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Le tribunal administratif de Strasbourg a interdit jeudi la réalisation des premiers travaux de confinement des déchets toxiques entreposés sur le site de Stocamine à Wittelsheim (Haut-Rhin), dont l'Etat veut qu'ils restent définitivement stockés, à l'inverse des collectivités et organisations écologistes.
Le préfet du Haut-Rhin "ne pouvait pas, à titre conservatoire, autoriser des travaux de confinement des déchets pour une durée illimitée", annonce le tribunal dans un communiqué.
Le préfet du Haut-Rhin avait pris, en janvier 2022, un arrêté imposant à l'exploitant du site, la société MDPA (dont l'Etat est unique actionnaire), de mettre en œuvre certains travaux "nécessaires au confinement des déchets".
La décision politique de laisser définitivement sous terre ces 43.000 tonnes de déchets a été prise en janvier 2021 par le gouvernement, mais aucun cadre légal n'autorise pour l'heure la réalisation des travaux de confinement.
Le stockage des déchets à Stocamine était autorisé pour 30 ans par un autre arrêté préfectoral, datant de 1997, qui prévoit toujours qu'à l'expiration du délai, "les déchets doivent être retirés".
Saisi par l'association Alsace Nature, l'association CLCV et la Collectivité européenne d'Alsace, le tribunal administratif de Strasbourg a donc estimé que le préfet "ne justifie pas d'un motif d'intérêt général pour procéder en urgence à de telles opérations".
"Le gouvernement reste mobilisé pour trouver une solution pérenne au problème des déchets confinés dans le site de Stocamine", a réagi le ministère de la Transition écologique, prenant "acte" de la décision du tribunal.
Assurant étudier "actuellement toutes les solutions", y compris "l'examen des possibilités de retrait des déchets", le ministère insiste néanmoins sur la nécessité "de prévoir, quoi qu'il arrive, un confinement de long terme des déchets qui ne pourront pas être extraits".
"Après avoir tenté de modifier la loi, produit 2 arrêtés préfectoraux qui ont été annulés, avoir été censuré par le Conseil Constitutionnel sur un cavalier législatif, il est grand temps pour le gouvernement de revenir à la raison sur ce dossier", a estimé Alsace Nature dans un communiqué, faisant référence aux précédentes batailles juridiques qui animent le dossier depuis des années.
A l'audience, en décembre, les représentants de l'Etat avaient justifié la nécessité des travaux de confinement par la dégradation du site, qui complique la sortie des déchets. L'avocat d'Alsace Nature François Zind avait lui affirmé que les défauts de maintenance du site contribuaient à cette dégradation.
Dans une expertise commandée par les MDPA au bureau d'étude Geos, ce dernier souligne que certaines installations "doivent faire l'objet d'une maintenance renforcée tous les 5 ou 6 ans". "Il n'y a pas eu de maintenance importante depuis plus de 7 ans. Cela explique l'état actuellement fortement dégradé de la zone", poursuit Geos.
Les jugements rendus jeudi "ne remettent pas en cause l'obligation d'effectuer les travaux de maintenance et de mise en sécurité de la mine et de l'installation de stockage des déchets", a d'ailleurs souligné le tribunal.
"Tout porte à croire que la dégradation des galeries est imputable au défaut de maintenance par l'Etat", a estimé François Zind. Sollicitée, la société MDPA n'a pas souhaité s'exprimer.
En parallèle, un nouveau dossier de demande d'autorisation de stockage des déchets "pour une durée illimitée", déposé par MDPA, est actuellement en phase d'instruction. Une enquête publique est attendue dans les prochains mois.
La plupart des collectivités territoriales (conseil départemental, conseil régional) et plusieurs parlementaires alsaciens ont déjà exprimé leur opposition au stockage définitif, réclamant le retrait d'un maximum de déchets.