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Souffreteux avant 2020 et plombé par l'effondrement du trafic aérien international pendant la pandémie, le marché des avions gros-porteurs redécolle, Airbus et Boeing accumulant ces derniers mois les ventes et intentions de commandes des compagnies aériennes.
Au-delà de la plus grosse commande de l'histoire pour 500 moyen-courriers A320 pour la compagnie indienne IndiGo, les intentions et confirmations de commandes pour des avions long-courriers se sont accumulées, certes dans des proportions bien plus modestes, à l'occasion du salon aéronautique du Bourget.
Sur ce segment stratégique pour les avionneurs car plus rentable que les moyens-courriers, Airbus pouvait se targuer d'avoir placé depuis l'ouverture du salon lundi 52 A350 et 20 A330neo, Boeing revendiquant quant à lui 30 exemplaires du 787 Dreamliner et 10 de son futur 777X, dont les premières livraisons interviendront en 2025.
Cela sans compter sur les commandes passées en mars, et qu'il reste à finaliser, des compagnies saoudiennes Riyadh Air et Saudi pour 78 Dreamliner et 43 supplémentaires en option.
Selon le cabinet spécialisé Cirium, les signes de reprise sont apparus mi-2022 et les tarifs de location des gros-porteurs auprès des loueurs ont grimpé de 15% au premier trimestre 2023, témoignage du besoin criant des compagnies aériennes de disposer des capacités pour répondre à la reprise du trafic aérien international.
Les liaisons longue distance, longtemps pénalisées par les restrictions sanitaires imposées par les pays pendant la pandémie, ont été plus lentes à repartir que les vols moyen-courriers mais le trafic international a retrouvé en avril 84% de son niveau d'avant-crise, selon l'Association internationale du transport aérien.
Au cours des 20 prochaines années, Airbus prévoit un besoin de 8.220 nouveaux gros-porteurs, soit 20% du total d'avions neufs à livrer, une estimation similaire à celle de son concurrent Boeing.
"Le marché repart et tout le monde veut se placer", selon le président exécutif d'Airbus Guillaume Faury.
Cet appétit retrouvé pour les gros avions s'explique "pour des raisons de renouvellement de flotte ou de stratégie de développement agressive de type Turkish Airlines", explique Alain Guillot, du cabinet AlixPartners.
Dans le premier cas, la compagnie américaine United Airlines discute d'une commande qui pourrait aller jusqu'à 50 long-courriers, selon Cirium.
Turkish Airlines, qui veut positionner Istanbul en "hub" comme les compagnies du Golfe Avec Doha ou Dubaï, est elle en pourparlers pour acheter 200 gros porteurs, ainsi que 400 avions moyen-courriers, a annoncé son président Ahmet Bolat début juin.
- Augmentation des cadences -
Malgré des problèmes de production sur le 787, qui ont conduit Boeing à interrompre ses livraisons pendant près de 15 mois en 2021-2022, l'avionneur compte en livrer "entre 70 et 80" cette année.
Pour répondre à la demande, Boeing compte passer d'une cadence de 5 avions par mois à 10 à l'horizon 2025-2026. Quitte à aller plus loin?
Le géant de Seattle en produisait 14 par mois avant la pandémie, rappelle Stan Deal, patron de la division Avions commerciaux de Boeing.
"Les commandes sont très fortes. Si nous considérons qu'il s'agit d'une tendance de long terme, on prendra les mesures nécessaires" pour encore augmenter les cadences", assure-t-il.
Airbus a également planifié une augmentation de ses cadences, celle de l'A350 étant amenée à passer de 5 appareils par mois à 9 mensuels en 2025.
"On va déjà faire cela et ensuite on verra", affirme Christian Scherer, directeur commercial de l'avionneur européen, qui ne "serait pas surpris" si la question d'augmentations supplémentaires des cadences était posée.
L'analyste Richard Aboulafia, directeur général d'AeroDynamic Advisory, est lui plus circonspect sur une résurrection du marché des gros-porteurs.
"La pandémie a rappelé à tout le monde que +small is beautiful+ ou du moins beaucoup moins risqué", juge-t-il, pointant les "capacités impressionnantes des nouveaux avions monocouloirs" à long rayon d'action comme les A321 LR et XLR.
Le XLR, dont l'entrée en service est prévue en 2024, pourra transporter jusqu'à 244 passagers sur 8.700 km, des distances auparavant réservées aux gros porteurs. Il a déjà été vendu à 560 exemplaires, selon Airbus.