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La nomination du gouvernement belge n'a pas fait la Une de la presse française. Trop occupée avec le fameux 49.3 de François Bayrou. Les rares médias qui s'y sont intéressés, dont l'Agence France Presse, ont souligné qu'un nationaliste flamand était devenu Premier ministre. Mais Bart De Wever a prêté serment et fidélité au Roi, comme tous ses prédécesseurs. Désormais installé au 16 rue de la Loi, Bart De Wever va-t-il se belgiciser et plus particulièrement sur la scène internationale ?
Il y a une image qui m'a marqué hier/lundi. Bart De Wever, nommé depuis une heure à peine, un peu perdu au Palais d'Egmont pour son premier sommet européen. Avec le côté gêné du petit nouveau qui arrive à l'école en cours d'année, autour de la grande table, il rejoint la place qu'on lui indique et cherche des yeux quelqu'un qu'il connaîtrait déjà, comme Giorgia Meloni.
Et puis là, tout sourire, Emmanuel Macron, genre chef de classe, vient lui serrer la main et vraisemblablement lui souhaiter la bienvenue. J'aime imaginer le dialogue: "Bonjour, ça va ? Félicitations pour ta nomination. Tu verras, ici c'est plutôt sympa, même si parfois c'est un peu tendu." Et Bart De Wever lui répondre quelque chose comme: "Bonjour monsieur le Président, je suis très honoré. Tu sais, tu peux m'appeler Emmanuel."
En quelques secondes, le nationaliste flamand a changé de dimension. Il fait maintenant partie de ce qu'on appelle les chefs d'État et de gouvernement. J'en ai connu deux ou trois à qui c'est arrivé et qui ont aimé ça. Je pense notamment à Yves Leterme, qui lui aussi avait une image de flamand pure et dure. C'est bien de diriger le premier parti du pays. C'est bien d'être président du gouvernement flamand ou bourgmestre de la deuxième ville de Belgique. Mais Premier ministre, c'est autre chose. Vous dites à votre secrétaire "Je voudrais parler au roi d'Espagne, au chancelier allemand, au président des États-Unis." Et on vous le passe. Vous devez vous rendre à l'ONU pour l'Assemblée Générale et un avion militaire vous attend à Melsbroek. Vous traversez la ville dans une limousine avec gyrophares, escorté par des motards. Et surtout, que ce soit à New York, à Strasbourg, à Genève ou dans n'importe quel voyage officiel, vous parlez au nom de tous les Belges.
Or, sur la scène internationale, la Belgique est un pays qui compte. Membre fondateur de l'ONU, de l'OTAN, de l'Union Européenne, ancienne puissance coloniale, signataire de la plupart des grands traités internationaux, classée à la 25ème place mondiale et à la 9ème européenne au niveau de son PIB, c'est ce que j'aime appeler un grand pays, un grand petit pays.
Avec nos presque 12 millions d'habitants, nous sommes plus peuplés que l'Autriche, la Hongrie, le Portugal, la Tchéquie, le Danemark, la Suède, la Norvège, l'Irlande, tous les pays baltes, etc.
Et surtout, la Belgique est membre de l'Organisation Internationale de la Francophonie. Et pas seulement la communauté Wallonie-Bruxelles. La Belgique fédérale en tant que telle. Et c'est toujours un grand bonheur, une délectation, lors des sommets francophones, d'entendre un premier ministre flamand défendre le français, en français.