Accueil Actu Monde International

Soudan: violents combats à Khartoum et au Darfour malgré la trêve

Les combats meurtriers opposant des paramilitaires à l'armée sont entrés jeudi dans leur treizième jour au Soudan où la capitale Khartoum et la région du Darfour sont désormais en proie au chaos des bombes malgré un cessez-le-feu.

Des avions militaires survolent la banlieue nord de Khartoum où les troupes des deux généraux en guerre pour le pouvoir échangent des tirs à la mitrailleuse et à l'arme lourde, rapportent des témoins à l'AFP, en dépit de la trêve de 72 heures conclue sous l'égide des Etats-Unis et de l'Arabie saoudite, qui a débuté mardi.

Les violences ont fait au moins huit morts pour la seule journée de mercredi, selon le syndicat des médecins.

Les nombreuses tentatives de faire taire les armes ont échoué depuis le début du conflit le 15 avril entre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, et les très redoutés paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, dit "Hemedti".

Mercredi soir, l'armée a annoncé avoir accepté d'envoyer un représentant à Juba, la capitale du Soudan du Sud voisin, pour des pourparlers avec les FSR "à l'initiative de l'IGAD", bloc régional d'Afrique de l'Est.

Le général Burhane a dit accepter de discuter d'une prolongation de la trêve de 72 heures qui doit s'achever jeudi à minuit et a été globalement peu respectée.

Les paramilitaires n'ont de leur côté pas commenté cette initiative régionale.

Selon le ministère soudanais de la Santé, au moins 512 personnes ont été tuées et 4.193 blessées depuis le début du conflit, mais le bilan est vraisemblablement beaucoup plus élevé.

La situation à Khartoum est "extrêmement mauvaise", raconte à l'AFP Chaaban, un ressortissant syrien qui attend son évacuation depuis Port-Soudan: "On veut juste aller en toute sécurité à Jeddah (en Arabie saoudite) ou en Syrie. On veut juste quitter le Soudan".

- "Votre guerre, pas la nôtre" -

Au-delà de la capitale, les violences déchirent depuis le début d'autres régions, notamment le Darfour-Ouest.

Pillages, meurtres et incendies de maisons ont lieu à El-Geneina, chef-lieu de cette région frontalière du Tchad et théâtre dans les années 2000 d'une guerre particulièrement sanglante, selon l'ONU.

Quelque 50.000 enfants "souffrant de malnutrition aiguë" y sont privés d'aide alimentaire, alertent les Nations Unies, qui ont dû interrompre leurs activités après la mort de cinq humanitaires.

Les combats ont provoqué un exode massif dans ce pays de 45 millions d'habitants, l'un des plus pauvres au monde.

En route vers la frontière avec l'Egypte voisine, Achraf, un Soudanais fuyant Khartoum, appelle les deux généraux à "cesser la guerre". "C'est votre guerre, pas celle du peuple soudanais", dit cet homme de 50 ans, rencontré par l'AFP dans le désert.

Ceux restés au Soudan doivent composer avec les pénuries de nourriture, d'eau et d'électricité ainsi que les coupures d'internet et des lignes téléphoniques.

Plusieurs dizaines de milliers de personnes sont déjà arrivées dans les pays frontaliers, notamment l'Egypte au nord et l'Ethiopie à l'est, selon l'ONU. Et, au total, 270.000 personnes pourraient fuir au Tchad et au Soudan du Sud.

- "Partez maintenant" -

Ces derniers jours, plusieurs pays ont organisé des évacuations. Mercredi, la marine française a encore acheminé près de 400 personnes de différentes nationalités alors que la Chine a dépêché des navires pour évacuer ses ressortissants.

Londres a de son côté appelé ses citoyens à "partir maintenant", avant la fin du cessez-le-feu, relativement respecté dans les couloirs d'évacuation.

Jusqu'ici, 14 hôpitaux ont été bombardés, selon le syndicat des médecins, et 19 autres ont été évacués de force à cause de tirs, de manque de matériel et de personnel ou parce que des combattants y avaient pris leurs quartiers.

Dans le chaos général, des centaines de détenus se sont évadés de trois prisons, en particulier l'établissement de haute sécurité de Kober, qui accueillait le premier cercle de l'ancien dictateur Omar el-Béchir, recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour "crimes de guerre" et "crimes contre l'humanité" au Darfour.

Détenu dans un hôpital militaire en raison de son état de santé, selon l'armée, l'ex-président Béchir, âgé de 79 ans, a été limogé par l'armée en avril 2019 sous la pression d'un grand soulèvement populaire.

Douchant les espoirs d'une transition démocratique, les deux généraux avaient évincé ensemble les civils du pouvoir en 2021, avant d'entrer en guerre, ne parvenant pas à s'accorder sur l'intégration des paramilitaires à l'armée.

À lire aussi

Sélectionné pour vous