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Au Salon 2023, l'agriculture à l'épreuve du climat

Le goût d'un fromage, la nature d'un vin ou le visage d'une forêt: les bouleversements du climat n'épargnent pas l'agriculture. Tour de piste des initiatives et solutions glanées dans les allées du Salon de l'agriculture 2023.

"Du brin d'herbe au fromage"

La production des salers, cantal et autres fromages AOP (appelation d'origine protégée) typiquement français va devoir être "repensée", prédit Christophe Chassard, chercheur à l'Inrae (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement).

Car si l'herbe ne pousse plus, les agriculteurs n'ont d'autre choix que de demander une dérogation au strict cahier des charges de leur appelation.

Cet hiver, dans le Massif central, les vaches qui produisent la Fourme d'Ambert ont ainsi consommé jusqu'à 20% de fourrage extérieur à la zone géographique de l'AOP. Si cela se reproduit chaque année, une Fourme d'Ambert ne sera donc plus vraiment une Fourme d'Ambert, selon le cahier des charges actuellement en vigueur.

L'Inrae cherche ainsi des "solutions (...) du brin d'herbe au fromage", et même plus en amont, pour adapter les cahiers des charges tout en veillant à conserver "le coeur du produit ainsi que sa qualité".

Les chercheurs travaillent sur plusieurs pistes, des mélanges microbiens pour garder les goûts et les textures des fromages, à la sélection génétique pour trouver des races de vaches moins sensibles à la chaleur.

Graines d'avenir

"A vos marques, prêts, récoltez !". Côté Office national des forêts (ONF), des enfants s'arment de pinces en bois pour attraper des glands disséminés devant eux en un temps imparti.

Le gestionnaire des 11 millions d'hectares de forêt publique a souhaité cette année au Salon sensibiliser les plus jeunes à la collecte des graines, nécessaires au reboisement des forêts durement touchées par des maladies favorisées par le changement climatique: depuis 2018, ce dépérissement a concerné 300.000 hectares, soit "30 fois la surface de Paris".

Un autre atelier met les enfants au défi d'associer trois graines à un arbre en devenir: un séquoia, un chêne ou un cèdre de l'Atlas. Des essences de diverses régions de France ou du monde qui sont actuellement testées en forêt sur de petites surfaces, les "îlots d'avenir", pour voir si elles sauront s'adapter au climat de demain.

Super-cépages

L'Institut français de la vigne et du vin (IFV) a quant à lui décidé de présenter des cépages anciens ou hybrides qui résisteront davantage aux bouleversements environnementaux que subira le monde viticole.

Ces cépages "d'avenir" disputeront "le match contre le changement climatique", explique aux visiteurs Taran Limousin, ingénieur à l'IFV.

Plusieurs variétés ont déjà des atouts, dit-il, citant l'Assyrtiko, un cépage ancien venu de Grèce qui ne redoute pas la sécheresse, ou le jeune rouge Sirano, un hybride amériricano-européen qui craint peu le mildiou et l'oïdium, deux ravageurs de la vigne.

En 2021, de fortes pluies, gelées et épisodes de grêle avaient ravagé une partie des vignobles français et européens. L'été dernier, sécheresse et chaleurs caniculaires ont conduit plusieurs AOC (Appelations d'origine controlée) du Bordelais à irriguer leurs parcelles, sur dérogation.

Table ronde cinq étoiles

Pour parler "agriculture et climat", l'école AgroParisTech a choisi de recevoir des chercheurs du Giec ou encore l'agroclimatologue Serge Zaka.

Malgré les boulversements climatiques, l'agriculture a "énormément" de solutions afin de continuer à nourrir l'humanité, selon le scientifique.

Par exemple, les panneaux solaires pour "faire de l'ombre sur les sols" et les garder humides, ou des dispositifs numériques d'"alertes" permettant aux agriculteurs d'anticiper des événements météorologiques extrêmes, évoque-t-il.

Une autre solution sera de "mélanger les variétés", comme plusieurs sortes de blé tendre aux caractéristiques différentes sur une même parcelle, pour sécuriser un rendement minimum.

Car "l'été 2022 n'était pas un ovni, mais un avant-goût palpable de ce qui nous attend", prévient Nathalie de Noblet, directrice de recherche au Commissariat à l'énergie atomique.

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