisse des surfaces et des producteurs
La tendance est claire : le nombre de producteurs de chicons diminue chaque année en Wallonie. "Il y a une nette diminution du nombre de producteurs, que ce soit au niveau du forçage ou de la production de racines. Ou alors, ils ont nettement réduit leur surface", indique Alain Delvigne, conseiller au Centre interprofessionnel des maraîchers wallons.
Une perte de 30% de surface de production
Il est formel : "En Wallonie, on a une perte de 30% de surface de production". Selon lui, pour continuer à vivre de leur métier, les producteurs doivent désormais se tourner vers la vente directe. Une transition difficile, car cela implique de maîtriser un nouveau modèle économique.
Miser sur la vente directe
Jean-Pascal Leclercq, lui, a franchi le pas : "90% de ma production part ici, au détail. Les 10% qui restent vont chez un grossiste", explique-t-il. Cette nouvelle stratégie lui permet de mieux valoriser son travail et d’être moins dépendant des prix imposés par le marché de gros.
C'est une Europe à deux vitesses
L'agriculteur pointe du doigt les différences de réglementations au sein de l’Union européenne : "L’Europe, c'est une Europe à deux vitesses. Tous les pays ne sont pas logés à la même enseigne. En Espagne, par exemple, ils utilisent toujours des produits qui sont interdits depuis longtemps en Belgique".
Pour réduire ses charges, il a drastiquement diminué sa production. "Avant, avec 40 hectares d'hydro culture, je produisais 15 tonnes de chicons par semaine. Maintenant, j'ai trois hectares de terre et je produis entre 500 et 800 kg de chicons de terre par semaine".
Une bonne nouvelle tout de même : ce changement lui permet de mieux vivre de son métier : "On a moins de charges et plus de personnel à payer", dit-il.
Quel avenir pour le chicon wallon ?
Malgré ces adaptations, l’avenir des producteurs de chicons reste préoccupant. Avec la disparition progressive des exploitations et la diminution des surfaces cultivées, ce légume emblématique de la région pourrait bien devenir une rareté.
Jean-Pascal Leclercq en est conscient : aujourd’hui, il est l’un des derniers à cultiver du chicon de terre en Wallonie.


















