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Une poignée de femmes ont été invitées à participer au synode des évêques sur les jeunes ce mois-ci au Vatican, mais leur voix reste marginale et aucune n'aura le droit de voter sur le texte final.
Réunis en mars pour un "pré-synode", des jeunes du monde entier avaient pourtant truffé leur document final de références à la perplexité des filles sur leur place dans l'Eglise.
"Les jeunes ont l'impression que les femmes n'ont pas un rôle clair dans l'Eglise. S'il est difficile pour eux d'avoir un sentiment d'appartenance et de leader dans l'Eglise, c'est encore plus compliqué pour les jeunes femmes", écrivaient-ils.
Aussi Sr Maria Luisa Berzosa, religieuse espagnole à la bonne humeur contagieuse, s'est-elle réjouie d'être invitée en tant qu'experte.
"L'Eglise ne nous ouvre pas beaucoup la porte, donc si je vois une toute petite fente, je vais passer par là, même s'il faut beaucoup d'équilibre et de contorsions", raconte-t-elle.
Malgré tout, cela a été un choc pour elle de se retrouver au milieu d'une marée de soutanes: "Je m'imaginais bien qu'il y aurait peu de femmes, mais je ne pensais pas qu'il y en aurait si peu".
Elles sont tout juste 35, dont une douzaine de religieuses, soit même pas 10% des participants.
- Pauses café -
Lucetta Scaraffia, théologienne et responsable du supplément féminin du journal du Vatican l'"Osservatore romano", n'est pas étonnée: "Il y a une tendance à ne jamais donner d'échos à la parole des femmes", explique-t-elle à l'AFP.
Invitée comme experte au dernier synode en 2015 sur la famille, elle avait dénoncé dans une tribune incendiaire "la parfaite ignorance" et l'indifférence générale de la plupart des participants quant aux réalités des femmes.
Cette année, les commentaires des participantes sont plus positifs. Beaucoup assurent être écoutées, que ce soit en séance plénière, dans les petits groupes répartis par langue et pendant les pauses café.
"Jusqu'à présent, je ne me sens pas une participante de série B. Et même, peut-être parce que nous sommes peu nombreuses, nous sommes très écoutées. Je me sens à l'égal des autres. Je peux proposer, écrire, dialoguer", assure Sr Alessandra Smerilli, religieuse italienne et économiste.
Mais aucune ne cite de résultat concret de leurs interventions. Et lorsqu'il s'agira de voter le document final, toutes devront passer leur tour.
Historiquement, il fallait être prêtre pour voter. Mais depuis 2015, des frères non ordonnés prêtres, présents parmi les représentants des supérieurs généraux des congrégations masculines, ont pu voter.
Une pétition a été lancée la semaine dernière pour que ce droit soit aussi accordé à leurs homologues féminines. "Les femmes font partie de la solution aux graves problèmes de l'Eglise", fait valoir ce texte qui a recueilli plus de 7.000 signatures.
- Participer aux décisions -
En réponse, beaucoup ont rappelé que le synode n'était pas un Parlement mais avant tout une réunion consultative des évêques.
"Je pense que la présence des femmes est claire, nous les écoutons. Mais Jésus a choisi des apôtres hommes (...), je n'y peux rien", a ainsi expliqué l'évêque néerlandais Everardus Johannes de Jong.
Mais selon les résumés des débats fournis à la presse, d'autres "pères synodaux" ont consacré leur temps de parole à évoquer la nécessité de "lutter contre une culture machiste" au sein de l'Eglise ou pour proposer la création d'un conseil pontifical des jeunes qui pourrait être dirigé par une femme.
Et les supérieures générales ont le soutien des frères. Ainsi Bruno Cadoré, supérieur des dominicains, a estimé que les 10 représentants des ordres religieux devraient compter huit femmes puisqu'il y a 20% de frères et 80% de soeurs.
Au-delà du vote, "ce que nous voulons vraiment c'est une plus grande participation dans les espaces de décision au sein de l'Eglise", explique Sr Sally Hodhgon, religieuse américaine invitée comme auditrice, unique supérieure générale d'une congrégation féminine présente à ce synode.
"Le pape dit qu'il veut des femmes autour de la table pour prendre les décisions. Nous voulons que toute l'Eglise participe et aide à prendre de bonnes décisions", ajoute-t-elle, en incluant tous les laïcs, hommes et femmes.
Installée depuis huit ans à Rome, elle assure avoir constaté une évolution positive. "Il y a plus de femmes qui participent aux décisions (...). Est-ce que c'est lent ? Oui. Mais tout à Rome est lent", rappelle-t-elle.