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Liban: le nouveau Premier ministre promet un gouvernement de technocrates

Le Premier ministre libanais désigné Hassan Diab a assuré vendredi vouloir former un gouvernement de "technocrates indépendants" pour faire face à la grave crise économique que connaît le pays, comme l'exigent les manifestants.

Agé de 60 ans, Hassan Diab, un universitaire et ancien ministre de l'Education peu connu du grand public, a été désigné jeudi au terme de consultations parlementaires, plus de deux mois après le début d'un mouvement de contestation sans précédent contre l'ensemble de la classe dirigeante, accusée de corruption et d'incompétence.

Alors que le sous-secrétaire d'Etat américain aux Affaires politiques, David Hale, en visite au Liban, a appelé à un gouvernement engagé "en faveur de réformes", M. Diab a promis de "former un gouvernement de technocrates indépendants".

Le Premier ministre désigné a aussi appelé les manifestants à lui "accorder une chance" pour former un "gouvernement exceptionnel" et promis de rencontrer dès dimanche "divers représentants" du mouvement de protestation.

Mais l'appui apporté à sa désignation par le puissant mouvement chiite Hezbollah et ses alliés --dont le parti du président Michel Aoun-- a attisé la colère de la rue, notamment des sunnites, qui y voient une marginalisation de leur communauté, à laquelle revient le poste de Premier ministre dans ce pays multiconfessionnel.

Bien que sunnite lui-même, M. Diab n'a reçu le soutien que de six députés sunnites, sur les 69 ayant voté en sa faveur lors des consultations.

L'ex-Premier ministre Saad Hariri n'a pas publiquement apporté son soutien à son successeur, tandis que le Courant du Futur, le parti qu'il préside, "ne participera pas au prochain gouvernement", selon une source proche.

M. Diab a rencontré son prédécesseur ainsi que d'autres figures politiques sunnites vendredi.

- Colère des sunnites -

Pour le deuxième soir d'affilé, dans un quartier majoritairement sunnite de l'ouest de Beyrouth, des heurts ont eu lieu entre les forces de sécurité et une foule de jeunes hommes, majoritairement des supporters de M. Hariri, qui tentaient de bloquer les routes, selon des journalistes de l'AFP.

Des manifestants ont scandé des slogans contre M. Diab, avant de lancer des pierres et des feux d'artifice sur des militaires qui essayaient de rouvrir une voie bloquée et la police antiémeutes a répliqué avec des gaz lacrymogènes, selon la même source.

A Tripoli, une ville du nord majoritairement sunnite, les manifestants ont bloqué les routes en appelant à la grève générale et des écoles ont fermé, selon un correspondant de l'AFP.

Les manifestants ont aussi coupé des axes routiers dans plusieurs régions du nord, dont celle d'Akkar, et de l'est, en mettant le feu à des pneus et en alignant des bennes d'ordures, d'après l'agence nationale de presse Ani.

Dans l'après-midi, des manifestants ont bloqué la route entre les villes côtières de Naamé et Khaldé, au sud de Beyrouth, avant que l'armée ne rouvre la voie.

M. Hariri a appelé ses partisans à la retenue. "Celui qui m'aime vraiment, qu'il déserte la rue immédiatement", a-t-il écrit sur Twitter.

L'ex-Premier ministre, considéré comme le dirigeant de la communauté sunnite et pressenti jusqu'à récemment pour diriger le prochain gouvernement, a jeté l'éponge mercredi après des semaines de tractations politiciennes.

- Soutien occidental -

"C'est ridicule" d'affirmer que le prochain gouvernement sera dominé par le Hezbollah", a assuré de son côté M. Diab dans une interview vendredi à la radio internationale allemande Deutsche Welle.

Il a par ailleurs ajouté s'attendre au "soutien total des Européens et des Etats-Unis", notamment en cas de formation d'un "gouvernement exceptionnel (...) qu'il s'agisse du nombre de technocrates ou de celui des femmes".

Certains observateurs craignent que l'appui du Hezbollah pro-iranien ne compromette l'envoi d'aides cruciales, notamment celles des pays occidentaux, dont les États-Unis, qui qualifient le Hezbollah d'"organisation terroriste".

Depuis des mois, le Liban est en proie à l'une de ses pires crises socio-économiques et financières depuis la fin de la guerre civile (1975-1990).

La communauté internationale a conditionné toute nouvelle aide financière à la formation d'un cabinet réformateur.

Vendredi, David Hale, numéro trois de la diplomatie américaine, a rencontré M. Hariri, M. Aoun et le chef du Parlement Nabih Berri et a exhorté les autorités libanaises à "agir dans l'intérêt national, à faire progresser les réformes et à former un gouvernement engagé en faveur de ces réformes".

"Nous sommes prêts à aider le Liban à rentrer dans une nouvelle phase de prospérité économique caractérisée par la bonne gouvernance et l'absence de corruption", a-t-il déclaré.

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