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Après la messe, le premier vote: que se passe-t-il au Vatican en cette première journée d'un conclave historique?

Jour J au Vatican: les cardinaux s'enferment à partir de mercredi après-midi dans la chapelle Sixtine pour un conclave chargé d'élire, dans le plus grand secret, le successeur du pape François. 

EN DEUX MOTS :

  • Les 133 cardinaux électeurs entrent en conclave ce mercredi pour élire, à huis clos dans la chapelle Sixtine, le successeur du pape François, mort il y a plus de deux semaines.
  • Le vote s'annonce incertain, avec un premier résultat prévu ce soir, et une majorité des deux tiers peu probable dès le premier tour.
  • Ce conclave historique, très suivi dans le monde entier, reflète les tensions internes de l’Église et un contexte géopolitique particulièrement tendu.

Plus de deux semaines après la mort de Jorge Bergoglio, les 133 cardinaux électeurs venant de 70 pays - un record - lanceront ce cérémonial extrêmement codifié dans la chapelle Sixtine et suivi avec attention par quelque 1,4 milliard de catholiques et des milliers de journalistes du monde entier.

Il y a deux cardinaux électeurs belges: Dominique Mathieu et Jozef De Kesel.

cardinaux-belges
©Cathobel

Prélude à ce rituel ancestral, l'ensemble des cardinaux ont assisté à une messe solennelle dans la basilique Saint-Pierre, présidée par le doyen du collège cardinalice, l'Italien Giovanni Battista Re.

Dans son homélie, celui-ci a appelé à choisir le pape "dont l'Église et l'humanité ont besoin en ce tournant si difficile, complexe et tourmenté de l'Histoire", alors que conflits et retour du populisme rythment l'actualité. Le prélat a également plaidé, au cours de cette messe qui marque le dernier événement public avant le début du conclave, pour "le maintien de l'unité de l'Église" lors de ce "choix d'une importance exceptionnelle", et dans lequel "toute considération personnelle doit être abandonnée".

S'ensuivra l'après-midi une prière dans la chapelle Pauline, qui jouxte la Sixtine, à 16h30. Le compte à rebours s'enclenchera vraiment vers 17h, avec l'entrée en procession des cardinaux électeurs dans une chapelle Sixtine à l'isolement drastique: aucun téléphone portable ne sera autorisé, et les réseaux de télécommunication seront coupés entre les murs de la Cité du Vatican.

Ayant prêté serment de ne rien révéler des échanges - sous peine d'excommunication - ils s'enfermeront alors face à la fresque majestueuse mais aussi intimidante du Jugement dernier de Michel-Ange.

Une vidéo diffusée mardi par le Vatican permet de mesurer la solennité du cadre: double rangée de tables recouvertes de lourd tissu, aiguille pour percer les bulletins, places nominatives indiquées par un chevalet et sous-mains à rabats rouges frappés des armes du Saint-Siège.

L'élection mode d'emploi

Ce mercredi soir aura lieu un premier vote, dont le résultat ne sera sans doute pas connu avant 19h. Ce premier tour permettant de jauger les forces en présence, il est peu probable que la majorité des deux tiers, c'est-à-dire 89 voix, soit déjà atteinte.

L'élection devrait ainsi se poursuivre jeudi, avec deux tours prévus lors de la session du matin et deux autres l'après-midi. Le monde aura les yeux rivés sur la mince cheminée métallique fixée sur le toit de la chapelle Sixtine qui libérera, à la fin de chaque session, sa fumée annonciatrice: noire en l'absence de choix, et blanche si le pape est élu.

Après trois journées sans résultat, le scrutin est interrompu "pendant un jour au maximum, afin de laisser place à la prière" et "à un libre-échange entre les votants". Puis d'autres séries de scrutins sont organisées jusqu'à l'élection définitive. 

"Habemus Papam". Quand la cheminée émettra une fumée blanche, les cloches de la basilique Saint-Pierre sonneront pour annoncer aussi la nouvelle. Dès lors, il reste au nouveau pape à répondre à deux questions du cardinal doyen:

  1. Acceptez-vous votre élection canonique comme Souverain Pontife?
  2. De quel nom voulez-vous être appelé?

Répondant "oui" à la première, l'élu devient immédiatement pape et évêque de Rome.

Intérêt massif

"Le Jour du Jugement" pour La Stampa, "L'Heure du choix" pour La Croix... Couvert par quelque 5.000 journalistes, ce conclave suscite un intérêt massif dans le monde, bien au-delà des sphères religieuses, comme en témoignent les millions d'euros de paris sur l'identité du prochain pape, le succès des jeux en ligne ou les records du film "Conclave", sorti en 2024.

Qui, parmi les 133 cardinaux, se présentera habillé de blanc au balcon de la basilique Saint-Pierre? Des Italiens Pietro Parolin et Pierbattista Pizzaballa au Maltais Mario Grech en passant par l'archevêque de Marseille, le Français Jean-Marc Aveline, ou le Philippin Luis Antonio Tagle, plusieurs noms ont émergé parmi les "papabili", considérés comme favoris.

"Je pense qu'il doit représenter tous les continents où le catholicisme est présent", a confié mardi Enzo Orsingher, retraité romain de 78 ans.

"Clivage"

"Un pape qui est en faveur de l'avortement est impensable", mais "je trouve très positif que le pape aille visiter les détenus en prison (...). Il faut rester proche de ceux qui souffrent".

Ce conclave s'annonce particulièrement ouvert avec une représentation inédite des "périphéries" chères au pape François, qui a nommé 81% des cardinaux électeurs. Quinze pays sont ainsi représentés pour la première fois, dont Haïti, le Cap-Vert et le Soudan du Sud. "Il y a sans doute une opposition à la fois culturelle, et (faite) de ressentiment politique, de certaines Eglises du Sud à l'égard des Occidentaux et notamment des Européens", affirme François Mabille, directeur de l'Observatoire géopolitique du religieux.

Il existe aussi, selon lui, "un clivage qu'on a bien vu pendant tout le pontificat de François" entre "ceux qui estiment qu'il faut rappeler en permanence la doctrine, et les profils plus pastoraux, dans une logique d'accompagnement" des fidèles. Pour apprendre à se connaître et confronter leurs points de vue sur les défis de l'Eglise, les cardinaux ont tenu ces derniers jours 12 "congrégations générales" permettant de dessiner le profil du prochain pape.

Mais dans cette élection très ouverte, le contexte géopolitique pourrait peser, entre montée des populismes, retour de Donald Trump à la Maison Blanche et durcissement de la guerre entre Israël et le Hamas.

"On peut tout à fait imaginer que les cardinaux sensibles au contexte international qu'on connaît depuis le retour de Trump se disent qu'il faut une personne expérimentée à la tête de l'Eglise catholique, et notamment quelqu'un qui connaît parfaitement les relations internationales", ajoute François Mabille.

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