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Elle a traversé deux océans avec Jacques Brel il y a un demi-siècle pour rallier les îles Marquises. Maddly Bamy, compagne de la fin de vie du chanteur, replonge dans cette aventure à l'occasion du baptême du navire Askoy II entièrement rénové.
Samedi, Maddly Bamy est attendue au port de Zeebruges, en Belgique, au côté de Piet et Gustaaf Wittevrongel, les deux frères flamands à l'origine de cette remise à l'eau. "Un rêve extraordinaire qu'ils ont fini par réaliser", déclare-t-elle, admirative, à l'AFP.
L'ancienne danseuse et actrice guadeloupéenne, qui vit désormais dans le Morbihan (ouest de la France), sera l'invitée d'honneur de la cérémonie. Même si elle assure que les hommages doivent d'abord être destinés au duo Wittevrongel, parvenu à restaurer cette pièce du patrimoine maritime au terme d'un parcours chaotique de 17 ans, sans aides publiques ou presque.
"Quand on pense à l'état de ce bateau quand ils l'ont retrouvé. C'est énorme ce qu'ils ont fait. Il a fallu lutter pour aller jusqu'au bout", insiste Maddly Bamy.
Pour Jacques Brel (1929-1978), l'aventure de l'Askoy II commence en 1974, quand il largue les amarres depuis le port d'Anvers en emmenant avec lui Maddly et sa fille France, qui quittera le navire au bout de six mois, dans les Antilles françaises.
La traversée s'avère mouvementée, Brel découvre qu'il est atteint d'un cancer et doit faire plusieurs allers et retours en Europe pour être soigné.
L'auteur de "Ne me quitte pas" ne renonce pas pour autant et jette finalement l'ancre aux Marquises, en Polynésie, où il passe les dernières années de sa vie avec Maddly Bamy, loin de sa famille.
Aujourd'hui, près de 46 ans après la disparition de Brel (en octobre 1978), Maddly Bamy se dit encore "connectée à lui 24 heures sur 24, tous les jours".
"Je me mets au piano et il chante en moi", confie-t-elle dans un entretien téléphonique.
- "Je lâche tout, je traverse le monde" -
Le voyage aux Marquises avec l'Askoy II, voilier de 19 mètres, lourd et exigeant, pour lequel elle avait elle-même appris les bases de la navigation, a été la preuve de l'"immensité des rêves" de l'icône belge.
"C'est un homme qui ne voulait pas rester en place, il voulait aller voir ailleurs comment vivent les autres. Il est parti en se disant +je lâche tout, je traverse le monde s'il le faut+", poursuit Maddly Bamy, 80 ans.
La vie du bateau ne s'arrête pas quand Brel décide de le vendre en Polynésie, pour se reconvertir en pilote d'avion amateur.
Avec au moins trois propriétaires aux commandes, l'Askoy II vogue ensuite vers la Californie et les îles Fidji, avant de s'échouer sur une plage de Nouvelle-Zélande.
C'est là qu'arrivent les frères Wittevrongel, depuis toujours intimement liés à l'aventure maritime de Brel puisque c'est dans la voilerie familiale, à Blankenberge, que ce dernier est venu s'équiper avant de partir.
Quand Piet et Gustaaf apprennent dans les années 2000, au détour d'une conversation sur Brel, que la trace du bateau a été retrouvée aux antipodes, ils décident de le rapatrier vers le littoral belge.
Décrit dans les années 60 par les spécialistes comme un des plus beaux yachts du monde, le voilier n'est alors plus qu'une coque vide, rongée par la rouille.
Samedi à Zeebruges, l'Askoy II ne sortira pas forcément du port pour naviguer, mais Piet Wittevrongel assure qu'en plus de la coque et des boiseries intérieures flambant neuves, les mâts sont désormais dressés pour hisser les voiles, "une rénovation complète".