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Chypre élit son président sur fond d'inflation et de corruption

Les Chypriotes ont commencé à voter dimanche pour élire leur président, préoccupés par les scandales de corruption et l'inflation galopante, plus que par la réunification de l'île méditerranéenne divisée depuis près d'un demi-siècle.

Quatorze candidats, dont trois font la course en tête, se présentent face à plus de 561.000 électeurs dans la partie sud de l'île pour succéder au président de droite Nicos Anastasiades.

Selon les sondages, aucun candidat ne serait en mesure de remporter la majorité absolue. Un second tour serait alors organisé le 12 février.

Les 1.113 bureaux de vote ont ouvert à 07H00 (05H00 GMT) et ferment à 18H00 (16H00 GMT) avec une pause d'une heure en milieu de journée.

"Le vote a commencé sans entrave", a déclaré le directeur du scrutin, Costas Constantinou.

Membre de l'Union européenne depuis 2004, Chypre est divisée depuis l'invasion par la Turquie en 1974 du tiers nord de l'île, en réponse à un coup d'Etat de nationalistes chypriotes-grecs qui souhaitaient rattacher le pays à la Grèce.

Le gouvernement chypriote-grec n'exerce son autorité que sur la partie sud de l'île, séparée par une zone démilitarisée sous contrôle de l'ONU, appelée Ligne verte, de la République turque de Chypre-Nord (RTCN), autoproclamée et reconnue seulement par la Turquie, où vivent les Chypriotes-turcs.

Nikos Christodoulides, qui se présente comme "indépendant", est donné favori. Ce diplomate de 49 ans, soutenu par les partis centristes, a été ministre des Affaires étrangères du président Anastasiades entre 2018 et 2022.

Ses principaux adversaires sont Andreas Mavroyiannis, un diplomate de 66 ans soutenu par le parti communiste Akel, ancien chef des négociateurs chypriotes-grecs dans les pourparlers sur la réunification (2013-2022), ainsi qu'Averof Neofytou, 61 ans, leader du parti conservateur au pouvoir, Disy.

Hubert Faustmann, professeur de politique et d'histoire à l'Université de Nicosie, parle d'un scrutin "étrange" où "les trois favoris sont liés à l'actuel président", qui à 76 ans achève deux mandats de cinq ans.

- Corruption et migrants -

Premier défi pour le nouveau dirigeant: l'inflation, qui a atteint 10,9% en 2022. Malgré un ralentissement en janvier, à 7,1%, la hausse des prix, notamment de l'énergie et de la nourriture, reste en tête des préoccupations et le pays a connu fin janvier une grève générale.

La lutte contre la corruption a dominé aussi le débat électoral, notamment après le scandale des "passeports en or". Ce programme d'octroi de passeports contre des investissements sur l'île a dû être annulé en raison d'allégations de corruption, entachant l'image du gouvernement de M. Anastasiades.

Nikos Christodoulides ne semble toutefois pas avoir été éclaboussé. "L'explication qu'il a donnée semble plausible pour la population, il a dit ne pas avoir de responsabilité directe", souligne Andreas Theophanous, du Cyprus Center for European and International Affairs.

"La corruption est au coeur du débat, comme l'économie et la vie quotidienne. Le problème de Chypre (la division, ndlr) est un sujet secondaire", estime Giorgos Kentas, professeur associé de relations internationales à l'Université de Nicosie.

Autre sujet sensible sur cette île de l'est de la Méditerranée, proche des côtes du Moyen-Orient et de la Turquie: l'afflux de migrants, pour lequel les candidats ont promis d'agir. Les autorités affirment que 6% des 915.000 personnes vivant dans le sud de l'île sont des demandeurs d'asile.

- Pourparlers à l'arrêt -

Selon des chiffres de l'UE, Chypre détient le deuxième taux le plus élevé de primo-demandeurs d'asile par rapport à sa population dans l'Union européenne, derrière l'Autriche.

Le gouvernement reproche à la Turquie d'orchestrer une bonne partie de l'arrivée des réfugiés originaires de Syrie et de migrants d'Afrique subsaharienne via la Ligne verte.

Le futur chef d'Etat sera justement appelé à relancer les pourparlers de paix, au point mort depuis 2017, pour mettre fin à la division de l'île.

Sur ce dossier, M. Christodoulides est considéré comme un "faucon" et souhaite que l'UE isole la Turquie.

M. Neofytou est vu comme un pragmatique, tandis que M. Mavroyiannis a assoupli sa position pour être en accord avec la ligne du parti Akel.

Le processus diplomatique parrainé par l'ONU achoppe sur de nombreux points, comme la présence de 40.000 soldats turcs en RTCN.

Sur les plus de 561.000 électeurs, 730 sont des Chypriotes-turcs inscrits dans la partie sud de l'île, avait indiqué vendredi le directeur du scrutin Constantinou.

Il a ajouté que 10.346 Chypriotes de l'étranger sont également inscrits sur les listes électorales.

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