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L’imam Toujgani, figure bien connue de la communauté musulmane à Bruxelles, avait reçu en 2021 un ordre de quitter le territoire. La Sûreté de l’État évoquait alors des soupçons liés à des discours jugés potentiellement radicaux. Mais aucune procédure judiciaire n’avait été entamée à son encontre.
Ce lundi, il est revenu en Belgique, accueilli chaleureusement à l’aéroport avec des fleurs, des ballons et des embrassades. Entre-temps, il a obtenu la nationalité belge, ce qui rend son retour parfaitement légal. Selon la justice, les soupçons qui avaient motivé son expulsion n’étaient pas fondés.
Des critiques sur les conditions d’obtention de la nationalité
Ce retour n’a pas manqué de faire réagir. Le MR, par la voix de son président Georges-Louis Bouchez, a dénoncé une situation « surréaliste », mettant en avant que l’imam ne parle aucune des langues nationales. Une manière de pointer du doigt ce que certains perçoivent comme un dysfonctionnement dans le parcours d’intégration.
En Belgique, la maîtrise d’une des trois langues nationales – le français, le néerlandais ou l’allemand – est effectivement une condition exigée dans la majorité des procédures d’acquisition de la nationalité. Cette compétence est en principe vérifiée à travers l’attestation de fin de parcours d’intégration, qui inclut une formation linguistique et sociale.
Des exceptions prévues par la loi
Cependant, la législation prévoit aussi des exceptions. Des personnes en situation de handicap ou d’invalidité reconnue, des mineurs, ou encore certains cas dits de « mérite exceptionnel », peuvent obtenir la nationalité sans remplir toutes les conditions habituelles. Ces cas restent cependant marginaux.
Dans le dossier de l’imam Toujgani, c’est la justice qui a tranché. Après une longue procédure, la Cour de cassation a validé sa naturalisation, malgré les objections du Secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration et les mises en garde de la Sûreté de l’État.
Une mise en cause des pratiques des services de renseignement
L’affaire met également en lumière le fonctionnement des services de renseignement belges. Le Comité R, chargé de contrôler ces services, a examiné le dossier Toujgani. Ses conclusions sont sévères : il pointe un « manque de nuances » et reproche à la Sûreté de l’État d’avoir utilisé des informations anciennes, sans contextualisation.
Ce constat soulève des questions sur la fiabilité des données ayant conduit à une expulsion très médiatisée, mais aussi sur une possible instrumentalisation politique. Le Comité R ne désigne aucun responsable en particulier, mais laisse entendre que certaines décisions pourraient avoir été prises sous des influences extérieures à la sécurité nationale.
L’imam Toujgani, désormais citoyen belge, retrouve donc son pays d’accueil. Son retour marque aussi un nouvel épisode dans un débat récurrent : celui de l’équilibre entre sécurité, intégration et droits fondamentaux.
















