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Il y a quelques jours, notre Premier ministre Bart De Wever a rappelé à la Chambre que la Belgique ne marquera « jamais son accord » sur la libération des actifs russes immobilisés sans garanties juridiques solides ni garanties sur l’ensemble du montant.
Comment expliquer cette réticence ? C’est d’abord une question de respect du droit international. Ces avoirs russes sont gelés à Bruxelles temporairement depuis le début de la guerre. Ils sont gelés et non confisqués. Utiliser ces avoirs, c’est exposer la Belgique à des sanctions financières colossales. La Russie pourrait réclamer son dû devant un tribunal international et faire condamner notre pays.
Enfin, la Belgique joue ici sa crédibilité sur la place financière internationale. Dans une tour de verre en plein de cœur de Bruxelles, Euroclear est une institution qui gère les actifs russes : 194 milliards d’euros sont gelés. Ils bénéficient d’une protection juridique stricte.
« Le gel signifie que les sommes sont gelées en Belgique en attendant une évolution de la situation. Un gel ne signifie pas une confiscation. Une confiscation signifierait qu’on peut faire tout ce qu’on veut avec l’argent. Ça n’est pas le cas. », indique Tanguy de Wilde, professeur de géopolitique à l’Université catholique de Louvain.
La Russie pourrait porter plainte contre la Belgique
L’Europe envisage malgré tout de se servir de cet argent russe pour soutenir l’Ukraine. Une décision qui pourrait faire basculer la Belgique dans un gouffre financier. « Donner ces capitaux qui appartiennent à la Russie pour l’Ukraine, ou tout simplement que l’Europe se serve dedans, on est dans une situation inédite de violation du droit international et la Russie pourrait porter plainte contre la Belgique. Ça pourrait coûter quelques centaines de milliards d’euros à la Belgique qui devrait non seulement restituer les capitaux, mais également payer des dommages et intérêts », détaille Sébastien Boussois, chercheur en Sciences politiques, directeur de l’institut géopolitique européen.
Bruxelles potentiellement condamnée par Moscou, ce serait une ironie de l’histoire. « Tout ça peut paraître complètement paradoxal puisque la Russie passe son temps à violer le droit international. Mais, en fait, on est aujourd’hui dans un système où l’Europe s’arc-boute sur le droit international et sur les institutions qui sont censées les défendre parce qu’on en est à l’origine et on continue à défendre ça. Ce qui doit être fait. Mais on a en face de nous des pays qui jouent sur les deux tableaux », explique Sébastien Boussois
Enfin, la Belgique joue ici sa réputation sur la place financière internationale. « La Belgique, c’est un mantra, dans sa politique étrangère, respecte toujours le droit international. Ici, on serait en marge du droit international. Le monde entier pourrait se dire qu’il n’y a plus guère d’intérêt à déposer de l’argent en Belgique. Quand il y a un manque de crédibilité, il y a un manque d’instabilité. Or, les investisseurs détestent l’instabilité », souligne Tanguy de Wilde, professeur de géopolitique à l’Université catholique de Louvain.
Bart De Wever, Premier Ministre, maintient donc sa position : il n’est pas question que la Belgique soit seule à assumer les conséquences en cas de libération de ces actifs russes. Elles doivent être supportées par l’ensemble des pays de l’Union européenne, dit-il. Un sommet des 27 devrait trancher la question à la mi-décembre.


















