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Le président de Credit Suisse, Axel Lehmann, s'est dit "profondément désolé" de ne pas avoir réussi à sauver la deuxième banque de Suisse, face à des actionnaires en colère qui ont répliqué en refusant d'entériner les rémunérations des dirigeants.
"C'était une assemblée avec beaucoup d'émotions" a réagi auprès de l'AFP, Vincent Kaufmann, le directeur de la fondation Ethos, qui représente des caisses de retraites en Suisse, une dernière rencontre avec les actionnaires qui est aussi "quelque part un enterrement d'un des fleurons de l'économie suisse".
Le conseil d'administration a fait "un mea culpa", a-t-il concédé tout en soulignant que beaucoup de questions sont toutefois restées sans réponses, notamment concernant "la restitution" des bonus des anciens dirigeants et les éventuelles plaintes que le conseil d'administration pourrait intenter contre eux.
Le président du conseil d'administration, Axel Lehmann, qui avait été appelé à la rescousse début 2022 pour tenter de redesser la banque a présenté ses excuses, disant comprendre "l'amertume, la colère et le choc" des actionnaires qui ont vu leurs économies s'envoler.
La banque de 167 ans qui a aidé à bâtir le miracle économique suisse va disparaître, avec le rachat dévoilé le 19 mars par le président de la Confédération par sa rivale UBS pour 3 milliards de francs sous la pression des autorités suisses, qui craignaient un effondrement total.
- "Je suis profondément désolé" -
"Nous voulions mettre toute notre énergie et nos efforts pour renverser la situation. Cela me fait mal que nous n'ayons pas eu le temps de le faire et en cette semaine fatidique de mars, nos plans ont été contrecarrés. Et pour cela, je suis profondément désolé", a dit Lehmann, promettant de tout faire pour assurer "une transition en douceur" avec UBS.
Mais ces mots n'ont pas suffi à réconforter les 1.748 actionnaires venus en personne exprimer leur frustration, leur colère, ou simplement assister à ce moment historique.
Lors d'un vote sur les rémunérations fixes, les actionnaires ont sanctionné les dirigeants au porte-monnaie. Ils avaient déjà renoncé à leur bonus, le vote sur les rémunérations fixes n'a obtenu que 48,43% de votes favorables (et 48,21% contre), ne passant la barre des 50% nécessaires pour être enterinée.
Pendant 5 heures, les actionnaires se sont succédé à la tribune pour multiplier les reproches, sans cris ni huées à part un bref éclat de voix.
"Je porte une cravate rouge parce que je suis rouge de colère", a lancé le premier intervenant sans se départir de son calme. "L'action vaut à peine le prix d'un bonbon", a lancé un petit porteur.
A l'extérieur, des organisations environnementales avaient dressé une coque de bateau - le Crisis Suisse - symbolisant la banque en train de couler.
"J'ai perdu 10.000 francs suisses (10.047 euros, NDLR)", a expliqué à l'AFP Stephan Denzler. "Pour ma famille, c'est beaucoup d'argent", explique-t-il, "parfois j'en ris, d'autres fois, je suis très en colère".
"Je trouve que c'est un scandale ce qu'a fait le gouvernement fédéral avec sa décision d'invoquer l'état d'urgence", lance à l'AFP Albert Keel, qui, comme tous les autres, a été privé de vote sur le rachat de sa banque par le gouvernement au nom de l'intérêt supérieur de la place financière.
"J'ai acheté récemment et j'ai tout perdu", explique cet actionnaire - "une somme à six chiffres" - en misant sur le succès du plan de restructuration présenté à l'automne.
- Responsables, coupables? -
Pour Jeanne Martin, coordinatrice des assemblées générales chez ShareAction - organisation qui milite pour des investissements responsables - il était "important que cette assemblée générale se tienne pour porter la voix de la société civile".
Au fil des scandales, l'action de Credit Suisse avait perdu 80% de sa valeur en deux ans, mais sa chute s'est brusquement accélérée le 15 mars (jusqu'à moins 30%) face à la perte de confiance des investisseurs et bailleurs de fonds.
Malgré le prix dérisoire atteint par le titre, les actionnaires ne recevront que l'équivalent de 0,76 franc par action, soit tout juste 0,59% de sa valeur à la clôture à l'issue d'une semaine chaotique en Bourse.
L'Assemblée générale de Credit Suisse à peine terminée, l'attention se tourne vers UBS qui tient mercredi son assemblée générale à Bâle.