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Le Sénat a voté peu après minuit mercredi le décisif article 7 reculant l'âge de départ à la retraite à 64 ans, tandis que les syndicats qui demandaient à rencontrer le président se sont vu opposer porte close par Emmanuel Macron.
Salué par quelques applaudissements à droite, le vote reportant de 62 à 64 ans l'âge de départ a été acquis par 201 voix contre 115, sur 345 votants. "Je me réjouis que les débats aient permis de parvenir à ce vote", a tweeté Elisabeth Borne.
Silencieuse depuis le début de l'examen du texte, jeudi dernier, la majorité sénatoriale a sorti sur cet article depuis la nuit dernière l'artillerie lourde du règlement pour accélérer les débats face à "l'obstruction" de la gauche. Celle-ci s'est indignée d'un "coup de force".
"Vous bâclez le débat", "la prétendue sagesse du Sénat en a pris un coup", a critiqué la cheffe des sénateurs communistes Eliane Assassi. "Jamais nous n'accepterons que vous mélenchonisiez le Sénat", a rétorqué son homologue des Républicains Bruno Retailleau.
Les débats à la chambre haute reprendront jeudi à 10H30 autour d'un amendement polémique de M. Retailleau qui plaide pour que l'extinction progressive des régimes spéciaux, votée à l'article 2, s'applique aux salariés déjà en poste.
De son côté, l'intersyndicale, qui veut continuer à mettre la pression avec une nouvelle mobilisation samedi et la multiplication des actions, a demandé à être reçue "en urgence" par le chef de l'Etat "pour qu'il retire sa réforme".
"La porte du ministre du Travail, Olivier Dussopt, reste toujours ouverte", leur a répondu mercredi la Première ministre au Sénat, assurant que "le gouvernement est toujours prêt et ouvert au dialogue", et que c'est "dans la concertation et dans le dialogue que ce texte a été construit".
Plus tôt, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran avait expliqué que le président de la République "respectait les institutions (...) aujourd'hui, c'est le temps parlementaire qui a cours".
"Ce serait une erreur si le président recevait" les syndicats, qui "veulent re-personnaliser le débat autour de +pour ou contre le président+", a estimé une source gouvernementale. "Le président n'a pas à entrer là-dedans."
- Dissensions -
Emmanuel Macron, qui avait fait de la réforme un pilier de son programme présidentiel, est resté en retrait depuis sa présentation début janvier, laissant la Première ministre et son gouvernement en première ligne.
Elisabeth Borne compte sur un vote des Républicains pour éviter d'utiliser le 49.3 (adoption d'un texte sans vote), qui serait perçu comme un passage en force. D'autant que, de l'aveu même d'Olivier Véran, le projet "n'emporte pas l'adhésion d'une majorité de Français".
C'est pourquoi Emmanuel Macron devra "reformuler un projet pour le pays" et ainsi "ouvrir une page nouvelle" du quinquennat à l'issue de la réforme des retraites, a jugé mercredi le président du MoDem François Bayrou.
Chez LR, des dissensions persistent, alimentées par une rencontre mercredi entre le député Aurélien Pradié et le leader de la CFDT, Laurent Berger. Celui qui a récemment perdu son statut de numéro 2 refuse toujours de voter en l'état le texte "qui pénalise les travailleurs".
La majorité saura-t-elle se montrer unie ? Ne pas voter la réforme serait "déloyal", a prévenu sur FranceInfo la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, à l'intention des élus macronistes récalcitrants.
- Femmes -
Le gouvernement espère ainsi obtenir rapidement une première victoire avec le vote par la chambre haute de l'ensemble du texte d'ici la date butoir de dimanche. Devrait alors s'ensuivre une commission mixte paritaire réunissant plusieurs sénateurs et députés.
S'ils s'accordent sur un texte, l'adoption définitive de la réforme pourrait intervenir le 16 mars.
L'exécutif parie aussi sur un essoufflement du mouvement social.
"La France n'est pas à l'arrêt" comme promis par les syndicats et "on est très loin du record" que les syndicats "revendiquent", relativisait-on de source gouvernementale.
Les syndicats ont fait descendre dans la rue mardi 1,28 million de manifestants selon la police, 3,5 millions d'après la CGT. Mais les taux de grévistes sont restés en-deçà des records, tandis que la circulation des trains et métro parisiens s'améliorait mercredi.
La circulation des trains restera encore "fortement perturbée" jeudi, selon la SNCF, mais celle des transports parisiens s'améliorera, selon la RATP.
Mercredi, des manifestations de moindre ampleur ont eu lieu en lien avec la Journée internationale des droits des femmes.
"Celles qui vont payer le plus de cette réforme, ce sont les femmes qui subissent le plus les carrières hachées et les contrats précaires", a lancé le leader des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon à Marseille.
Selon les secteurs, des blocages étaient en cours dans plusieurs grands ports d'après la CGT. Des routes ont été bloquées et, partiellement, plusieurs établissements d'enseignement à travers le pays.
La CGT-Chimie a affirmé que les expéditions de carburants étaient toujours bloquées à la sortie des raffineries, où le ministre des Transports, Clément Beaune, a menacé de faire intervenir les forces de l'ordre.