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Charles de Gaulle continue de faire recette chez les éditeurs cinquante ans après sa mort, avec depuis la rentrée pas moins d'une vingtaine d'ouvrages consacrés à cette figure historique d'une richesse inépuisable.
"L'attraction qu'il exerce encore est incontestable: il suffit de regarder les sondages. La popularité de De Gaulle en tant qu'homme du 18-Juin est sans équivalent dans l'histoire, et c'est surtout ça qu'on retient", explique à l'AFP Eric Roussel, auteur de "De Gaulle monument français".
Cet essayiste et journaliste republie également sa biographie, "De Gaulle", actualisée en consultant des archives comme celle de son Premier ministre Georges Pompidou.
D'après lui, les publications du cinquantenaire de sa mort ne renouvellent pas fondamentalement l'historiographie gaullienne. Mais elles démontrent combien le personnage reste présent.
"Il m'apparaît comme un monument qu'on admire de loin. Il y a un rapport assez ambigu avec lui: on peut se demander si les Français n'admirent pas de Gaulle tout en sachant qu'ils auraient du mal à le supporter, parce qu'ils le trouveraient autoritaire", ajoute-t-il.
- Souci du mot juste -
La journaliste du Monde Raphaëlle Bacqué s'est pour sa part plongée dans "De Gaulle président: dix ans d'archives inédites de l'Elysée".
"Il intéresse surtout les Français qui ont connu cette époque, mais pas seulement. Moi qui étais trop jeune, j'ai été frappée par la modernité de son exercice du pouvoir", confie l'autrice. "Pour avoir suivi d'autres présidents, j'ai remarqué son attention à la communication. Ses discours très largement raturés montrent à quel point il est préoccupé de la trace qu'il va laisser".
Par exemple, le manuscrit d'un discours d'accueil au président américain John Fitzgerald Kennedy en 1961 dénote d'un souci maniaque du mot juste. Quelques pages plus loin, on voit le général, en novembre 1963, se recueillir avec un salut militaire devant le cercueil du président assassiné.
Dans "De Gaulle inattendu", d'autres archives font surface, ainsi que des textes de nombreux auteurs sur les différentes facettes d'un homme à la très longue carrière.
- "Père et symbole" -
L'écrivain Paul Claudel, qui adhérait à son parti, le RPF, lui écrit par exemple en 1951: "La France est impuissante à elle seule à résister au monstre soviétique. A tout prix et d'urgence, il faut constituer une Europe". De Gaulle répond: "Je ne cesserai pas de combattre, comme je le fais depuis douze ans, tous les faux-semblants, qui donnent aux naïfs et aux faibles des prétextes pour leur paresse et détournent notre pays de faire la rude politique du salut public et européen".
Certains titres couvrent des aspects particuliers du personnage, depuis "Ils détestaient de Gaulle" jusqu'à "De Gaulle et les communistes", en passant par "De Gaulle et la Haute-Marne", le département où il est décédé le 9 novembre 1970.
Patrice Gueniffey, historien, s'intéresse à "Napoléon et de Gaulle: deux héros français". "Ce sont des personnages inépuisables, des figures dont on se dit: plus ça va mal, plus on les admire", remarque-t-il, interrogé par l'AFP.
"Aujourd'hui, toutes les droites, et presque toutes les gauches, l'ont adopté. Mis à part éventuellement les communistes, tout le monde est devenu gaulliste, si l'on considère le père et symbole de la Nation. Il incarne aussi une droiture, celle de l'homme qui payait ses factures quand il habitait à l'Elysée, alors que la Cinquième République, là-dessus, a un peu, voire beaucoup dérivé".